Assur (ville)
Assur Qalʿat Šarqat | ||||||||||||
Assur et les principaux sites assyriens. |
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Localisation | ||||||||||||
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Pays | Irak | |||||||||||
Gouvernorat | Salah ad-Din | |||||||||||
Région antique | Assyrie | |||||||||||
Coordonnées | 35° 27′ 25″ N 43° 15′ 37″ E / 35.456842, 43.26029835° 27′ 25″ Nord 43° 15′ 37″ Est / 35.456842, 43.260298 | |||||||||||
Superficie | environ 100 hectares | |||||||||||
Géolocalisation sur la carte : Irak
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Pays | Irak | ||||
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Type | Culturel | ||||
Critères | (iii) (iv) | ||||
Superficie | 70 ha | ||||
Zone tampon | 100 ha | ||||
Numéro d’identification |
1130 | ||||
Zone géographique | Asie et Pacifique ** | ||||
Année d’inscription | 2003 (27e session) | ||||
Classement en péril | 2003 | ||||
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Assur (ou Assour, assyrien Aššur) est une ancienne ville, capitale de l'Assyrie jusqu'au début du IXe siècle av. J.-C., située sur la rive occidentale du Tigre. Ses ruines se trouvent actuellement sur le site de Qalʿat Sharqat, dans la plaine de Sharqat, à environ 110 kilomètres au sud de Mossoul. Le site principal est un promontoire dominant le fleuve, peuplé depuis au moins le début du IIIe millénaire av. J.‑C. Il a été fouillé au début du XXe siècle par une équipe dirigée par des archéologues allemands, puis à plusieurs reprises après 1945 par des archéologues irakiens et allemands.
Les ruines du site d'Assur s'étendent sur environ une centaine d'hectares, dont plus de 65 hectares pour l'espace urbain protégé par des murailles à l'époque assyrienne. Les principaux monuments de l'époque assyrienne étaient situés dans la partie nord du site, sur le promontoire. On y trouvait le temple du dieu Assur, divinité nationale de l'Assyrie, qui était le principal sanctuaire de ce pays, dont les souverains se sont toujours présentés comme les délégués terrestres du dieu, véritable souverain du royaume. Le palais principal (le « Vieux palais »), situé à l'ouest du temple, était l'autre monument majeur du site, reconstruit à plusieurs reprises durant près de 1500 ans. Les fouilles archéologiques ont dégagé d'autres temples et palais, ainsi que des groupes de résidences, et une grande quantité de textes cunéiformes constituant une source essentielle sur l'histoire assyrienne.
La cité d'Assur fut prise et détruite lors de la chute de l'empire assyrien, en 614 av. J.-C. Elle connut une dernière période de prospérité aux IIe et IIIe siècles de notre ère, durant l'époque de la domination de la Haute Mésopotamie par les Parthes. Le sanctuaire du dieu Assur fut alors reconstruit suivant les habitudes architecturales de l'époque, présentant des inspirations parthes et gréco-romaines, et un palais servant de résidence aux seigneurs de la ville fut construit sur le centre du site.
Après cette dernière période de prospérité et une nouvelle destruction vers 240 infligée sans doute par les Sassanides, le tell de Qalʿat Sharqat ne connut plus d'occupation importante. Il fut sans doute repeuplé de façon sporadique à l'époque islamique, mais sert depuis essentiellement de site funéraire pour les habitants de la ville de Sharqat qui s'est développée à ses pieds. Le site est menacé d'être englouti sous les eaux du fait d'un projet de construction d'un barrage en aval sur le fleuve (le barrage de Makhoul). En 2003, l'UNESCO a inscrit Assur sur la liste du patrimoine mondial, le considérant comme un site en péril[1].
Redécouverte et fouilles
Les ruines de la cité d'Assur se trouvent sur le tell appelé de nos jours Qalʿat-Sharqat, la « Forteresse de Sharqat », Sharqat étant la ville principale de la plaine alentour, qui s'étend à l'ouest du site archéologique. C'est la seule des grandes capitales assyriennes à ne pas faire l'objet de fouilles au milieu du XIXe siècle : parmi les principaux découvreurs de cette période des débuts de l'archéologie mésopotamienne, l'anglais Austen Henry Layard y fait quelques recherches en 1847 et 1850-51, son associé irakien Hormuzd Rassam y retourne quelques années plus tard[2],[3]. Ils en ramènent notamment une statue du roi Salmanazar III, ainsi qu'un prise portant une inscription de Tukulti-Ninurta Ier, resté fameux dans l'histoire de l'assyriologie puisque c'est en faisant traduire celle-ci conjointement aux premiers déchiffreurs du cunéiforme en 1857 et en obtenant des traductions proches que le Royal Asiatic Society (en) de Londres peut confirmer que cette écriture et de la langue akkadienne sont bien comprises.
Ce n'est qu'un demi-siècle après ces premières explorations, en 1903, que les fouilles commencent de façon plus aboutie à Qalʿat-Sharqat, sous la conduite de la Deutsche Orient-Gesellschaft (DOG, Société orientale allemande). Robert Koldewey, qui dirige alors les fouilles du site de Babylone, dépêche un de ses adjoints Walter Andrae, architecte de formation tout comme lui, pour conduire les travaux à Qalʿat-Sharqat. Il y reste jusqu'en 1914. Andrae s'est d'abord attaché à déterminer l'organisation générale du site antique, notamment le tracé de ses murailles, puis il a dégagé les principaux groupes monumentaux qui se trouvaient dans la partie nord du tell. Dans la partie sud de la ville correspondant à la partie habitée à proprement parler, des tranchées furent creuser afin d'avoir une meilleure idée de l'urbanisme et de l'architecture domestique. Si les niveaux des périodes les plus anciennes du site ne furent explorés qu'en un seul point du site (le temple d'Ishtar), les principaux monuments de l'époque assyrienne ainsi que de l'époque parthe furent alors dégagés, ainsi que de nombreuses résidences et des tombes de ces différentes époques, permettant la découverte de nombreuses inscriptions cunéiformes, sur tablettes d'argile ou d'autres supports, et de nombreux objets. La méthode de fouilles d'Andrae, prolongeant celle de son mentor Koldewey, marque un tournant dans l'élaboration d'une archéologie scientifique en Mésopotamie par la qualité de ses relevés et des informations qu'il tirait de ses travaux[2],[4].
Les différentes trouvailles sont transportées en 1914 à Bagdad où elles sont partagées avec les autorités ottomanes. Une partie va donc au musée d'Istanbul, et une autre prend la mer sur un bateau en direction de l'Allemagne, mais est stoppée à Porto lors du début de la Première Guerre mondiale, puis saisie et confiée à un musée local. Andrae réussit à obtenir la restitution des objets en 1926, alors qu'il travaille pour les musées de Berlin, en les échangeant contre des objets provenant de ceux-ci. Quand il prend la tête du département des antiquités orientales (l'actuel Vorderasiatisches Museum), qui occupe les salles du Pergamon Museum, il consacre une aile aux trouvailles effectuées à Assur. Les collections orientales furent globalement peu touchées par les destructions et pillages qui eurent lieu lors de la Seconde Guerre mondiale, la majorité des objets exhumés à Assur furent donc préservés, à quelques exceptions notables (l'autel de Tukulti-Ninurta, plusieurs des objets en or issus des tombes assyriennes)[5].
Les fouilles ne reprirent à Qalʿat-Sharqat qu'après 1945, sous la conduite d'équipes d'archéologues irakiens, qui effectuèrent quelques recherches et s'attachèrent surtout à la préservation du site, puis la reconstruction de certains monuments à partir de 1978 (une partie de la murailles et de ses portes, la ziggurat, des temples et palais). Des équipes allemandes retournèrent sur le site en 1988-1989 sous la direction de Reinhard Dittmann puis en 1989-1990 sous celle de Barthel Hrouda[2],[6]. Interrompues par les conflits, les fouilles reprirent entre 1999 et 2001 sous la direction de l'archéologue irakien Hafidt al-Hayani, rejoint en 2000 et 2001 par des fouilleurs allemands conduits par Peter A. Miglus. Sont en particulier mis au jour des résidences et un palais néo-assyriens, ainsi que des tombes d'époque parthe[7].
Les périodes archaïques
Assur au IIIe millénaire av. J.‑C.
Le site de Qalʿat-Sharqat semble s'être développé durant la première moitié du IIIe millénaire av. J.‑C. D'éventuelles occupation antérieures n'ont pu être démontrées avec certitude : des fragments de poterie trouvés dans le secteur du temple du dieu Assur (au nord-est du tell) pourraient dater du chalcolithique (VIe millénaire av. J.‑C.), d'autres pourraient remonter à la période d'Obeid (v. 4000 av. J.-C.), mais cela reste sujet à caution. Il n'y a aucune trace d'une occupation datée de la période d'Uruk (la majeure partie du IVe millénaire av. J.‑C.) ou de celle de Ninive V (fin du IVe millénaire av. J.‑C.)[8]. Les plus anciennes traces d'occupation durable ont été mises au jour dans les niveaux anciens du temple d'Ishtar, au milieu du IIIe millénaire av. J.‑C., correspondant à la phase III de la période des dynasties archaïques[8].
Le nom de la ville d'Assur apparaît dans des textes de la période d'Akkad (v. 2340-2150 av. J.-C.) mis au jour à Gasur (Yorghan Tepe, la future Nuzi). Des inscriptions exhumées dans le temple d'Ishtar mentionnent des personnages qui devaient régner sur cette ville, le premier étant un certain Ititi, qui règne vers le XXIIIe siècle av. J.-C. et commémore un don à la déesse consistant en du butin pris après une victoire contre Gasur[9]. C'est dans ces années-là qu'Assur doit passer sous la coupe des rois d'Akkad, puisque le souverain suivant connu par une inscription, Azuzu, se dit serviteur de Manishtushu (2269-2255), souverain d'Akkad[10]. Après une éclipse documentaire de près de deux siècles, Assur réapparaît dans la documentation écrite au début du XXIe siècle av. J.-C., alors qu'elle vient d'être soumise par les souverains de la troisième dynastie d'Ur (2112-2004 av. J.-C.). Une inscription votive a été laissée dans le temple d'Ishtar par le gouverneur de la ville au temps du roi Shulgi (2094-2047), appelé Zarriqum[11]. Assur redevient indépendante lors de l'effondrement du royaume d'Ur dans les dernières décennies du XXIe siècle av. J.-C.[12]
Découvertes archéologiques
Le temple d'Ishtar est le seul édifice qui a livré des niveaux de la période archaïque, même s'il semblerait que le vieux palais ait eu un antécédent dès ces périodes (on y a en tout cas exhumé 14 tablettes de la période d'Akkad), et que les fouilleurs du site ont repéré sous le futur temple de Sîn et de Shamash les traces d'une résidence qu'ils estimaient datée de l'époque d'Akkad. Une statue acéphale mise au jour à proximité du futur temple d'Anu et d'Adad pourrait également dater de cette période, ou bien de celle d'Ur III[8].
Les quatre niveaux les plus anciens du temple d'Ishtar (H à E du plus ancien au plus récent) sont donc les principales sources d'information sur Assur à l'époque archaïque, que ce soit par l'architecture, l'art et l'épigraphie. Le niveau H semble dater du milieu du IIIe millénaire av. J.‑C. Le niveau G est mieux connu. Le plan de l'édifice pour cette période n'a été reconstitué que partiellement : l'accès semble se faire par un vestibule puis une salle allongée du côté nord-ouest, conduisant sur une cour principale autour de laquelle devait s'organiser l'édifice. Juste à l'est se trouve une pièce cultuelle (environ 11 × 6 mètres) disposant de banquettes sur ses côtés, conduisant à la cella sur son côté nord. C'est dans la salle cultuelle que les archéologues ont mis au jour plusieurs objets rituels, peut-être disposés à l'origine sur les banquettes[13]. Il s'agit notamment de supports cultuels, d'encensoirs, d'autels en terre cuite en forme de maison, d'un vase conique en pierre sculpté, et de plusieurs statues : une représentant un homme barbu avec une robe à franges, dans un style caractéristique de la période des dynasties archaïques, une statue acéphale d'un personnage assis sur un trône, une représentant une femme debout, et une tête de femme (le reste de la statue manque) d'une belle qualité d'exécution[14].
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Objets de culte : encensoirs, autels en forme de maison.
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Autel en forme de maison.
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Statue de femme debout, en pierre blanche.
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Tête de femme.
Les époques assyriennes
Historique
Au début du IIe millénaire av. J.‑C., le contexte ethnique de la Haute Mésopotamie a évolué avec l'arrivée de populations amorrites, et également hourrites, qui prennent la tête d'entités politiques faisant de la région un ensemble morcelé politiquement, sur lesquels certains souverains plus puissants tentent d'exercer une hégémonie. Les rois d'Assur ne sont clairement pas de ceux-là, puisqu'ils n'indiquent pas dans leurs inscriptions avoir fait des conquêtes militaires, commémorant seulement leurs constructions dans leur ville, qui a donc un statut de « Cité-État ». Assur se singularise des autres villes de la région par le dynamisme de sa communauté de marchands, mettant en place un commerce à longue distance très fructueux, en particulier en direction de l'Anatolie où ils implantent plusieurs comptoirs durant les XIXe et XVIIIe siècles pour y acheter de l'argent, contre des étoffes produites dans les ateliers de leur ville (souvent sous la direction des épouses des marchands restées à Assur) et de l'étain importé d'Iran. Leurs activités commerciales sont documentées par des milliers de tablettes cunéiformes retrouvées sur le site de Kültepe, l'ancienne Kanesh, en Cappadoce, qui constituent par ailleurs l'essentiel de la documentation sur Assur pour cette période, avec les fouilles archéologiques sur le site, qui ont dégagé des niveaux du palais royal, des temples d'Assur et d'Ishtar mais aussi des tombes pour cette époque[15]. On parle pour cette époque de « période paléo-assyrienne »[16].
La ville est alors dirigée par un ensemble d'institutions original, constitué d'un conseil d'Anciens, un magistrat ayant en charge l'administration de la cité (le limmu), et donc du roi, appelé iššiakku, « vicaire », car il est conçu comme étant avant tout le représentant du dieu Assur qui est le vrai roi des Assyriens, et a manifestement un rôle plus limité que ceux des autres souverains de cette période. Les rois paléo-assyriens forment au XIXe siècle av. J.-C. une lignée dynastique, dont le fondateur semble être Puzur-Assur Ier, sur lequel on ne sait pas grand chose. Erishum Ier (v. 1974-1935) est la principale figure de cette période : il semble avoir joué un rôle dans l'essor commercial de la cité, et entreprend d'importants travaux dans le temple du dieu Assur, restaure les murailles de la cité[17]. La puissance commerciale d'Assur connaît un arrêt vers 1835, et une trentaine d'années la ville perd son indépendance, après sa conquête par un roi amorrite, Samsi-Addu d'Ekallatum, que la tradition assyrienne postérieure a intégré parmi les souverains légitimes d'Assur, sous le nom assyrien Shamshi-Adad Ier (1807-1775)[18]. Dans les faits, Assur n'était qu'une ville parmi d'autres dans le royaume de Samsi-Addu (que les historiens désignent comme « Royaume de Haute Mésopotamie »), mais cette époque marque un renouveau du commerce avec l'Anatolie, et est marquée par des travaux importants dans le palais royal et le temple du dieu Assur[19]. À Samsi-Addu succède son fils Ishme-Dagan (v. 1775-1735), qui perd vite le puissant royaume de son père, devant notamment se soumettre à l'autorité du roi Hammurabi de Babylone, qui mentionne Assur parmi les villes de son royaume dans son célèbre Code[20].
La période qui suit est mal connue. La ville est manifestement une faible puissance politique, et ses réseaux commerciaux se sont effondrés. Le fils d'Ishme-Dagan, Asinum, est déposé par un certain Puzur-Sîn, originaire d'Assur, qui commémore cela dans une inscription où il se vante d'avoir chassé une dynastie d'origine « étrangère » (amorrite)[21]. Le royaume d'Assur passe ensuite sous la domination d'une nouvelle dynastie, fondée par un certain Abasi. La succession royale pour les deux siècles qui suivent est connue avant tout par des listes royales postérieures, ce qui empêche d'en savoir plus sur la situation politique de la ville dans cette époque obscure. Elle reprend apparemment de l'importance vers 1500, sous les règnes d'Assur-nerari Ier qui a laissé plusieurs inscriptions mentionnant la rénovation de temples et des murailles de la ville[22], et de son fils Puzur-Assur III, qui restaure également des temples[23] et conclut un accord de délimitation de frontières avec le roi Burna-Buriash Ier de Babylone, plaçant les limites de son royaume dans la région moyenne du Tigre, ce qui constituerait un signe de l'extension de la puissance d'Assur. Les années suivantes, apparemment marquées par au moins une crise successorale, sont plus difficiles pour les Assyriens, qui font face à la montée en puissance du royaume hourrite du Mitanni, qui parvient à les placer sous sa coupe au plus tard vers la fin du XVe siècle av. J.-C. On sait par ailleurs d'un roi du Mitanni nommé Shaushtatar a pris et pillé Assur après une tentative de rejeter sa domination, mais cet événement est difficile à resituer dans la chronologie de l'histoire de la ville[24].
Quoi qu'il en soit, la première moitié du XIVe siècle av. J.-C. voit le royaume d'Assur prendre plus de puissance, pour finalement s'extraire de la tutelle du Mitanni et rivaliser avec les rois de Babylone qui avaient également des visées sur elle, sous l'impulsion d'Assur-uballit Ier (1365-1330). Assur devient alors une des puissances majeures du Moyen-Orient durant cette période, qualifiée par les historiens de « médio-assyrienne » (v. 1365-934). Le royaume se détache alors du cadre territorial de la cité-État, puisqu'on parle désormais de « pays d'Assur », l'Assyrie[25]. La ville d'Assur prend alors le statut de capitale politique de premier plan, et les souverains qui y règnent y accomplissent de nombreux travaux, à commencer par son palais royal et ses temples. L'enrichissement des élites assyriennes se remarque également par la présence d'archives et de tombes riches exhumées dans les quartiers résidentiels d'Assur. La puissance assyrienne s'affirme en particulier sous les règnes d'Adad-nerari Ier (1308-1275), Salmanazar Ier (1275-1245) et Tukulti-Ninurta Ier (1244-1208), qui joignent à leurs succès militaires de grands programmes de construction[26]. Le premier renforce les murailles de la ville et ses quais, restaure les temples d'Assur et d'Ishtar et plusieurs portes[27], le second entreprend à son tour des travaux dans les sanctuaires et le palais[28], tandis que le troisième érige le Nouveau palais et reconstruit le temple d'Ishtar sur un nouveau plan[29]. Il fonde une nouvelle ville royale à 3 kilomètres d'Assur, sur la rive opposée du Tigre, qu'il nomme « Port de Tukulti-Ninurta », Kar-Tukulti-Ninurta, la première fondation d'une nouvelle capitale dans l'histoire assyrienne, qui devait être de courte durée puisque le site fut délaissé après la mort (assassinat) de son fondateur.
Le XIIe siècle av. J.-C. voit la puissance assyrienne connaître un reflux. Il n'y a pas de traces de travaux d'importance à Assur avant les règnes d'Assur-resh-ishi Ier (1133-1116) et surtout Teglath-Phalasar Ier (1114-1076), le dernier des grands rois médio-assyriens. C'est de cette époque que date en particulier la reconstruction du temple double d'Anu et d'Adad avec ses ziggurats jumelles[26]. Le royaume assyrien connaît ensuite un déclin marqué, notamment face à la progression des groupes d'Araméens qui s'installent en Haute-Mésopotamie et fondent plusieurs royaumes en Syrie, là où les Assyriens avaient auparavant établi leur domination. Les inscriptions royales se font de plus en plus rares à partir de la fin du XIe siècle av. J.-C., et l'activité de construction à Assur est sans doute très limitée[30],[26].
Les rois d'Assur ne parviennent à rétablir leur puissance que de façon progressive, à partir de la seconde moitié du Xe siècle av. J.-C., qui marque le début de la période dite « néo-assyrienne » (934/911-609 av. J.-C.). La puissance des grands rois médio-assyriens est à nouveau égalée sous le règne d'Assurnasirpal II (883-859), qui entreprend des travaux dans le vieux palais, avant de transférer sa capitale dans la vieille cité de Kalkhu, située en amont sur le Tigre, sur la rive gauche, où il fonde une nouvelle capitale. On ne sait pas vraiment ce qui a présidé à ce choix. Une raison souvent avancée est qu'Assur, par sa situation sur la rive droite du Tigre, serait trop exposée à d'éventuelles attaques araméennes venues depuis l'ouest. Elle reste néanmoins capitale religieuse du pays car elle dispose du seul temple dédié au dieu national Assur, qui conserve toute son importance dans l'idéologie du royaume, et plusieurs rois, à commencer par Assurnasirpal II, sont enterrés dans le vieux palais. Ses anciens monuments sont toujours restaurés, parfois avec d'importants remaniements[26]. Salmanazar III (858-824) reconstruit le temple d'Ishtar et celui d'Anu et d'Adad, et fait peut-être aussi bâtir le « Palais est » dégagé lors des dernières campagnes de fouilles.
La puissance assyrienne continue de croître dans les décennies qui suivent, pour aboutir à la fin du VIIIe siècle av. J.-C. à la constitution d'un véritable empire. La capitale change à nouveau : après Kakhu, ce sont Dur-Sharrukin, puis Ninive qui ont les faveurs des souverains. Assur n'est pas délaissée pour autant, en raison de son statut religieux. Sennachérib (704-681) entreprend ainsi un grand programme de travaux en lien avec le culte d'Assur, qu'il cherche à mettre de plus en plus en valeur face au grand dieu rival de Babylone, Marduk, en reprenant des éléments du culte de ce dernier. Il fait ainsi ériger un temple destiné à la fête-akitu à l'ouest des murailles d'Assur, à l'image du temple similaire qui existe à Babylone. Il agrandit le temple principal du dieu Assur, reconstruit celui des dieux Sîn et Shamash, et fait construire un nouveau palais au sud-est de la ville, destiné à un de ses fils (le « Palais princier »). Le sanctuaire du dieu Assur est à nouveau restauré par Assarhaddon (680-669) et Assurbanipal (668-627). Après le règne de ce dernier, l'Assyrie est secouée par une guerre civile dont sort vainqueur Sîn-shar-ishkun (627-612), qui fait reconstruire le temple d'Ishtar pour y adjoindre un sanctuaire dédié au dieu Nabû[31]. Les archéologues ont également dégagé de nombreuses résidences, avec des archives et des sépultures de cette période.
Mais la guerre civile a été suivie par un conflit conduit par deux anciens vassaux de l'Assyrie, les Babyloniens et les Mèdes, qui parviennent en quelques années à pénétrer au cœur du territoire assyrien. En 614, Assur est prise par une armée mède qui la pille et détruit ses principaux monuments. L'empire assyrien s'effondre dans les années qui suivent.
Rien n'indique clairement qu'Assur ait fait l'objet d'une occupation importante dans les deux siècles qui ont suivi cette destruction. Quelques textes la mentionnent peut-être, mais ils sont fragmentaires ce qui empêche d'être sûr qu'il s'agisse bien de cette ville : un texte trouvé à Sippar pourrait indiquer qu'Assur a eu un gouverneur babylonien ; le Cylindre du roi perse Cyrus II semble indiquer que ce roi a rendu au temple d'Assur la statue du dieu qui avait été enlevée par les Babyloniens lors de la prise de la ville ; Xénophon, dans son évocation du périple des Dix Mille (vers 401 av. J.-C.) mentionne une ville « grande et prospère » nommée Caenae, qu'on identifie couramment comme Assur. L'archéologie est loin de donner l'idée d'une reprise importante du peuplement de la ville : seules des tombes et un petit trésor de bijoux en argent trouvé sur le site du Palais neuf pourraient être attribuées avec certitude à cette période « post-assyrienne » en raison de leur ressemblance avec l'art achéménide, mais aucune construction[32].
Organisation générale de la ville
La ville d'Assur aux époques assyriennes est une cité d'au moins 65 hectares, dont la majeure partie est protégée par une muraille, et subdivisée en deux grands ensembles.
La « ville intérieure » (en assyrien libbi āli, « cœur de la ville » ; on trouve parfois mention d'une « ville haute », ālu ele, dans les textes antiques, et « vieille ville » dans les écrits modernes), est la zone la plus anciennement habitée, qui couvre environ une quarantaine d'hectares[2]. Elle est située sur un éperon rocheux surplombant le Tigre sur plus de 40 mètres de hauteur, selon la tradition des villes de Haute Mésopotamie, dont le centre se trouve généralement sur une colline. Le cours d'eau forme un coude sur le côté nord de la cité, continuant son cours sur le côté est. Les eaux pouvant menacer la ville intérieure par endroits, en particulier au côté nord directement exposé au cours du Tigre, un mur protecteur avait été érigé et devait être couramment entretenu en raison de l'érosion fluviale ; il était complété par endroits par des canaux de drainage pour évacuer les eaux[33]. Sur ses côtés ouest et sud ne bénéficiant pas de protections naturelles, et donnant directement sur la plaine steppique, la ville intérieure est entourée (sans doute dès le début du IIe millénaire av. J.‑C.) d'une muraille au tracé semi-circulaire. Elle fut doublée et étendue dans le troisième quart du IXe siècle av. J.-C., sous le règne de Salmanazar III.
La ville intérieure abrite les monuments principaux de la cité, situés dans sa partie nord le long de la falaise : l'angle nord-est, l'éperon rocheux à proprement parler, comprend le sanctuaire principal de la cité, dédié au dieu Assur. Vers l'est se trouvent d'autres temples, ainsi que les palais royaux : le Vieux palais, qui date de la première moitié du IIe millénaire av. J.‑C., et le Nouveau palais qui date de la fin du IIe millénaire av. J.‑C. D'autres monuments importants de cette zone sont les portes intra-urbaines, mentionnées dans de nombreuses inscriptions royales mais difficiles à localiser précisément, comme celle appelée mušlālu, près du temple d'Assur (ou dans son complexe). Localisés sur la partie la plus haute du site, dominant la plaine alentour, ces monuments devaient être visibles depuis très loin. La partie sud de la ville intérieure comprend la zone résidentielle, moins bien connue car moins explorée par les archéologues, qui y ont néanmoins dégagé de nombreuses habitations de l'époque néo-assyrienne. Durent cette même époque, l'espace résidentiel privé a progressé vers le nord, puisque le Nouveau palais a disparu et qu'à la place se trouvent des résidences cossues. De cette époque datent également des palais situés en dehors de la zone monumentale traditionnelle, le Palais ouest et le Palais princier. L'urbanisme de la zone résidentielle, connu par les fouilles, est caractérisé par des rues étroites et tortueuses ; mais les inscriptions mentionnent également la présence de voies processionnelles sans doute plus larges et régulières, ainsi que celle de vergers. Le long du Tigre, se trouvent des espaces appelés le « quai » (kāru), devant comprendre le port de la cité, et également le quartier des échanges.
La ville s'est par la suite étendue vers le sud, en contrebas. C'est la « ville nouvelle » (ālu eššu, qui peut correspondre au moins en partie à la « ville basse », ālu šaplē, évoquée dans quelques textes), de plus de 15 hectares[2], dont la fonction exacte n'est pas connue car elle n'a pas fait l'objet de fouilles. Elle fut englobée dans la muraille de la cité, peut-être dès le milieu du IIe millénaire av. J.‑C.[35]
Les palais
Le plus ancien monument important d'Assur est le « Vieux Palais », situé à l'ouest du complexe sacré du dieu Assur. Les archéologues ont identifié trois grandes phases de cet édifice, qui couvre toutes les périodes assyriennes. Les niveaux plus récents ont été érodés, et la succession de reconstructions empêche de bien connaître le plan de l'édifice :
- Le plus ancien niveau bien connu, qui semble succéder à des édifices plus anciens (peut-être de l'époque d'Akkad, et du XXe siècle av. J.-C.), correspond à une construction du XIXe siècle av. J.-C., généralement attribué à Shamshi-Adad Ier. Il s'agit d'un édifice quadrilatère, de dimensions approximatives 112 × 98 mètres, comprenant quelques 172 salles, dont six vastes cours, dont le plan semble remarquablement pensé et a servi de base aux phases suivantes. La cour principale, accessible depuis une entrée au nord, organisait peut-être l'espace officiel[36].
- Le palais est ensuite rasé sous Puzur-Sîn vers 1700 av. J.-C. Le palais est reconstruit à l'époque médio-assyrienne, peut-être dès Assur-nerari Ier vers 1500, mais l'état le mieux connu pour cette époque semble correspondre aux reconstructions d'Adad-nerari Ier vers 1300 av. J.-C. Si l'entrée et la cour principale sont disposées à l'identique du niveau ancien, le reste de l'édifice a un plan moins réguliers que le précédent, à commencer par ses contours qui ne semblent pas réguliers sur son côté sud. La cour principale semble conduire vers le sud-ouest à une grande pièce ouvrant apparemment sur la salle du trône, tandis que le côté nord-ouest, organisé autour d'une autre cour intérieure, pourrait avoir servi d'espace privé, préfigurant l'organisation classique des palais néo-assyriens, autour d'une zone privée et d'une zone publique séparées par une salle du trône. La partie orientale, moins bien restituée, semble aussi comporter des appartements privés, peut-être aussi des espaces de réception. On a retrouvé dans la partie sud-est la tombe souterraine du roi Assur-bel-kala Ier (1074-1056).
- Le palais est reconstruit par Assurnasirpal II (883-859). Le plan de cet édifice, qui conserve la cour principale et également une cour orientale, est encore moins bien connu que pour les états précédents. C'est peut-être avec lui que s'affirme la forme classique des palais néo-assyriens, bien connue par le palais du même Assurnasirpal II à Kalkhu, donc érigé peu après. Des fragments de créatures androcéphales ailées (lamassu) qui ont été retrouvés dans cet édifice pourraient indiquer que c'est le premier palais assyrien à en avoir compris, dès cette époque, avant celui de Kalkhu. La Vieux palais est en tout cas restauré à plusieurs reprises par les souverains assyriens, qui bien qu'ils n'aient plus Assur pour capitale y résident périodiquement, notamment pour des cérémonies religieuses. Plusieurs rois assyriens continuent à se faire enterrer dans l'édifice, où on a mis au jour les tombeaux souterrains (pillés dès l'Antiquité) d'Assurnasirpal II, Shamshi-Adad V, Assarhaddon, et deux autres tombes non attribuées ; on sait par ailleurs que Sennachérib s'y est également fait inhumer, mais l'emplacement n'a pas été retrouvé[37].
Le « Nouveau Palais » fut bâti plus tard au nord-ouest de la citadelle par Tukulti-Ninurta Ier (1244-1207), sur une vaste terrasse d'environ 29 000 m²[26]. Il n'en reste quasiment plus rien, l'édifice ayant été abandonné et arasé dès l'époque néo-assyrienne pour être remplacé par des résidences, et son existence serait sans doute inconnue si des inscriptions commémorant sa construction n'avaient pas été exhumées[39]. Quelques objets ont été trouvés à sa surface, notamment des fragments de frises en ivoire[38].
Le « Palais princier », daté du règne de Sennachérib qui l'a fait construire pour le prince héritier, a été érigé au sud-est de la ville[26]. Peu exploré, son plan n'a pas bien été restitué.
Les fouilles irakiennes qui ont eu lieu entre 1999 et 2001 sur le site ont dégagé un quatrième palais d'époque néo-assyrienne, au sud de la ziggurat, qui a été désigné comme « Palais est ». Sa date de fondation est incertaine ; il semblerait qu'il faille l'attribuer à Salmanazar III (858-824) d'après une inscription qui y a été retrouvée. Les archéologues ont identifié des unités résidentielles au nord, avec notamment des pièces d'eau et un système élaboré de canalisation, et des pièces de réception dans la partie sud, qui semble avoir eu un étage si on en juge par l'épaisseur plus importante de ses murs[40].
Le temple et le culte du dieu Assur
Si Assur n'est plus la capitale politique de l'Assyrie après le IXe siècle, elle demeure toujours sa capitale religieuse même après la fin de l'Empire, car leur dieu et souverain Assur y a son domicile terrestre. Ainsi, la cité a toujours une grande importance pour les rois assyriens, dont le pouvoir est légitimé par Assur, leur maître. Les souverains résident d'ailleurs toujours une partie de l'année à Assur pour accomplir les lourdes tâches que leur impose leur fonction religieuse, car ils sont aussi les grands prêtres du dieu. Ils n'ont d'ailleurs pas cherché à ériger de nouveaux temples pour ce dieu dans leurs nouvelles capitales, tellement son culte était attaché à celui de la ville homonyme.
À l'origine, le dieu Assur semble être la divinisation de la ville d'Assur, ou peut-être plus précisément celle de son promontoire rocheux, le culte des monts étant quelque chose de courant dans la Haute Mésopotamie antique. La personnalité de ce dieu s'est enrichie avec l'essor politique de l'Assyrie en prenant les aspects des autres divinités souveraines de la Mésopotamie, en premier lieu Enlil, le roi des dieux. Au début du VIIe siècle av. J.-C., ce furent les aspects de la personnalité du grand dieu babylonien Marduk qui furent repris, sous le règne de Sennachérib qui transposa des éléments du culte de Babylone à Assur, notamment la fête du Nouvel An[42].
Le temple principal d'Assur est situé au sommet de l'éperon rocheux de la ville intérieure, dominant le reste du site et la plaine alentour. Les inscriptions de fondation les plus anciennes qui y ont été mises au jour indiquent qu'il a été construit dans la seconde moitié du XXe siècle av. J.-C., sous le règne d'Erishum Ier, qui dit que son nom cérémoniel est « Taureau sauvage » (akkadien rimum)[44], avant d'être reconstruit vers 1800 par Shamshi-Adad Ier, qui dans ses inscriptions le considère comme un temple d'Enlil et lui donne le nom cérémoniel de « Maison-taureau sauvage des pays » (sumérien é-am-kurkurra)[45]. Les archéologues n'ont pas réussi à y identifier un stade antérieur à ces époques. Le temple est alors un édifice d'environ 110 × 54 mètres, d'orientation sud-ouest/nord-ouest. Il est constitué d'une première unité au sud-ouest bâtie autour d'une petite cour, la position centrale dans l'édifice étant occupée par un autre ensemble de pièces organisées autour d'un cour plus vaste (37 × 31 mètres) donnant sur son côté nord-est sur une porte conduisant à la cella transversale qui abritait la statue cultuelle du dieu. Sur le côté sud-est du temple se trouvait une cour de forme trapézoïdale protégée par une enceinte (environ 70 mètres et 170 mètres pour ses côtés les plus longs)[46]. Le temple est plusieurs fois reconstruit par la suite, sous les rois médio-assyriens, en particulier sous le règne de Salmanazar Ier après que l'édifice ait été ravagé par un incendie[45]. Quand on assimile Assur au dieu Enlil, on lui donne les noms cérémoniels du grand temple d'Enlil à Nippur, à savoir « Maison de la totalité » (sumérien é-šarra) et « Maison-montagne » (é-kur). La cella du temple porte quant à elle le nom de « Maison-montagne des pays » (é-hursag-kurkurra). La dernière grande rénovation du temple a lieu sous le règne de Sennachérib, qui y ajoute une nouvelle unité au nord-est avec sa propre cella.
En plus d'être un lieu de culte majeur, le temple d'Assur occupait également une place importante dans la vie politique de l'Assyrie, le souverain n'étant jamais que l'administrateur terrestre du territoire et des gens qui dépendaient en dernier lieu du dieu Assur[47]. Le temple du dieu était donc perçu comme la demeure du véritable maître de l'Assyrie et de son empire. C'est pour cette raison que les souverains s'y faisaient couronner. Un hymne daté du règne d'Assurbanipal qui semble d'ailleurs renvoyer à ce rituel (ou bien à un autre liant royauté et divinité, comme celui du Nouvel An) proclame d'ailleurs « Assur est roi ! », démonstration claire de la conception de la royauté en Assyrie[48]. Les vassaux des Assyriens étaient également contraints à manifester leur soumission au dieu Assur : ils devaient verser tribut pour son temple, et y étaient parfois amenés en personne pour prêter un serment (mamītu) de loyauté envers le dieu et son pays[49].
Le temple d'Assur comprenait également une « bibliothèque », datée de l'ère néo-assyrienne[50], comprenait une grande variété de textes : rituels (notamment divinatoires), listes lexicales, textes juridiques (dont les Lois assyriennes et les Édits de Harem), des textes littéraires. Les scribes chargés de recopier et classer les textes (des prêtres du temple) avaient mis au point des tablettes d'inventaire listant les textes en fonction de leur catégorie (par exemple les hymnes). D'autres documents de nature administrative relatifs à la gestion du temple et de son culte ont été mis au jour dans le temple.
Une autre fonction importante du temple d'Assur, surtout aux époques anciennes, est juridique : des procédures juridiques se tiennent dans le complexe d'Assur ou à sa proximité (ce qui expliquerait par ailleurs les trouvailles de textes juridiques dans le sanctuaire[51]). C'est en particulier le cas de la porte appelée mušlālu(m), dont la localisation précise est incertaine, mentionnée par plusieurs inscriptions depuis l'époque paléo-assyrienne jusqu'à la néo-assyrienne, évoquant ses nombreuses restaurations et indiquant qu'il s'agit d'un lieu important ; un texte du roi Erishum y fait résider un groupe de sept divinités garantes de la justice[52].
À l'ouest du temple d'Assur, une grande ziggurat de base carrée d'environ 60 mètres de côté avait été érigée, sans doute sous le règne de Shamshi-Adad Ier[53]. Elle présente la particularité parmi les ziggurats assyriennes d'être une construction isolée et de ne pas être accolée au temple. Fortement érodée après la chute de la ville en 614 puis transformée en forteresse à l'époque parthe, elle est mal connue. On ignore ainsi comme se faisait l'accès au sommet de l'édifice en l'absence d'escaliers extérieurs apparents.
Lors de sa rénovation des bâtiments destinés à Assur et à la modification de son culte, Sennacherib ajoute un édifice destiné à être intégré dans les rituels du dieu, le Bīt Akītu, situé à l'extérieur des murailles de la ville intérieure, au nord-ouest ; il reprend ainsi le modèle déjà présent à Babylone, d'un édifice servant de point d'arrivée de la procession de statues divines lors du rituel du Nouvel An (akītu). C'était un édifice bordé de jardins (on y a retrouvé des traces d'irrigation), organisé autour d'une cour intérieure donnant sur un portique qui conduisait à une vaste salle transversale d'une trentaine de mètres de long, sans doute la cella de l'édifice destinée à l'assemblée des statues divines[54].
Les autres temples
Les autres temples sont situés dans le quartier sacré, au nord de la ville intérieure, surplombant le Tigre. La particularité de deux de ces édifices est d'être conçus au moment de leur construction comme des temples doubles dédiés à deux divinités conjointement.
Le plus ancien est le temple double dédié à Sîn et à Shamash, respectivement le dieu de la lune et du soleil. Il fut reconstruit vers le milieu du IIe millénaire sous Assur-nerari Ier, à la place d'un édifice antérieur dont l'organisation est inconnue. Il s'agit alors d'un temple organisé de façon symétrique, autour d'une grande cour intérieure, les deux sanctuaires étant situés chacun du côté opposé de celle-ci et constitués d'un ante-cella barlongue ouvrant sur une cella oblongue, bordées de pièces annexes. L'édifice est reconstruit vers le XIIIe siècle av. J.-C. (par Tukulti-Ninurta Ier ?) apparemment sans grand changement (ce niveau est mal connu). Il est reconstruit au début de l'époque néo-assyrienne, peut-être sous Assurnasirpal II, avec une orientation et un plan différents, et une taille supérieure. Suivant les reconstitutions des archéologues, problématiques en raison du très mauvais état de conservation du bâtiment, l'entrée est déplacée sur un côté, ouvre sur une grande cour protégée par une enceinte conduit désormais aux deux sanctuaires disposés désormais côte-à-côte. Une dernière reconstruction de l'édifice, attribuable à Sargon II ou Sennacherib, a été identifiée mais elle est encore moins bien connue que la précédente.
Plus imposant est le temple double dédié à Anu, dieu céleste, et à Adad, dieu de l'Orage, situé le long du rempart nord entre le Vieux Palais et le Nouveau Palais, reconstruit complètement par Teglath-Phalasar Ier. Le roi commémore cela par des inscriptions portées sur des dalles de l'édifice et dans celle figurant sur un prisme en argile mis au jour dans l'édifice (qui concerne plus largement ses conquêtes militaires et constructions), dans laquelle il dit que l'édifice antérieur remonte au règne de Shamshi-Adad III (XVIe siècle av. J.-C.)[55]. Cet édifice d'environ 100 × 84 mètres est organisé autour d'une grande cour murée dont l'entrée principale se trouvait sur le côté sud-ouest, ouvrant sur les bâtiments cultuels disposés sur le côté nord-est de façon symétrique, ceux de droite semblant dédiés à Anu, et ceux de gauche à Adad. Au centre, deux sanctuaires jumeaux constitués de deux antichambres menant à une pièce allongée prolongée par une niche, servant de cella. La spécificité de l'édifice est surtout de disposer de deux ziggurats jumelles de base grossièrement carrée d'environ 36,50 × 35 mètres de côté, disposées aux extrémités de l'édifice, dont l'accès au sommet se faisait sans doute depuis le toit des temples, suivant un principe qui se retrouve ailleurs en Haute Mésopotamie (par exemple Tell Rimah). Le temple fut restauré à plusieurs reprises, notamment sous Salmanazar III qui procéda à de plus amples modifications, réduisant la taille du complexe tout en conservant son organisation générale[56].
Le vieux temple dédié à Ishtar fut quant à lui reconstruit à plusieurs reprises, notamment à l'époque d'Ur III par le gouverneur Zarriqum, à l'époque paléo-assyrienne par le roi Ilushuma, puis à l'époque médio-assyrienne par Adad-nerari Ier. Tukulti-Ninurta Ier entreprit une plus importante restauration de l'édifice, qu'il dédie à la déesse Ishtar d'Assur (Aššurītu) et à une déesse secondaire appelée Dinitu. Le sanctuaire se présente alors avec une ante-cella barlongue ouvrant sur une celle elle-même barlongue avec un podium sur son petit côté droit, entouré par d'autres salles parallèles. Le souverain a fait par ailleurs réaliser un autel le représentant en bas-relief retrouvé dans l'édifice. L'édifice est à nouveau reconstruit sur un plan nouveau sous Assur-reshi-ishi à la fin du XIIe siècle av. J.-C., mais cette construction est mal connue, puis par Salmanazar III au IXe siècle av. J.-C. qui revient à l'ancien emplacement et le consacre à la déesse Bēlet nipha. Enfin le temple est à nouveau reconstruit à la fin de l'époque néo-assyrienne par Sin-shar-ishkun, sous la forme d'un sanctuaire double dédié à Ishtar et à Nabû, le dieu de la sagesse. L'édifice de plan quadrangulaire, est divisé entre les deux sanctuaires. La partie nord est celui d'Ishtar, qui dispose de l'entrée principale sur le côté nord-est, ouvrant sur une grande cour qui conduit au lieu saint constitué comme précédemment par une ante-cella et une cella barlongues. La grande cour mène vers le sud à un portail conduisant à une seconde grande cour, de forme rectangulaire, ouvrant sur deux lieux saint jumeaux, consacrés à Nabû et à sa parèdre Tashmetu, constitués chacun d'une ante-cella barlongue et d'une cella oblongue terminée par un podium se situant au fond de la pièce dans l'axe de son entrée. Des pièces annexes et deux longs couloirs bordent les cellae, suivant une disposition qui se retrouve dans d'autres temples assyriens (notamment à Dur-Sharrukin).
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Tablette en albâtre portant une inscription d'Adad-nerari Ier commémorant la restauration du temple d'Ishtar[1]. Pergamon Museum.
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Autel représentant le roi Tukulti-Ninurta Ier, voué au dieu Nusku[2]. Pergamon Museum.
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Plan du temple double des dieux Anu et Adad.
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Prisme en argile portant une inscription de Teglath-Phalasar Ier, retrouvée dans le temple d'Anu et d'Adad, relative à ses conquêtes militaires et constructions[3]. Pergamon Museum.
- Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 119-120 ; Grayson 1987, p. 149-151
- Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 112-113
- Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 122-124
Les résidences privées et leurs archives
Les fouilles de W. Andrae n'avaient pas exploré uniquement les bâtiments officiels, mais aussi des résidences privées. Cela avait été fait en ouvrant plusieurs tranchées larges d'environ 5 mètres dans les parties centrale et méridionale de la ville intérieure, et couvrant à peu près la largeur de celle-ci. Cette méthode n'a permis d'explorer qu'un nombre limité de résidences de façon complète. L'espace résidentiel le mieux connu est celui qui a pris la place du Nouveau palais et s'étendait en direction du temple d'Ishtar dans la partie nord de la ville à l'époque néo-assyrienne, qui a livré l'espace résidentiel le plus complet de l'Assyrie antique[57]. En tout, ce sont environ 80 résidences qui ont été mises au jour. Elles sont disposées dans des quartiers très densément occupés, desservis par des rues étroites au tracé irrégulier.
On peut en gros distinguer deux types de résidences, suivant leur taille et leur organisation interne[58] :
- des maisons de taille plus petite, généralement constituées d'une suite de quatre à six pièces alignées, aux fonctions sans doute diverses (en tout cas difficilement déterminables par l'archéologie), dépassant rarement la cinquantaine de mètres carrés habitables au sol ;
- des maisons à cour ou espace central, plus vastes (dans les 120 m2 habitables en moyenne), comprenant en moyenne une dizaine de pièces (parfois jusqu'à trente) agencées autour d'un espace central, couvert ou non (c'est souvent difficile à déterminer), et dont les pièces ont en général une fonction précise (pièces d'eau, magasins, cuisines, pièces de réception), et sans doute avec un étage où se trouvaient les pièces à coucher.
Les contrats de vente de la période néo-assyrienne retrouvés dans des résidences d'Assur (ainsi que d'autres à Ninive) permettent de préciser les connaissances sur les fonctions des pièces ou des ensembles de pièces des grandes résidences[59]. S'y retrouvent les grands traits des habitations fouillées : ce sont des maisons fermées sur l'extérieur, l'accès au réseau de rues de la ville étant se faisant par une sorte d'impasse appelée la « sortie » (mūṣû). Les textes évoquent également la cour intérieure (tarbaṣu) organisant la circulation dans l'édifice, ainsi que du « lieu où l'on se couche » (bēt mayāli, peut-être un ensemble de pièces), mentionnent la présence d'un étage, la « maison haute » (sumérien é-anita ou é-nim), ainsi que celle d'autres parties servant de magasins, d'ateliers, de salles d'eau, d'étables, etc. et des termes au sens plus difficile à déterminer semblant concerner les pièces d’apparat.
Plusieurs de ces résidences ont livré des archives de nature privée offrant des renseignements sur leurs occupants et leurs activités, économiques avant tout. Ces archives étaient placées dans une pièce de la résidence (souvent celle au-dessous de laquelle se trouvaient les sépultures familiales, voir plus bas), dans quelque cas dans une jarre en terre cuite. O. Pedersen a identifié une trentaine des ces fonds d'archives privées, d'époque médio-assyrienne (6 lots) et néo-assyrienne (27 lots)[60]. Certains documentent les activités privées et officielles de familles de dignitaires de l'époque médio-assyrienne, comme celles de la famille de Kidin-Adad (143 tablettes)[61] et de la famille du gouverneur Urad-Sherua (85 tablettes)[62]. L'époque néo-assyrienne a également livré des archives privées documentant les prêts conclus par des familles aisées, dont une d'origine égyptienne et un autre lot concerne une famille d'orfèvres travaillant pour le compte du temple du dieu Assur[63], un autre également une famille de tanneurs. Le lot le plus remarquable de cette période est sans doute celui de l'exorciste Kisir-Assur et de sa famille (dont son neveu Kisir-Nabû), une véritable bibliothèque privée comprenant près de 1 200 tablettes et fragments de tablettes, essentiellement de nature rituelle (recueils d'incantations et de prescriptions médicales, servant pour les exorcismes), mais aussi des textes de prières, des listes lexicales, des textes historiques, etc.[64]
Les tombes privées
Les fouilles des espaces résidentiels d'Assur ont également livré plusieurs tombes privées, les familles enterrant couramment leurs mort dans des chambres funéraires souterraines situées sous leurs résidences, dans le cadre de pratiques funéraires impliquant un culte ancestral liant les vivants et les morts d'un même lignage. Parmi ces sépultures, deux ont en particulier livré un riche matériel archéologique, documentant sur la richesse que pouvaient accumuler certains notables d'Assur au IIe millénaire av. J.‑C.
La première est la tombe no 20, d'époque paléo-assyrienne et située à l'est du temple d'Anu et d'Adad. Elle se singularise par le fait qu'il s'agit d'une simple fosse rectangulaire d'environ 1,9 × 1,3 mètres. Les ossements étaient dans un état de dégradation avancé au moment de l'exhumation de la sépulture, mais le matériel funéraire était remarquablement riche. Il comprenait de la vaisselle en céramique et en cuivre et bronze, des armes (dague, pointe de lance), et surtout des parures : quatre diadèmes en or, des boucles d'oreille en or, des anneaux en or et divers autres ornements en or et en pierre semi-précieuses, notamment des colliers, de petites figurines animales en plomb et bronze, des sceaux-cylindres, etc. Certains objets semblent témoigner de contacts avec le monde anatolien, ce qui correspondrait bien avec le fait que la tombe date de l'époque d'essor des réseaux commerciaux des marchands d'Assur vers cette région[65].
La seconde tombe remarquable est la no 45, d'époque médio-assyrienne et localisée au sud-ouest du temple d'Ishtar. Il s'agit d'une chambre souterraine voûtée dans laquelle on accédait par un puits vertical recouvert de dalles de calcaire. Elle semble avoir dépendu de la maisonnée d'un riche notable dont des tablettes ont été mises au jour à proximité, un certain Babu-aha-idinna. Elle a servi durant une longue période, puisque les restes d'une dizaine d'individus y ont été identifiés. Les matériel funéraire qui y a été retrouvé consiste en de la vaisselle en céramique, en albâtre (22 vases, certains sculptés), en ivoire (peigne, épingle, pyxide gravé de motifs floraux et animaux) et des bijoux en or et pierres semi-précieuses (une partie ayant été perdue depuis l'excavation de la tombe)[66].
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Collier en or et pierres semi-précieuses (cornaline, lapis-lazuli, agate, cristal de roche) provenant de la tombe no 20.
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Collier en or et pierres semi-précieuses (cornaline, lapis-lazuli, agate) provenant de la tombe no 20.
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Boucles d'oreille en or de la tombe no 20.
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Collier en or et lapis-lazuli provenant de la tombe no 45, XIVe ‑ XIIIe siècle av. J.-C.
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Vase en albâtre à deux anses et décor floral provenant de la tombe no 45, XIVe ‑ XIIIe siècle av. J.-C.
L'époque parthe
Un nouvel essor
Assur connaît un renouveau à partir du Ier siècle ap. J.-C., après une longue période durant laquelle elle fut peu ou pas occupée (il n'y a que des traces d'occupation éparse pour la période séleucide). Jusqu'au IIIe siècle, Assur redevient une cité importante, couvrant environ 55 hectares. Les fouilles ont permis la mise au jour de plusieurs édifices notables : la partie nord-est du tell reste consacrée au sanctuaire du dieu Assur, tandis que le secteur palatial occupe le centre de la ville, entouré d'habitations ; des nécropoles ont été mises au jour au sud-ouest de la ville, en dehors de l'espace habité.
Assur est alors probablement le siège d'une dynastie locale, comme l'indique le fait que certaines inscriptions mentionnent un personnage portant le titre de marja, « Seigneur », qui dans la cité voisine et contemporaine de Hatra désigne le potentat local. Du fait du peu d'inscriptions retrouvées sur le site, on ne sait pas grand chose sur la situation de la ville à cette période : on ne sait pas quel nom elle avait, il est impossible d'en reconstituer l'histoire politique, les grandes évolutions de celle-ci étant surtout connue par des sources extérieures relatives aux conflits entre Romains et Parthes, puis Sassanides, qui se disputent la Haute Mésopotamie à cette période, et concernant surtout Hatra, qui est alors la principale cité de la région. L'architecture, l'art et la religion d'Assur présentent un profil similaire à ceux de Hatra, reprenant l'héritage de la Mésopotamie antique, tout en témoignant des évolutions propres à l'époque parthe : en particulier la présence d'iwans, pièces de réception ouvertes par une grande porte en forme d'arc, caractéristiques de la Mésopotamie et de l'Iran de cette période, et l'ouverture aux influences hellénistico-romaines (édifices à colonnades).
La destruction des deux cités semble d'ailleurs survenir au même moment, lorsque les Perses sassanides emmenés par leur roi Shapur Ier envahissent le nord de la Mésopotamie dans les années 230-240 après avoir vaincu les Parthes puis chassé les Romains.
Les sanctuaires
Le secteur des sanctuaires de l'époque parthe est inclus dans une enceinte intérieure délimitant l'espace sacré (temenos), sur 250 mètres de long pour 100 à 200 mètres de large selon les endroits. L'ancienne ziggurat, qui borde ce temenos à l'ouest, est peut-être alors reconvertie en forteresse. Les différents édifices de ce secteur de la ville parthe étaient dans un très mauvais état de conservation lors des fouilles du début du XXe siècle, ne permettant pas de restituer leur état antique de façon satisfaisante.
À l'emplacement de l'ancien temple d'Assur, un nouveau sanctuaire est érigé dans le courant du IIe siècle, et les graffitis qui y ont été retrouvés indiquent qu'il est toujours consacré à la divinité locale, désormais appelée Asor, et à sa parèdre Sherua. Le temple est inclus dans sa propre enceinte intérieure, qui disposait sans doute à l'origine d'arcades. La façade du sanctuaire, disposé sur le côté nord de la cour, comprend trois iwans rapprochés ouvrant sur l'esplanade principale, suivant un dispositif similaire à celui du grand temple de Hatra, son contemporain, caractéristique de l'architecture d'inspiration parthe. Les inscriptions du sanctuaires sont datées des fêtes principales de l'ancien calendrier cultuel assyrien, qui a donc été préservé depuis la chute de cet empire[67].
Plus au sud dans l'enceinte sacrée se trouve le temple A, peut-être dédié à Héraclès (assimilé en Mésopotamie du Nord à l'ancien dieu de Enfers, Nergal), dont le plan suit le modèle traditionnel mésopotamien, constitué d'un vestibule et d'une cella disposés en largeur (barlongs). Un autre sanctuaire situé à l'est du temenos, le temple périptère, doit son nom à son organisation architecturale d'inspiration gréco-romaine : entouré par des colonnades sur trois côtés, avec une façade à grande ouverture.
Le palais
Le palais parthe d'Assur, sans doute érigé durant le Ier siècle, est probablement la résidence des « Seigneurs » d'Assur[68]. Il est organisé autour d'une vaste cour dont chacun des quatre côtés comprend un iwan, celui du côté sud étant le plus élevé. Les façades des cette cour ont pu être reconstituées grâce à l'étude des fragments de briques cuites recouvertes de stucs qui constituaient son décor. Chacun des arcs principaux ouvrant sur un iwan était encadré de trois ordres de petites colonnes et d'entablements, ainsi que des petites entrées voûtés au niveau du sol, auxquelles correspondent aux étages supérieurs des niches aveugles. Chacun des quatre iwans ouvre sur des groupes de pièces formant des unités indépendantes du reste de l'édifice, ce qui confère à la cour principale un rôle essentiel dans la circulation dans l'édifice. La partie nord de l'édifice, qui comprend un vaste salle centrale à quatre piliers séparant trois espaces voûtés, semble constituer le cœur de l'édifice palatial. Sur le côté est de l'édifice, une salle péristyle, donc d'inspiration hellénistique, pourrait avoir servi d'entrée monumentale.
Les résidences
Les résidences d'Assur à l'époque parthe se singularisent par rapport à celle des époques antérieures par la présence d'iwans donnant sur leur cour intérieure, généralement ouvert sur le nord, sans doute pour offrir de l'ombre et de la fraîcheur durant la saison chaude. Certaines maisons comportent également un second iwan du côté sud de la cour. Un quartier artisanal comprenant des fours à céramique a également été identifié lors des fouilles[69].
Notes et références
- ↑ « Assour (Qal'at Cherqat) », sur Unesco (consulté le 23 mai 2015)
- 1 2 3 4 5 Lamprichs 1997, p. 225
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 17
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 17-18
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 18-19
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 20
- ↑ (de) « Ausgrabungen », sur Assur.de (consulté le 10 juin 2015)
- 1 2 3 Lamprichs 1997, p. 226
- ↑ Grayson 1987, p. 7
- ↑ Grayson 1987, p. 8
- ↑ Grayson 1987, p. 9
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 22
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 25-26
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 27-36
- ↑ C. Michel, Correspondance des marchands de Kaniš, au début du IIe millénaire avant J.-C., Paris, 2001
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 22-23. (en) K. R. Veenhof et J. Eidem, Mesopotamia, The Old Assyrian Period, Fribourg, 2008
- ↑ Grayson 1987, p. 19-40
- ↑ Grayson 1987, p. 47-76
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 23 ; C. Michel, « paléo-assyriens (rois) », dans F. Joannès (dir.), Dictionnaire de la civilisation mésopotamienne, Paris, 2001, p. 618-621
- ↑ Code de Hammurabi, IV, 53-63. Traduit dans A. Finet, Le Code de Hammurabi, Paris, 2002, p. 45
- ↑ Grayson 1987, p. 77-78
- ↑ Grayson 1987, p. 83-89
- ↑ Grayson 1987, p. 90-94
- ↑ Voir les réflexions de J. Freu, Histoire du Mitanni, Paris, 2003, p. 57-79
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 23-24
- 1 2 3 4 5 6 Lamprichs 1997, p. 227
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- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 109
- ↑ La muraille aurait été construite par Puzur-Assur III selon une inscription d'Adad-nerari Ier, cf. Grayson 1987, p. 144.
- ↑ J.-C. Margueron, Recherches sur les palais mésopotamiens de l'âge du bronze, Paris, 1982, p. 390-396 et fig. 267-271
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- ↑ Par exemple Grayson 1987, p. 272
- ↑ Pedersén 1985, p. 31-32, archive N 1. L'existence d'une bibliothèque officielle d'époque médio-assyrienne proposée par (de) E. Weidner, « Die Bibliothek Tiglatpilesers 1. », dans Archiv für Orientforschung 16, 1952/3, p. 197-215 est sujette à caution, même s'il reste envisageable que les plus anciennes tablettes retrouvées dans l'aile sud du temple, qui sont effectivement d'époque médio-assyrienne, aient fait partie à l'origine d'un même fonds de cette période (la supposée archive M 2) repris par la suite dans le fonds d'époque néo-assyrienne.
- ↑ Harper, Klengel-Brandt et Aruz (dir.) 1995, p. 120
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Bibliographie
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- Stefan R. Hauser, « Hatra et Assur : Centres religieux et commerciaux », Dossiers d'Archéologie, no 334 « Hatra : Site irakien en danger », , p. 72-77
- (en) Olof Pedersén, Archives and libraries in the city of Assur : A Survey of the Material from the German Excavations, Uppsala, Almqvist & Wiksell, 1985-1986 (2 t.)
- (en) A. Kirk Grayson, The Royal inscriptions of Mesopotamia. Assyrian periods Vol. 1 : Assyrian Rulers of the Third and Second Millennium B.C. (To 1115 B.C.), Toronto, Buffalo et Londres, University of Toronto Press,
Liens externes
- (de) Assur sur le site de l'Université d'Heidelberg
- (de)(en) Site présentant les fouilles récentes à Assur.
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