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Emmanuel Levinas

Emmanuel Levinas

Page d'aide sur l'homonymie Pour les articles homonymes, voir Levinas.
Emmanuel Levinas

Naissance

Kaunas, Empire russe
Décès
(à 89 ans)
Paris, France
Nationalité
École/tradition
Principaux intérêts
Idées remarquables
Autre/Autrui, Visage, Événement, Éros, Au-delà de l'être, Illéité
Œuvres principales
Totalité et Infini
Difficile liberté
Autrement qu'être ou au-delà de l'essence
Influencé par
Platon, Kant, Hegel,Jean Wahl, Kierkegaard, Bergson, Husserl, Buber, Rosenzweig, Heidegger, Bataille, Blanchot, Talmud, Monsieur Chouchani
A influencé
Jacques Derrida, Jean-Luc Marion, Benny Lévy, Bernard-Henri Lévy, Marc-Alain Ouaknin, Alain Finkielkraut, Gérard Bensussan, Philippe Nemo

Emmanuel Levinas, né le à Kaunas et mort le à Paris, est un philosophe français d'origine lituanienne naturalisé français en 1930. Il a reçu dès son enfance une éducation juive traditionnelle, principalement axée sur la Torah. Plus tard, il a été introduit au Talmud par l'énigmatique « Monsieur Chouchani ». La Torah enseignée par Levinas est dérivée des leçons de Monsieur Chouchani.

La philosophie de Levinas est centrée sur la question éthique et métaphysique d'autrui, caractérisé comme l'Infini impossible à totaliser, puis comme l'au-delà de l'être, à l'instar du Bien platonicien, ou de l'idée cartésienne d'infini que la pensée ne peut contenir[1]. Levinas étend ses recherches à la philosophie de l'histoire et à la phénoménologie de l'amour. Il est également l'un des premiers à introduire en France la pensée de Husserl et celle de Heidegger.

Biographie

De la Lituanie à la France

Emmanuel Levinas est né à Kaunas en Lituanie le .

Fils de Jehiel Levyne (Levinas) et de Déborah Gurvic, Emmanuel est l'aîné d'une fratrie de trois garçons ; ses petits frères s'appellent Boris (né en 1909) et Aminadab (né en 1913).

Son père est libraire et la famille parle russe. Un professeur particulier enseigne l'hébreu aux trois enfants, à partir de la lecture de la Bible hébraïque.

La guerre de 1914 pousse la famille à fuir en Russie à Kharkov (Ukraine) jusqu'en 1920. Il vit donc la révolution russe de 1917, à onze ans, en Ukraine. C'est à Kharkov qu'Emmanuel Levinas entre au lycée, malgré le numerus clausus permettant à seulement cinq enfants juifs d'y être admis. Il y lit les grands écrivains russes, notamment Pouchkine, Lermontov, Tolstoï et Dostoïevski, mais aussi Shakespeare.

En 1923, Levinas se rend en France à Strasbourg pour suivre des études de philosophie (1923-1927). Il sera l'élève de Charles Blondel, Maurice Halbwachs, Maurice Pradines, Carteron[Qui ?] et plus tard Martial Guéroult. Il rencontre Maurice Blanchot avec lequel il entretiendra une profonde amitié.

De 1928 à 1929, à Fribourg-en-Brisgau (Allemagne), il est l'élève d'Edmund Husserl (deux semestres), puis de Martin Heidegger (un semestre), et fait l'apprentissage de la phénoménologie, à laquelle il avait été initié par Jean Hering. En 1929, il participe comme auditeur au deuxième cours universitaire de Davos, avec de nombreux autres intellectuels français et allemands (il y assistera à la dispute de Davos entre Martin Heidegger et Ernst Cassirer). Après avoir soutenu sa thèse de doctorat Théorie de l'intuition dans la phénoménologie de Husserl (1930), il s'établit à Paris. Il suivra les cours de Léon Brunschvicg, ainsi que parfois ceux de Kojève sur Hegel. Le samedi soir, il assiste aux rencontres philosophiques organisées par Gabriel Marcel.

En 1931, il obtient la nationalité française. Marié à Raïssa (Marguerite) Lévi (1905-1994) en 1932, il œuvre à l'Alliance israélite universelle (A.I.U.) de 1933 à 1939. Les Levinas auront trois enfants : Eliane, décédée en bas âge, Simone Hansel (née Levinas), pédiatre, et le pianiste et compositeur Michaël Levinas.

Levinas est mobilisé en 1939. Il est fait prisonnier à Rennes, puis transporté en Allemagne, près de Hanovre. Il est captif dans un Arbeitskommando (commando de travail)) ou un Oflag (camp d'officiers) pendant cinq ans, où étaient rassemblés les prisonniers de guerre juifs, ainsi que certains prêtres catholiques. Il y a rédigé l'essentiel de son livre De l'existence à l'existant[2]. Presque toute sa famille restée en Lituanie a été massacrée par les nazis.

En 1945-1946, il est Secrétaire de l'Alliance Israélite Universelle[3].

Après la guerre, en 1947, il publie De l'existence à l'existant, et participe régulièrement à des conférences au Collège Philosophique de Jean Wahl. À cette époque, il commence à étudier le Talmud sous la direction de M. Chouchani.

À partir de 1957, il donne des commentaires talmudiques, aux Colloques des Intellectuels Juifs de France, réunis dans les Lectures talmudiques et Nouvelles Lectures talmudiques. Malgré sa prédilection pour ce domaine, il ne se prétendra jamais « talmudiste », c'est-à-dire maître ès Talmud, mais « amateur, avec toute la connotation amoureuse du terme ».

Pendant 35 ans, il dirige l'École normale israélite orientale (ENIO). C'est aussi son lieu de résidence.

En 1961, il publie sa thèse Totalité et Infini, et de 1964 à 1975, Lévinas entreprend une carrière universitaire. Celle-ci le conduira de l'Université de Poitiers, par Paris-Nanterre (1967), à la Sorbonne (1973) où il enseignera jusqu'en 1976, année de sa retraite.

Dans les années 1970 et 1980, à l'invitation de la communauté juive de Fribourg (Suisse), Lévinas assure quelques cours à l'université de Fribourg (pensée juive, Husserl, exégèse de la Torah). En 1989, il reçoit le Prix Balzan pour la philosophie.

Emmanuel Levinas décède à Paris le pendant la fête de Hanoucca. Il est enterré au cimetière parisien de Pantin-Bobigny.

Expérience de la guerre

Dès 1934, il publie Quelques réflexions sur la philosophie de l'hitlérisme [4] dans la revue Esprit , texte d'une surprenante lucidité pour l'époque. Emmanuel Levinas évoque rarement ses cinq années de captivité dans un Stalag en Allemagne. Pourtant, il a été blessé jusque dans sa chair par l'antisémitisme, à la suite de la disparition de sa famille dans les camps. L'expérience de l'humiliation et la souffrance inutile le conduisent à professer son judaïsme comme un humanisme. Pour lui, l'antisémitisme désigne la haine de l'autre homme. Son expérience repose sur un vécu chargé d'affects très divers, sur des faits traumatiques non nommés.

En partant de son expérience de la guerre et des camps de travail, Levinas « démonte » la philosophie de l'être et propose une philosophie de l'autre. Entre l'hitlérisme pressenti et l'impérieuse responsabilité d'enseigner aux générations futures le devoir de mémoire, Levinas s'efforce de porter sur l'histoire un regard sans haine ni ressentiment. Il n'a pas été à Auschwitz, toutefois il y a perdu toute sa famille. Pour lui, survivre ressemble à un privilège. Dans cet ajournement de la mort, le survivant Levinas fait l'étrange expérience d'une liberté qui se découvre responsable pour l'autre humain à l'infini.

Dieu et la Shoah

Après Auschwitz, l'idée de Dieu s'est imposée comme une manière différente – voire une « seconde religion » – de présenter Dieu et le sens de la souffrance humaine. En réponse à l'affirmation totalitaire de la haine et à l'enracinement de celle-ci jusqu'au plus profond de l'être, Levinas, au sortir de la guerre, travaille à déployer une éthique qui envisage la souffrance dans une perspective interhumaine, c'est-à-dire dans une non-indifférence des uns envers les autres.

Chez Emmanuel Levinas, la notion de transcendance surgit d'une humanité souffrante. Elle évoque d'entrée de jeu l'athéisme, c'est-à-dire la condition d'un être séparé. Il ne s'agit ni de venir au secours du divin ni de le nier. Se rapporter à l'absolu en athée, c'est s'offrir au dialogue avec l'Autre et non pas le réduire à l'objet d'un discours. Ce faisant, Levinas ne cherche pas à présenter des preuves de l'existence de Dieu. Il indique comment se produit l'emphase de l'infini dans le fini. Ce n'est pas Dieu qui est recherché dans le prochain, c'est l'Autre qui interpelle et interroge la conscience à la fois à partir d'une dimension de hauteur et d'abaissement, dans la proximité — mais proximité qui est à la fois distance infinie de ce avec quoi je ne pourrai jamais former une totalité — du prochain et qui lui signifie sa dévotion à autrui.

Philosophie

La découverte de la phénoménologie allemande

La pensée de Levinas se rencontre au carrefour de la phénoménologie et de la philosophie existentielle. Elle questionne les fondements de l'ontologie pour présenter l'humanisme comme « lieu éthique » de la transcendance. Regard vers le passé (mémoire) et vers le futur, cette pensée arrache le sujet au sol sur lequel ce dernier pense reposer (transcendance) pour le « planter » de manière nouvelle dans une humanité qui ne cesse de se dédire tout au long de sa propre histoire (immanence).

Levinas a été profondément influencé par Edmund Husserl et Martin Heidegger, qu'il a rencontrés à l'université de Fribourg-en-Brisgau et dont il a introduit l'œuvre en France, notamment les Méditations cartésiennes de Husserl, dont il a assuré la traduction[5]. Son travail philosophique a également été marqué par la tradition juive, et par la condition juive elle-même, Levinas ayant été interné dans un camp de prisonniers de guerre juifs durant la Seconde Guerre mondiale.

Levinas reprend aussi la tradition platonicienne et néoplatonicienne, en quête de l'ineffable. Cela est particulièrement visible dans le livre Autrement qu'être ou au-delà de l'essence, dont le titre évoque déjà le Bien platonicien, décrit comme « au-delà de l'essence » dans La République. Dans Éthique et Infini, Levinas évoque le Phèdre de Platon comme l'un des « cinq plus beaux livres de l'histoire de la philosophie »[6], aux côtés de la Critique de la raison pure (Kant), de la Phénoménologie de l'esprit (Hegel), de l'Essai sur les données immédiates de la conscience (Bergson), et enfin du livre de Heidegger intitulé Être et Temps.

Introduction à la lecture de deux œuvres majeures

Totalité et infini date de la fin de la période phénoménologique de Levinas. Néanmoins, l’« épiphanie du visage » excède d'emblée toute perspective phénoménologique dans la mesure où il s'agit d'emblée d'une rencontre éthique [7].
[8] Autrement qu'être ou Au-delà de l’essence rompt avec le langage phénoménologique, à la suite des critiques de Derrida dans Violence et Métaphysique, et pose explicitement la question du tiers, condition de la société. (Alors que Totalité et Infini s'en tenait essentiellement à la rencontre par le sujet de l'autre homme.)

Présentation d’Emmanuel Levinas dans son époque

Levinas a marqué la philosophie de la fin du XXe siècle. Par ses œuvres, il est présent dans de nombreux débats contemporains, comme s’il les avait anticipés. Sa pensée a paru s’incarner dans une époque (les années 1990), à tel point que la référence à Levinas a fini par valoir par elle-même. Le registre, l’espace culturel dans lesquels la référence à Levinas s’est imposée est celui de l’éthique. Qu’est-ce que l’éthique, en particulier pour Levinas ?

Pendant les Trente Glorieuses, tout ce qui relève de la morale est lié à l’ordre bourgeois et rejeté comme tel. Les grands débats sont marqués par le marxisme, il y a une surdétermination politique de la philosophie[réf. nécessaire]. Levinas, alors en pleine activité, n’est pas à la mode, ce qui ne signifie pas que ce dernier ne soit pas attentif à la pensée de son époque. L’attention de la pensée marxiste à l’histoire et la subordination de l’individu au projet politique relèvent de ce que Levinas appelle « la totalité », (cf. « la mort du sujet » ; lequel est un montage du discours pour Lacan, Barthes, Foucault, Lévi-Strauss). Le retour de la subjectivité au cours de la récession des années 1970 rend possible l’attention à Levinas.

À ce moment-là, le besoin est grand de se réapproprier l’individualité agissante. C’est la période de l'humanitaire, de la morale altruiste, voire de l’inflation éthique (« we are the world »). La responsabilité lévinassienne semble être un cadre théorique approprié à cette époque. Cependant, n’y a-t-il pas là un contresens complet ? La responsabilité lévinassienne est une détermination originaire du sujet, mais qui pourtant lui vient d'autrui, précédant les déterminations psychologiques ou sociologiques. La pensée de Levinas court alors le risque d’être détournée en idéologie. Ce qui est à penser pour Levinas, c'est que, quoi qu'il advienne, "je suis responsable de la responsabilité de l'autre." Être soi, c'est toujours avoir une responsabilité de plus que tous les autres". Et il ne se lassait pas de citer la phrase de Dostoïevski, auteur qui l'avait tant marqué dans son adolescence : "Chacun est responsable de tout devant tous, et moi plus que tous les autres." [9].

L’éthique philosophique ne doit pas être confondue avec les « codes moraux » qui naissent ou s’amplifient dans les années 1980 : « éthiques » professionnelles (médicale, journalistique), déontologies parcellisées, contractualisme, (on a parlé d'une « valse des éthiquettes »)… Cette multiplication provoque un relativisme conceptuel sur l'éthique qui n’a rien à voir avec la pensée de Levinas : il n’a pas pour ambition de fournir une théorie éthique au sens d’un code moral ou d’une morale prescriptive au sens kantien (on peut parfois entendre l’éthique comme la morale objectivée, fondée en raison, ce que fait Kant).

L’ambition de Levinas

Jusqu’à Levinas, « la philosophie avait toujours considéré l’éthique comme une conséquence et un dérivé de la philosophie première : la question de l’être et la connaissance du monde. Seul Levinas érige l’éthique en philosophie première », selon Jean-Luc Marion[10].

« Dire l’humain de l’homme », proposer une éthique de l’éthique, une philosophie première du sujet en tant qu’il est d’emblée sujet éthique. Levinas pense le rapport à l'autre comme l’infini dont le « visage », dans sa nudité, est la trace. Le « visage » est une chose devenue concept : c’est ce qui vient oblitérer toute définition de l’Autre, toute finitisation. Ici, l’Autre n’est authentiquement autre que s’il n’est pas que ce qu’il est, s’il déborde sa définition dans l’être (cf. le genre de l’autre platonicien). Inversement, l’impossibilité de définir l’Autre le ramène à l’indéfini, au débordant, à l’infini au sens de Levinas. Ainsi le « visage » lévinassien ne se ramène pas au visage physique, même s’il part (phénoménologiquement) de là. Le visage, c'est la manière qu'a l'autre de m'aborder de face, à la fois suppliant et commandant impérieusement, porteur du premier (et du seul ?) ordre à moi adressé : « Tu ne tueras point. ». En ce sens, tout le corps et tout l'homme est visage.

Pour Levinas, rencontrer l'Autre est avoir l'idée de l'infini telle que la définit Descartes, c'est-à-dire (par définition) avoir la pensée de ce que l'on ne peut pas penser, avoir l'idée de ce dont on peut pas avoir idée, de désirer ce qui ne pourra jamais combler mon désir (car le rapport à l'Autre est désir et bonté). D'où cette étrange phrase de la première section de Totalité et Infini: « Le Désir métaphysique de l'absolument Autre est satisfait dans la mesure où il ne l'est pas. » "Le Désiré ne le comble pas, mais le creuse"[11].

« Dé-visager » quelqu’un, c’est détruire son visage en le décomposant, en le réduisant à un ensemble de qualités sensibles. Pour Levinas, le visage est nu, sans qualités, un « trou dans l'Être » (Sartre), ce qui fait penser à ce que Platon dit du Bien au-delà de l'Être, idée que Levinas reprend souvent à son compte. Lorsque je suis confronté au visage, il me met en question. Je suis destitué, traumatisé, violenté. « L’éthique, c’est ce qui provoque un dérangement dans le sujet ».
Dans un texte célèbre, Levinas compare les trois « nudités », celles du paysage et celle du corps ne faisant jamais que renvoyer à la nudité du visage, la nudité par excellence, celle du visage qui se tourne vers moi et qui est "la nudité même" pour reprendre la formule propre de Levinas[12].

Ainsi, le registre « bien-pensant » de la morale bourgeoise ou de l’égalitarisme, celui de la charité, de l’altruisme, de la récrimination moralisante, n’est pas celui de Levinas car ces postures de charité confortent le sujet dans son identité, dans sa contenance subjective. Ma charité me fait du bien, alors que la relation éthique lévinassienne me bouleverse. Ainsi, le lieu du contresens à propos de Levinas est la morale. Comme l'écrit Levinas, « Il importe au plus haut point de savoir si l'on n'est pas dupe de la morale » (Totalité et infini: Préface). Qu’en est-il de la question morale chez Levinas ?

Ne pas être « dupe de la morale » : l'effraction du visage

Levinas réfléchit dans une perspective post-nietzschéenne : le nom de morale ne véhicule-t-il pas le simple reflet d’une culture ? À partir de l’aporie Kant / Nietzsche, il est nécessaire d'œuvrer à une « définition de l’indéfinissable ».

« Dans le geste altruiste, quelque chose de ma liberté, de ma puissance, trouve à s’exercer ». L’idée rousseauiste de « pitié naturelle », venant de l’identification à autrui souffrant, suggère que « l’humain de l’homme » tiendrait dans le partage de la détresse. Au contraire, chez Levinas, on trouve un désespoir face à l’inhumanité de l’homme faisant face à l’humain, une rupture de la tradition humaniste. Levinas, en tant que rescapé de la Shoah où périt toute sa famille, a intégré la « banalité du mal » de Arendt, question qui renvoie à la « radicalité du mal » kantienne (avant toute action sensible, il y a un mal radical qui forme terreau). Ainsi, chez Levinas, il n’y a pas de rejet de l’inhumain hors de l’humain, pas d’« empire du mal ». Le mal est une charge à porter, indéfinissable, impossible à circonscrire, infinie.

Par conséquent, le propre de la responsabilité face à ce mal est aussi d’être infinie, au sens où l’on en a jamais fini avec elle. « Plus je suis juste, plus je suis injuste ». La sympathie n’est donc pas pour Levinas une affection naturelle, sur laquelle on peut fonder une morale du sentiment, elle est au contraire « contre nature ». La morale n'est jamais chez Levinas morale de la sympathie comme chez Schopenhauer ou chez Max Scheler : au contraire, la morale s'enracine chez lui dans une incommensurabilité absolue entre moi et l'autre homme. Agir moralement, ce n'est pas se mettre à la place de l'autre ou agir comme on aurait voulu qu'il fasse à notre égard.

L’éthique pour Levinas est ce qui est en moi, mais ne vient pas de moi. De moi-même, je persévère dans mon être, dans mon « inter-essement » ou conatus essendi (Spinoza). Quelque chose d’étranger vient rompre cette spontanéité, me « des-inter-esser », me couper entre moi et moi. C’est la figure de la « défection de l’être », du visage de l’autre. C’est le « visage » de l’autre qui fait effraction dans mon être et rompt ma tranquillité, interroge mon droit à persévérer dans mon être et à user du monde comme s'il était mien. La source de la morale, 'est le "qu'allais-tu faire ?" que je déchiffre sur le visage d'autrui.

Le visage levinassien a pu être extrait de son cadre proprement philosophique et réintégré au sein d'une sociologie de l'action ordinaire[13], afin d'appréhender une des modalités de nos expériences quotidiennes, ce que le sociologue Philippe Corcuff et la philosophe Natalie Depraz ont appelé « l'interpellation éthique dans le face-à-face » en vue d'enquêtes empiriques à l'hôpital, à l'ANPE et dans les caisses d'allocations familiales[14].

Paul Ricoeur, quoique lecteur attentif de Levinas, critique chez lui la notion de « responsabilité infinie », arguant qu'une responsabilité infinie « devient comme nulle » et rend en quelque sorte impossible de fonctionnement normal de la justice humaine qui suppose que soit trouvée la juste distance entre la victime et le coupable, et que chacun soit mis à sa place[15].

Le sens de Totalité et Infini

Article détaillé : Totalité et infini.

Lévinas refuse la métaphysique occidentale dont le geste est violent. Dans convaincre il y a vaincre. Avant la guerre, cette expérience l'aida.

La destitution de l’ontologie

Cette conception de l'altérité contredit la philosophie occidentale, fondée sur une ontologie, en ce que l’« autre » ne se laisse pas penser comme être. « Autrement qu’être, et non être autrement. » (Levinas) Le visage est ce qui m’empêche d’exister naturellement, et « l’humain de l’homme » consiste précisément en ce régime de défection de soi. L’inhumain consisterait au contraire dans le perpétuel intéressement du sujet. L’inhumain consiste alors en l’identité « sujet=être ». « L’être, c’est le mal » comme l'écrit Levinas (non sans humour provocateur). Cela renvoie à Heidegger : « Les choses sont, l’humain existe ».

Dans Autrement qu’être, Levinas énonce son opposition radicale à la philosophie heideggérienne, selon Éric Marty[16], notamment dans cette affirmation : « Rien n’est plus étrange ni plus étranger que l’autre homme et c’est dans la clarté de l’utopie que se montre l’homme. Hors de tout enracinement et de toute domiciliation ; apatridie comme authencité[17] ».

Pour Levinas, Heidegger, à la fois et aussi incontestablement, fut le plus grand philosophe du XXe siècle et il eut sa carte au parti nazi. Jean-Luc Marion précise à ce sujet : « Cette insupportable contradiction, me dit-il un jour, caractérise précisément notre temps […]. La raison nous devient l’irrationnel même et cette contradiction de la raison par elle-même se marque dans les engagements politiques aberrants que peuvent avoir même (et surtout) les plus grands intellectuels. Heidegger ne fut malheureusement pas le seul[18] ».

Rapporter un sujet (exclusivement) à son être est une possibilité d’inhumanité, alors que la subjectivité réellement humaine est traversée par le visage. « Le sujet est structuré comme autre dans le même. » (Levinas) Pour se déprendre de la philosophie heideggerienne, il opère un geste qu'on pourrait qualifier de transgression, délogeant l'ontologie et installant, à la place, "l'éthique comme philosophie première"[19] ; rompant aussi, plus lointainement, avec toute une tradition philosophique remontant à Aristote et qui assimile la métaphysique avec la "philosophie première".

Le problème éthique/justice

Il y a donc chez Levinas une désubjectivisation du sujet par le visage : le sujet est altéré dès le départ, de manière pré-originaire. Les effets pratiques de l’éthique lévinassienne portent en particulier sur la politique, même si celle-ci n’a pas été travaillée par Lévinas en tant que telle[20]. Les deux concepts clefs pour les questions de type politique sont : la « justice » et le « tiers ». La justice apparaît ainsi comme une « éthique de l’éthique » : la défection du sujet face au visage montre que la question éthique se joue dans le face à face, c'est-à-dire à deux, qu’en est-il alors des tiers ?

Sans visages, les tiers viennent faire valoir une revendication, une objection de l’éthique elle-même. Que devient alors le duo éthique, fondamentalement asymétrique et inégalitaire (le sujet n’a pas de visage) lors de l’irruption du tiers ? Le rapport éthique est-il ruiné par les places interchangeables sur lesquelles se fonde la justice depuis Kant ?

Dans cette tension éthique/justice, l’égalité pose problème car la singularité du visage ne peut pas s’y faire valoir. L’incompatibilité de ces deux ordres hétérogènes est une des grandes questions posées au lecteur de Levinas.

La solution lévinassienne à ce problème est d’ordre diachronique, elle se passe par une série d’interruptions :
Toute politique porte le péril d’une tyrannie si elle est laissée à elle-même.
L’interruption justicielle du face à face doit elle-même être interrompue par le point de vue éthique.
Levinas donne l’image du tribunal :

  • avant le jugement : éthique,
  • pendant le jugement : égalité devant la loi,
  • après le jugement : éthique à nouveau.

Cela peut correspondre à la figure du militantisme : interrompre par l’éthique un processus même légal (faucheurs volontaires).

Ainsi en nous incitant à « comparer l'incomparable », Levinas ouvre une tension féconde et indépassable entre éthique et philosophie politique[21]. C'est notamment à partir de cette tension levinassienne que le philosophe Miguel Abensour a alimenté une reproblématisation de la question de l'utopie[22]. C'est aussi dans ce sillage levinassien que le sociologue engagé Philippe Corcuff a proposé le terme paradoxal de « social-démocratie libertaire » afin de nommer une philosophie politique émancipatrice ajustée à la galaxie altermondialiste[23].

Levinas et la politique

S'il n'y a pas dans l'œuvre de Lévinas une pensée politique systématique, il serait profondément erroné de croire que la politique, au sens philosophique, serait absente de l'horizon de sa pensée. À cet égard une affirmation est constante sous sa plume : celle de la subordination de la politique à l'éthique : "la politique doit pouvoir toujours être contrôlée et critiquée à partir de l'éthique." ([24]). Ce qui éveille son inquiétude, c'est la "domination de la totalité" qui, toujours, prend le pas sur l'ouverture à l'infini. Compte tenu de son expérience personnelle, il faut considérer les très nombreux passages qu'il consacre à la guerre comme parlant des "vraies" guerres, des guerres de l'histoire, même s'il prend ce phénomène toujours à son point le plus initial, à son origine la plus radicale, à l'état naissant.

Levinas et Israël

Les textes politiques de Levinas sont toujours à comprendre en référence à l'État d'Israël. À ce titre, A l'heure des Nations[25], est à comprendre comme un ouvrage politique, au sens le plus profond, le plus philosophique et le plus lévinassien du terme. Si Levinas salue dans la laïcité le processus qui a le plus contribué à l'émancipation des juifs d'Europe, il relève en même temps dans les institutions de la laïcité "une part d'utopie" qui l'apparentent malgré elle à un phénomène religieux.

S'il situe la création de l'État d'Israël dans le contexte de la défaite de l'hitlérisme et des mandats de l'ONU, il n'y voit pas moins un phénomène dont la signification profonde est religieuse, mais pas dans le sens dans lequel on l'entend habituellement. "Ce n'est pas parce que la Terre sainte prend la forme d'un État qu'elle rapproche du Règne messianique. Mais c'est parce que les hommes qui l'habitent entendent résister aux tentations de la politique." [26]. Levinas se situe aux antipodes de ceux qui pensent qu'Israël doit devenir un État "comme les autres". Pour lui, cet événement religieux qu'est la création de l'État d'Israël ne vaut que comme bouleversement et « subversion de la politique ».

Levinas n'adhère pas, purement et simplement, à la philosophique politique du sionisme : « Levinas fut un ami d’Israël, écrit Bernard-Henri Lévy. Il n’a cessé, sa vie durant, de dire son émerveillement face à la « noble aventure », au « risque de chaque jour », que fut la construction de l’État juif. Mais il ne fut pas pour autant, à proprement parler, « sioniste ». Il ne crut jamais que l’enracinement dans une terre, et dans la forme canonique d’un État, fût la seule façon, pour le judaïsme, d’accomplir son destin au XXe siècle. Il n’accepta jamais l’idée, autrement dit, qu’un retour en Terre sainte puisse et doive effacer l’autre tradition liée, dans la mémoire juive, à l’expérience millénaire de l’exil. Jérusalem, expliquait-il, est une idée autant qu’une ville. C’est une région de l’être autant que du monde, une catégorie de l’âme autant que la belle couronne, sertie dans la montagne, qui sert de capitale à une nation. Manière d’exhorter à plus d’humilité les amants de la pierre et du lieu[27]».

Tout en portant un regard favorable sur le sionisme et la création de l’État d’Israël, Emmanuel Levinas semble s’être désintéressé de la question palestinienne qui en est la conséquence. Dans un ouvrage publié en 2012[28], la philosophe américaine Judith Butler, professeure à l'Université de Berkeley, est revenue sur des propos d'Emmanuel Levinas tenus en 1982 au cours d’un débat sur le thème « Israël et l’éthique juive »[29] : « Bien sûr, il [Levinas] a déclaré dans un entretien que le Palestinien n’avait pas de visage… »[30]. Bruno Chaouat, universitaire aux États-Unis, a alors accusé Judith Butler d'effectuer un contresens et de trahir la pensée de Levinas[31]. Elle a ensuite répondu en indiquant qu'elle reprochait à Levinas de restreindre l'usage de sa notion de visage au domaine éthique et d'effectuer ainsi une dissociation trop forte entre le domaine éthique et le domaine politique (« Je tends à étendre sa notion de "visage" plus avant dans le domaine de la politique et ainsi à ne pas tracer de ligne entre l’éthique et le politique de la manière dont il le fait parfois »[32]).

En guise de conclusion

La pensée de Levinas montre le sujet désubjectivé en tant qu’il est responsable, elle n’est donc pas une métaphysique du sujet. Sa thèse est que la subjectivité est structurée comme « autre dans le même ». L’éthique ne s’enracine pas dans une polis, un monde commun, un être ensemble dans un lieu. Elle n’est pas contenue dans le « nous », mais se tient dans un « hors-lieu », dans un rapport je-tu où personne ne peut me remplacer (comme dans la mort). L’unicité éthique du sujet non-substituable confronte le sujet à la question de sa liberté, car le sujet y est destitué de tout pouvoir. Ce qui fait dire à Levinas « Être libre, c'est faire ce que personne ne peut faire à ma place. »

Il y a chez Levinas un paradoxe éthique/justice. La politique ne se pose pas comme sphère autonome : « politique après ! » (Recueil talmudique : Au-delà du verset), elle ne peut pas être première. Au contraire, la philosophie première chez Lévinas est l’éthique, la politique est une question qui vient après une réponse (tout comme la possibilité de pouvoir juger autrui). La question de l’égalité « justicielle », si elle vient avant la réponse éthique, court-circuite la relation éthique. Comment la dissymétrie éthique peut-elle se symétriser en justice, dans un passage de 2 à 2+n, c'est la question politique lévinassienne par excellence.

Influences de Levinas

Levinas a influencé un grand nombre de philosophes contemporains, Jean-Luc Marion, en particulier : « Certains philosophes comptent, parce qu’ils proposent de nouvelles réponses à des questions déjà connues et discutées. Et c’est déjà beaucoup. Mais, comme Bergson, Levinas a rang de philosophe essentiel, car il a, lui, formulé des questions que personne avant lui n’avait vues, ni dites. Sans lui, nous ne penserions pas comme nous pensons désormais. Il dit clairement que la question de l’être pourrait ne pas constituer la première question de la philosophie : « Dieu ne se définit donc pas par l’Être[33] ». C’est d’ailleurs ce qui nous a rapprochés, alors que je commençais à envisager « Dieu sans l’être ». Et cette rencontre a fondé notre relation », écrit Marion[10].

Cette influence, Levinas l’exerce auprès d’une nouvelle génération de philosophes qui se situent dans le mouvement de la philosophie juive, de près ou de loin : Jacques Derrida, Alain Finkielkraut, Benny Lévy, Bernard-Henri Lévy, Jean-Claude Milner, Marc-Alain Ouaknin, Gérard Bensussan, Joseph Cohen, Catherine Chalier, René Lévy, etc.

« C’est en lisant Levinas, dans l’émerveillement de la découverte de Difficile liberté et de Dieu qui vient à l’idée, que nombre d’hommes et de femmes de ma génération se sont concrètement souvenus de cette allégeance sans âge qu’impliquait le fait d’« être juif », écrit Bernard-Henri Lévy. Quand on avait vingt ans en 1968, il y avait deux voies – en fait, deux modèles – pour sortir du judaïsme douloureux, victimaire, que nous avait légué l’après-guerre. Un maître à vivre : Albert Cohen – et son judaïsme solaire. Un maître à penser : Emmanuel Levinas – et son judaïsme positif, discutant d’égal à égal avec la pensée chrétienne[34] ».

Le champ de l’influence de Levinas ne se limite pas, pour autant, au mouvement de la philosophe juive. Venus d’autres horizons, Françoise Armengaud, Luc Brisson, Michel Deguy, Monique Dixsaut, Elisabeth de Fontenay, Didier Franck, Robert Legros, Jean-Luc Marion, Éric Marty, Jean-Luc Nancy, Philippe Nemo, Michel Onfray, Michaël de Saint-Cheron, Bernard Stiegler, Jacques Taminiaux, etc., lui portent la même attention.

L'Institut d'études lévinassiennes, dirigé par René Lévy, organise régulièrement des séminaires qui rassemblent des philosophes de toutes tendances autour l’œuvre de Levinas. L’Institut publie les Cahiers d'études lévinassiennes.

Œuvres

L'impressionnante œuvre léguée par le philosophe n'est pas entièrement connue du public. Le conflit qui oppose le fils et la fille de Levinas sur le droit moral à l'égard de certaines œuvres empêche la publication de plusieurs volumes de textes inédits[35].

Principales œuvres

Pour la bibliographie complète, voir ici.

  • Théorie de l’intuition dans la phénoménologie de Husserl, 1930, (nouvelle édition Vrin, Paris, 2000).
  • Début de la publication des œuvres complètes aux éditions Grasset-IMEC : volume 1, 14 octobre 2009. Volume publié sous la responsabilité de Rodolphe Calin et de Catherine Chalier, préface de Jean-Luc Marion : Carnets de captivité, écrits sur la captivité et notes philosophiques diverses.
  • Totalité et infini, Essai sur l’extériorité, La Haye, M. Nijhoff, 1961
  • De l'évasion, Montpellier, Fata Morgana, 1962
  • En découvrant l'existence avec Husserl et Heidegger, Paris, J. Vrin, nouvelle édition aug. 1967, 3e édition 1974
  • Quatre lectures talmudiques, Paris, Minuit, 1968, nouvelle édition in coll. « Critique », 1976
  • Difficile liberté, Paris, Albin Michel, coll. « Présence du judaïsme », nouvelle édition aug. 1976, 3e édit. 1983, 4e édition 1995, 5e édition 2006
  • Sur Maurice Blanchot, Fata Morgana, coll. « Essais », 1976, nouvelle édition 1995
  • Noms propres, Montpellier, Fata Morgana, 1976
  • Du sacré au saint : cinq nouvelles lectures talmudiques, Paris Minuit, coll. « Critique », 1977
  • De l'existence à l'existant, Paris, J. Vrin, 1978, nouvelle édition, 1993
  • Le Temps et l'Autre, Montpellier, Fata Morgana, 1980 - PUF, 2011
  • L'Au-delà du verset : lectures et discours talmudiques, Paris, Minuit, coll. « Critique », 1982
  • Éthique et Infini, (dialogues d'Emmanuel Levinas et Philippe Nemo), Paris, Fayard, coll. « L'Espace intérieur », 1982
  • Difficile liberté, Paris, LGF, Le Livre de poche, coll. « Biblio-essais », 1984
  • Transcendance et Intelligibilité, Genève, Labor et Fides, 1984, nouvelle édition 1996
  • Noms propres, Paris, Le Livre de poche, coll. « Biblio essais », 1987, 2014
  • À l'heure des nations, Paris, Minuit, coll. « Critique », 1988
  • Autrement qu'être ou Au-delà de l'essence, Paris, LGF, Le Livre de poche, coll. « Biblio-essais », 1990
  • De Dieu qui vient à l'idée, Paris, J.Vrin, 2e édit. revue et aug. 1992
  • La Mort et le Temps, Paris, LGF, Le Livre de poche, coll. « Biblio-essais », 1992
  • Dieu, la mort et le temps, Paris, Grasset, 1993
  • L'Intrigue de l'infini : textes réunis et présentés par Marie-Anne Lescourret, Paris, Flammarion, 1994
  • Liberté et Commandement, Montpellier, Fata Morgana, coll. « Essais », 1994
  • Altérité et transcendance, Montpellier, Fata Morgana, coll. « Essais », 1995
  • Dieu, la mort et le temps, LGF, Le Livre de poche, coll. « Biblio-essais », 1995
  • Nouvelles lectures talmudiques, Paris, Minuit, 1996
  • Hors sujet, LGF, Le Livre de poche, coll. « Biblio-essais », 1997
  • De l'évasion, Paris, LGF, Le Livre de poche, coll. « Biblio-essais », 1998
  • L'Éthique comme philosophie première, Paris, Rivages, coll. « Rivages poche », 1998
  • Œuvres t. 1 : Carnets de captivité suivi de Écrits sur la captivité et Notes philosophiques diverses, Paris, Grasset-IMEC, 2009.
  • Œuvres t. 2 : Parole et silence et autres conférences inédites au Collège philosophique, Paris, Grasset-IMEC, 2011.:
  • Œuvres t. 3 : Eros, littérature et philosophie, Paris, Grasset-IMEC, 2013.

Articles en ligne

  • « Martin Heidegger et l’ontologie », dans Revue philosophique de la France et de l’étranger, no 5-6, mai-juin 1932 – disponible sur Gallica
  • « Quelques réflexions sur la philosophie de l’hitlérisme », dans Esprit, no 26, novembre 1934 – disponible sur Gallica
  • « L’inspiration religieuse de l’Alliance », dans Paix et Droit, no 8, oct. 1935 – disponible sur Gallica
  • « Actualité de Maïmonide », dans Paix et Droit, no 4, avril 1935 – disponible sur Gallica
  • « L’essence spirituelle de l’antisémitisme d’après Jacques Maritain », dans Paix et Droit, no 5, mai 1938 – disponible sur Gallica
  • « À propos de la mort du pape Pie XI », dans Paix et Droit, no 3, mars 1939 – disponible sur Gallica
  • « Être juif », dans Confluences, no 15-17, 1947 – disponible sur Gallica
  • « Liberté et commandement », dans la Revue de métaphysique et de morale, 1953 – disponible sur Gallica

Études sur Emmanuel Levinas

Ouvrages

Dossiers

  • La métaphysique d'Emmanuel Levinas, Noesis, no 3 | 2000. Sous la direction de Dominique Janicaud.
    Avec Jean-François Mattéi, David Banon, Jacques Rolland, Gérard Bensussan, Paul Olivier, Françoise Armengaud, Daniel Charles
  • Emmanuel Levinas, The Journal of Jewish Thought and Philosophy. Volume 14, Numbers 1-2, 2006. Guest editor: Catherine Chalier. Contributions: M. Smith, R. Calin, S. Habib, R. Zagury-Orly, M. Leibovici, R. Gibbs, A. Aronowicz, M. Kavna, C. Chalier, E. Wolfson, O. Eisenstadt, C. E. Katz.
  • Le souci de l'art chez Emmanuel Levinas, Paris, Éditions Manucius, 2010. Textes de: Emmanuel Levinas, Jean-Luc Marion, Rodolphe Calin, Olivier Soutet, Guy Petitdemange, Éric Marty, Pierre Brunel, Denis Guénoun, Bruno Clément, Joseph Cohen, Danielle Cohen-Levinas, Gilles Hanus, Orietta Ombrosi, Stéphane Habib, Raphael Zagury-Orly, Gérard Bensussan, Georges Molinié, Michel Deguy, Françoise Armengaud, Jean-Luc Nancy.
  • A Century with Levinas. Notes on the Margins of his Legacy, Studia Phaenomenologica, no 6 | 2006. Sous la direction de Adina Bozga et Attila Szigeti.
    Avec Yasuhiko Murakami, Matthieu Dubost, Guillaume Fagniez, László Tengelyi, Fabio Ciaramelli, Richard A. Cohen, Alain Beaulieu, François-David Sebbah, John Drabinski
  • Dossier "Emmanuel Levinas" in Les Temps Modernes, Paris, Gallimard, no. 665, juillet-octobre 2011. Textes de: Gérard Bensussan, Alain David, Joëlle Hansel, Jacob Rogozinski, Joseph Cohen-Stéphane Habib-Raphael Zagury-Orly.

Notes et références

  1. David Banon, « Levinas, penseur juif ou juif qui pense », Noesis [dir. Jean-François Mattéi], no 3 2000, mis en ligne le 15 mars 2004, Consulté le 1er février 2010.
  2. En 2009, les éditions Grasset ont publié les écrits de cette période dans le premier tome des Œuvres d'E. Levinas, intitulé "Carnets de captivité" (cf. Bibliographie).
  3. Voir, Archives des Écoles de l'Alliance Israélite en Tunisie 1876-1970. The Central Archives for the History of the Jewish People Jerusalem (CAHJP). p. 123.
  4. Rivages Poches
  5. On lira aussi son livre consacré aux deux auteurs, En découvrant l'existence avec Husserl et Heidegger, éd. Vrin, 2002.
  6. éd. LGF, p. 27-28.
  7. Éthique et Infini
  8. "L'intentionnalité, où la pensée reste adéquation à l'objet, ne définit pas la conscience à son niveau fondamental. Tout savoir en tant qu'intentionnalité suppose déjà l'idée de l'infini, l'inadéquation par excellence. Totalité et Infini p.XV
  9. Les Frères Karamazov, Livre VI, Pléiade p. 310
  10. 1 2 Elisabeth Lévy, « Marion : pourquoi Levinas est grand », sur Le Point, (consulté le 10 juillet 2015)
  11. Totalité et Infini
  12. Totalité et infini, Martinus Nijhof, 1974, p. 47-48.
  13. Félix Perez, En découvrant le quotidien avec Emmanuel Levinas, L'Harmattan, 2000
  14. Voir Philippe Corcuff, « Ordre institutionnel, fluidité situationnelle et compassion. Les interactions aux guichets de deux caisses d'allocations familiales », Recherches et Prévisions (revue de la Caisse Nationale des Allocations Familiales), no 45, septembre 1996, et « Usages sociologiques de ressources phénoménologiques : un programme au carrefour de la sociologie et de la philosophie », dans J. Benoist et B. Karsenti (éds.), Phénoménologie et sociologie, Paris, PUF, 2001.
  15. Lire autrement qu'être PUF, 1997
  16. Éric Marty, Emmanuel Levinas aves Shakespeare, Proust et Rimbaud, Les Temps modernes, no 649, Gallimard, 2008
  17. Emmanuel Levinas, Autrement qu’être ou au-delà de l’essence, Livre de Poche, p. 61
  18. Emmanuel Levinas, cité par Jean-Luc Marion, Pourquoi Levinas est grand ?, Le Point, 21/10/2099
  19. L'éthique comme philosophie première, Payot, 1998
  20. Il faut néanmoins rappeler l'essai sur la philosophie de l'hitlérisme ; une méditation sur le livre d'Esther ; ainsi que les textes et surtout interview portant sur Israël).
  21. Voir sur ce point Philippe Corcuff, « Lévinas Emmanuel, 1906-1995 : Totalité et Infini - Essai sur l'extériorité, 1961, et Autrement qu'être ou au-delà de l'essence, 1974 », dans F. Châtelet, O. Duhamel et E. Pisier (éds.), Dictionnaire des œuvres politiques, Paris, PUF, 2001, quatrième édition revue et augmentée dans la collection « Quadrige ».
  22. Voir en particulier Miguel Abensour, « Penser l'utopie autrement », in Cahier de L'Herne : Emmanuel Levinas, Paris, Éditions de L'Herne, 1991 (réédition LGF/Le Livre de poche, 1993).
  23. Voir Philippe Corcuff, La société de verre. Pour une éthique de la fragilité, Paris, Armand Colin, 2002, p. 231-236.
  24. Éthique et Infini p. 75
  25. Ed. de Minuit, 1988
  26. Difficile liberté, 1963 p. 367
  27. Bernard-Henri Lévy, Question de principe, sept, Grasset, p. 552
  28. Parting Ways : Jewishness and the Critique of Zionism, Columbia University Press, 2012
  29. Débat sur Radio-Communauté entre Emmanuel Levinas, Alain Finkielkraut et Salomon Malka sur le thème « Israël et l’éthique juive » au lendemain des massacres de Sabra et Chatila, émission du 28 septembre 1982, texte publié dans Les Nouveaux Cahiers, n°71, 1983, p.1-8, "Israël, éthique et politique, entretiens avec S. Malka (avec Alain Finkielkraut)"
  30. A la question de S. Malka « Est-ce que l’"autre" pour l’Israélien, n’est pas d’abord le Palestinien ? », Emmanuel Levinas n'avait pas répondu par l'affirmative et avait dit : « Ma définition de l’autre est tout à fait différente. […] Là, l'altérité prend un autre caractère, là, dans l’altérité peut apparaître un ennemi [...] », Retranscription du débat du 28 septembre 1982 dans Les Nouveaux Cahiers, n° 71, 1983, p. 1-8.
  31. http://laphilosophie.blog.lemonde.fr/2013/03/13/debat-judith-butler-ou-levinas-trahi/
  32. « Levinas trahi? La réponse de Judith Butler », sur Désordres philosophiques
  33. Emmanuel Levinas, Œuvres, T.1, p. 386
  34. Bernard-Henri Lévy, Question de principe, sept, Grasset, p. 51
  35. le Figaro, « Lévinas au cœur d'un drame mauriacien », journalier [lire en ligne]

Voir aussi

  • Notices d’autorité : Fichier d’autorité international virtuel International Standard Name Identifier Bibliothèque nationale de France Système universitaire de documentation Bibliothèque du Congrès Gemeinsame Normdatei Institut central pour le registre unique Bibliothèque nationale de la Diète Bibliothèque nationale d'Espagne WorldCat

Articles connexes

Mots clés :

Philosophie :

À voir également :

  • Camp de concentration
  • Bergen-Belsen
  • Europe sous domination nazie
  • Place Emmanuel-Levinas baptisée en son honneur dans le 5e arrondissement de Paris

Liens externes

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  • Société internationale de recherche Emmanuel Levinas.
  • Bibliographie primaire et secondaire complète de l'Institut d'études lévinasiennes de Paris.
  • Institut d'études lévinasiennes de Paris
  • (nl) Bibliographie primaire et secondaire par la Société Levinas néerlandaise en coopération avec l'Université pour les Sciences Humaines d'Utrecht sous la responsabilité de Prof. Dr Joachim Duyndam.
  • Espacethique : Aventure éthique de la responsabilité Site philosophique consacré à la vie et à l'œuvre d'Emmanuel Levinas. Textes et commentaires, indications bibliographiques sont disponibles en diverses langues. Annuaire de liens de sites philosophiques et de textes en ligne.
  • Sur les traces d'Emmanuel Levinas
  • Dossier de la revue Noesis consacré à la métaphysique de Levinas
  • Un documentaire : Le Dieu absent, Emmanuel Levinas et l'humanisme de l'Autre
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