Synchronie et diachronie
En linguistique, deux points de vue différents et complémentaires peuvent être adoptés lorsqu'on analyse les faits de langue :
- l'approche dite diachronique s'intéresse à l'histoire de la langue et étudie ses évolutions (étymologie, évolutions phonétiques, sémantiques, lexicales, syntaxiques, etc.). Le terme est un emprunt savant construit sur des racines grecques, δια-, « à travers », et χρόνος, « temps » ; la linguistique historique, par exemple, a une approche diachronique ;
- l'approche dite synchronique s'intéresse à une langue à un moment précis de son histoire ; le mot est aussi fabriqué à partir de deux termes grecs : συν-, « avec », χρόνος, « temps ». La grammaire scolaire est pour l'essentiel synchronique : elle indique quelles sont les normes considérées comme des règles d'une langue, qui peuvent avoir changé depuis des états antérieurs.
Les termes de synchronie et de diachronie et la construction théorique de leur opposition sont dus à Ferdinand de Saussure, professeur de linguistique générale à l'université de Genève de 1896 à 1911, et l'un des fondateurs de la linguistique moderne. Contrairement à ses prédécesseurs, pour qui l'étude de l'évolution d'une langue (diachronie) était privilégiée, Saussure affirme la primauté de l'étude de son état à un instant donné (synchronie).
Cette opposition est fructueuse également en philosophie et en sociologie, où elle a été utilisée entre autres par Roland Barthes et Jean-Paul Sartre.
En géopolitique, l'étude de la diachronie est l'analyse des évolutions d'une situation, d'un territoire, d'une culture ou d'une population à travers le temps, y compris sur des temps longs (plusieurs époques). Exemple : l'évolution d'un toponyme comme, par exemple, « Bessarabie » ou « Indes » à travers le temps et l'espace. Dans ses nombreux ouvrages, Yves Lacoste développe trois concepts clefs permettant de conduire une analyse géopolitique [1]: l'étude de la diachronie (évolution à travers le temps), de la diatopie (évolution à travers l'espace) et des représentations, ce qui touche au domaine de la psychologie du développement, où cette opposition « synchronie » — « diachronie » renvoie respectivement à une analyse d'approche microdéveloppementale (moderne, plus ou moins wallonienne) ou macrodéveloppementale (théories piagétiennes).
Jacques Lacan a aussi utilisé cette opposition en psychanalyse.
Références
- ↑ Broché, Choiseul; ISBN 978-2-36159-001-7; 268 pages
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Linguistique synchronique » (voir la liste des auteurs).
- Ferdinand de Saussure (préf. et éd. de Charles Bally et Albert Sechehaye, avec la collaboration d'Albert Riedlinger ; éd. critique préparée par Tullio De Mauro ; postface de Louis-Jean Calvet), Cours de linguistique générale, Paris, Payot, coll. « Grande bibliothèque Payot », (1re éd. 1916), 21 cm, XVIII-520 p. (ISBN 2-228-88942-3, OCLC 34060711, notice BnF no FRBNF35794831)
Liens externes
- Christian Fierens, L'inconscient et le temps (Lacan) (France culture, mercredi 26 mars 2008) bibliogr.
- Astrid Guillaume, "Diachronie et Synchronie : Passerelles (étymo)logiques. La dynamique des savoirs millénaires", in Texto !, revue électronique de l’Institut Ferdinand de Saussure, sld François Rastier, vol.XIV, n°2, rubrique « Repères pour l’étude », 2010.
- Portail de la linguistique