Roi des Belges
Roi des Belges (nl) Koning der Belgen (de) König der Belgier | ||
Armoiries royales. | ||
Titulaire actuel Philippe depuis le |
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Création | ||
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Titre | Roi des Belges | |
Premier titulaire | Léopold Ier | |
Résidence officielle | Château de Laeken (Laeken) | |
Site internet | http://www.monarchie.be/fr | |
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En Belgique, le roi des Belges est le chef de l’État. Les monarques belges partagent le pouvoir exécutif avec le gouvernement fédéral à l’échelon national, mais aussi avec celui des échelons régionaux, communautaires et provinciaux.
Pouvoirs du roi
La Belgique étant une monarchie constitutionnelle, les pouvoirs du roi sont définis par la Constitution belge. Le premier paragraphe de l’article 33 de la Constitution dispose que « tous les pouvoirs émanent de la nation », ce qui au XIXe siècle contrastait fortement avec les monarchies parlementaires des pays voisins (Pays-Bas, Royaume-Uni…) où les monarques détenaient le pouvoir Dei gratia. Ce faisant, le roi n'est pas couronné et ne porte aucun attribut habituellement associés aux rois. Néanmoins cela n'empêche pas de parler de « Couronne de Belgique » (avec une majuscule à « Couronne ») pour désigner l'État belge, comme il apparaît dans l'« Ordre de la Couronne ».
La Constitution, dans ce qu’elle dit du roi, est restée depuis 1831 jusqu’à aujourd’hui pratiquement inchangée. Mais derrière cette stabilité des textes, la pratique a énormément évolué[1]. En effet, on distingue traditionnellement les pouvoirs constitutionnels du roi : certains sont personnels au roi et d’autres sont de facto exercés par le gouvernement fédéral. Il reste que tout acte gouvernemental doit porter la signature royale en sus de celle d’un ministre au moins. Tout au long de l’histoire de la Belgique, l’autorité des actes gouvernementaux a crû au détriment de l’autorité royale. Néanmoins, le roi des Belges demeure un des souverains ayant conservé le plus de pouvoirs par rapport notamment aux souverains du Royaume-Uni et de Suède. Il conserve notamment l’initiative de s’adresser à la Nation, du choix des sujets traités et de la composition de ses discours, mais sous le contreseing ministériel, alors que le discours du trône lu par Élisabeth II a été totalement rédigé, à la virgule près, par son premier ministre.
Le principe fondamental[2] de la monarchie belge est qu’aucun acte du roi n’est suivi d’effet sans le contreseing d’un ministre[3]. Les ministres étant responsables devant la Chambre des représentants, l’action du roi est contrôlée indirectement par le Parlement.
Pouvoir exécutif
Le roi possède le pouvoir exécutif fédéral[4]. Il nomme et révoque les ministres[5]. Pour cela, la tradition héritée de Léopold Ier veut qu’il nomme un « formateur » chargé de composer un ministère[6]. Ce choix n’est pas seulement le choix du futur premier ministre mais aussi, à travers lui, le choix d’une coalition et d’une majorité au Parlement[7]. Le gouvernement doit cependant obtenir un vote de confiance au Parlement et l’on constate aujourd’hui que le roi ne peut plus nommer que le candidat proposé par le parti vainqueur des élections, ce qui est un fait entériné par l’habitude, mais non le résultat d’une réforme constitutionnelle. On rapporte d’ailleurs que des cas se sont produits sous le règne du roi Baudouin lorsque celui-ci fit savoir à l’avance, au cours de consultations politiques, qu’il s’opposerait à contresigner une nomination. Mais le cas le plus fameux d’un refus du roi de signer une disposition contraire à sa conviction est celui du roi Baudouin refusant de signer la loi légalisant l’avortement, ce qui obligea le gouvernement à signer collégialement à la place du roi lorsque celui-ci est empêché, comme le prescrit la constitution. De fait, était ainsi créé une situation dans laquelle l’empêchement royal peut se revendiquer d’une cause morale et non plus de cas de force majeure comme le fait d’être dans le coma ou prisonnier de l’ennemi.
En ce qui concerne l’acte de nomination des ministres, on pratique le contreseing de courtoisie, c’est-à-dire que le nouveau ministre signe l’acte de révocation de son prédécesseur et le ministre partant signe l’acte de nomination de son successeur. Cependant, si un ministre venait à refuser sa révocation, son successeur pourrait très bien signer les deux actes[7],[N 1].
Lorsque la formation d’un gouvernement s’annonce difficile, le roi nomme un « informateur[N 2],[8] ».
Le dernier pouvoir politique personnel du roi est celui d’accepter ou de refuser la démission d’un ministre ou de tout un gouvernement[9],[N 3].
Le roi peut « sanctionner » les lois, mais le Parlement peut de son côté passer outre de cet avis : en 1990, il a ainsi ignoré le veto du roi Baudouin qui s’opposait au droit à l’avortement.
Le roi ne peut exprimer publiquement une opinion qu’avec l’accord du gouvernement.
Il est également officiellement chef des armées[10], bien que depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale il ne fasse qu’obéir aux ordres du ministre de la Défense en fonction. Avant cette date, le commandement de l’armée était un pouvoir personnel du roi alors que les rédacteurs de la Constitution voulaient que ce pouvoir soit également soumis au contreseing ministériel. C’est Léopold Ier qui a pris ce pouvoir lors de sa montée sur le trône en 1831, afin de conduire l’armée face aux invasions hollandaises. Le souverain étant le meilleur stratège belge à l’époque, personne n’y a fait d’objection[11]. La confusion catastrophique entre les devoirs politiques et militaires de Léopold III en mai 1940 a poussé une commission à retirer le commandement de l’armée des pouvoirs personnels du roi en 1949.
Pouvoir législatif
Le roi exerce également le pouvoir législatif fédéral[12], puisque c’est lui qui sanctionne et promulgue[13] (il signe) les lois votées par le parlement fédéral. Ce pouvoir est également limité. En 1990, le roi Baudouin refusa pour des raisons de conscience personnelle de sanctionner la loi de dépénalisation conditionnelle de l’avortement, sans pour autant s’opposer à ce qu’une solution soit trouvée pour permettre à cette loi d’être sanctionnée et promulguée. Les ministres réunis en Conseil ont constaté l’impossibilité de régner le , ont sanctionné et promulgué la loi, ont convoqué les Chambres pour qu’elles mettent fin à l’impossibilité de régner du roi le .
Jusqu’au , le roi avait le droit de dissoudre les Chambres. Cependant, à partir des années 1970, c’était le gouvernement qui exerçait ce droit. Lors de la quatrième réforme de l’État (1994), le constituant a décidé que la dissolution des Chambres ne pouvaient avoir lieu que dans certains cas (voir l’article 46 de la Constitution). Notons encore que les enfants du roi (les premiers héritiers du trône) sont sénateurs de droit[14].
Un roi au rôle d'arbitre et refuge pour la nation
Carl Devos, politologue à l’Université de Gand, remarque : « Le système belge accorde plus de pouvoirs au Roi qu'en Suède, par exemple. Il est encore celui qui désigne le Premier ministre, il est le chef des Armées et c'est lui qui déclare la guerre[15]. »
La partie immergée (de l’iceberg, selon l’expression de Léopold III, par rapport aux prérogatives officielles, apparentes, du roi)[16], la « mission essentielle » du roi, est faite de ses multiples contacts qu’il noue avec les décideurs, les spécialistes ou la base, dans tous les secteurs d’activités, pour écouter mais aussi suggérer, conseiller, stimuler, avertir. Et de citer trois atouts capitaux dont le souverain peut tirer parti dans ce cadre :
- son expérience des hommes et des choses acquises dans la durée ;
- son indépendance à l’égard des partis et des groupes de pression ;
- l’éducation qui l’a préparé à sa fonction depuis son enfance[16],[17],[18].
Le roi ne cesse de consulter, de s’informer et même de suggérer. Les « multiples contacts » qu’il noue avec les catégories les plus variées d’interlocuteurs (issus ou non du monde politique) demeurent confidentiels quant à leur contenu et, par là même, ces entretiens royaux constituent les fameux « colloques singuliers » propres à la monarchie belge, par lesquels le Souverain peut imprimer sa marque ne fût-ce que morale sur des questions d’éthique ou touchant au bien-être des plus démunis, ou encore, étant au-dessus des partis, chercher à sauvegarder une approche raisonnable vers une solution (sociale ou politique) souhaitée par le plus grand nombre de ses concitoyens.
Car, comme l’historien belge Francis Balace le faisait si bien remarquer à Paul Vaute : « Face aux politiciens de plus en plus discrédités, le roi a l’avantage d’être le seul dont l’homme de la rue puisse jurer que son intérêt personnel coïncide avec celui du pays[19]. »
Chronologie des souverains depuis 1831
No | Image | Nom | Période | Remarque |
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Érasme-Louis Surlet de Chokier | 1831 | Régent | ||
1 | Léopold Ier | 1831-1865 | Roi des Belges | |
2 | Léopold II | 1865-1909 | ||
3 | Albert Ier | 1909-1934 | ||
4 | Léopold III | 1934-1944 | ||
Charles, comte de Flandre | 1944-1950 | Régent | ||
4 | Léopold III | 1950-1951 | Deuxième règne après son exil. Abdique le 16 juillet 1951. | |
5 | Baudouin | 1951-1993 | ||
6 | Albert II | 1993-2013 | Abdique le 21 juillet 2013. | |
7 | Philippe | Depuis 2013 |
Succession au trône
Règles de succession
« Les pouvoirs constitutionnels du roi sont héréditaires dans la descendance directe, naturelle et légitime de S.M. Léopold, Georges, Chrétien, Frédéric de Saxe-Cobourg, par ordre de primogéniture.
Sera déchu de ses droits à la couronne, le descendant visé à l’alinéa premier, qui se serait marié sans le consentement du roi ou de ceux qui, à défaut, exercent ses pouvoirs dans les cas prévus par la Constitution.
Toutefois il pourra être relevé de cette déchéance par le roi ou par ceux qui, à son défaut, exercent ses pouvoirs dans les cas prévus par la Constitution, et ce moyennant l’assentiment des deux Chambres »
— Article 85 de la Constitution.
À la mort du roi, les ministres réunis en conseil exercent les prérogatives royales[21]. Pour devenir roi, le successeur doit être âgé de dix-huit ans accomplis et jurer devant les Chambres réunies « Je jure d’observer la Constitution, et les lois du peuple belge, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire »[22]. Au cas où l’héritier serait mineur, les Chambres pourvoient à la régence[23].
Si un jour il n’y avait plus de descendance de Léopold Ier, le roi pourrait proposer un successeur avec l’assentiment des Chambres[24], les deux tiers des membres devant être présents et une majorité des deux tiers des suffrages étant requise[25]. S’il ne le fait pas et que le trône soit vacant, les Chambres choisissent un régent, des élections ont lieu et les nouvelles Chambres élisent un successeur[26].
Les règles de succession ont été modifiées par deux fois dans l’histoire de la Belgique.
Le , à la demande de Léopold II, on ajoute comme exigence pour monter sur le trône que le mariage de l’héritier du trône ait été accepté par le roi. L’acceptation doit être contresignée par un ministre.
Le , la « loi salique » a été abrogée pour les descendants du roi Albert II. Elle est toujours en vigueur pour les autres branches des descendants de Léopold Ier[27] qui, en l’absence de descendance de mâle en mâle, sont donc absentes de la succession[N 4]. Ce changement s’est opéré rapidement : le premier ministre en a fait la proposition au Conseil des ministres le , le texte adopté par la Chambre des représentants en avril et le Sénat en juin[28].
Ordre de succession actuel
- Léopold Ier de Belgique (1790-1865), roi des Belges
- Léopold II de Belgique (1835-1909), roi des Belges
- Philippe de Belgique (1837-1905), comte de Flandre
- Albert Ier de Belgique (1875-1934), roi des Belges
- Léopold III de Belgique (1901-1983), roi des Belges
- Baudouin de Belgique (1930-1993), roi des Belges
- Albert II de Belgique (1934), roi des Belges
- Philippe de Belgique (1960), roi des Belges
- [ 1 ] Élisabeth de Belgique (2001), duchesse de Brabant
- [ 2 ] Gabriel de Belgique (2003)
- [ 3 ] Emmanuel de Belgique (2005)
- [ 4 ] Éléonore de Belgique (2008)
- [ 5 ] Astrid de Belgique (1962), archiduchesse d’Autriche-Este
- [ 6 ] Maria Laura de Belgique (1988)
- [ 7 ] Joachim de Belgique (1991)
- [ 8 ] Luisa Maria de Belgique (1995)
- [ 9 ] Laetitia Maria de Belgique (2003)
- [ 10 ] Laurent de Belgique (1963)
- [ 11 ] Louise de Belgique (2004)
- [ 12 ] Nicolas de Belgique (2005)
- [ 13 ] Aymeric de Belgique (2005)
- Philippe de Belgique (1960), roi des Belges
- Léopold III de Belgique (1901-1983), roi des Belges
- Albert Ier de Belgique (1875-1934), roi des Belges
Bibliographie
- Gilbert Kirschen, L'Éducation d’un prince : entretiens avec le roi Léopold III, Bruxelles, Didier, 1984, 155 p. (ISBN 2-87088-531-8).
- Pierre-Yves Monette, Métier de roi : famille, entourage, pouvoir, Bruxelles, Alice, , 255 p. (ISBN 2-930182-51-2).
- Jean Stengers, L'Action du roi en Belgique depuis 1831 : pouvoir et influence, Bruxelles, Racine, 2008, 429 p. (ISBN 978-2-87386-567-2).
- Mark Van den Wijngaert, Lieve Beullens et Dana Brants (trad. Anne-Laure Vignaux), Pouvoir et monarchie : la Belgique et ses rois, Liège, Luc Pire, , 432 p. (ISBN 2-87415-157-2).
- Paul Vaute, Voie royale : essai sur le modèle belge de la monarchie, Grâce-Hollogne, Mols, 1998, 150 p. (OCLC 41527732).
- Patrick Weber, De Jules César au Roi Philippe : souverains de Belgique, Bruxelles, Racine, , 208 p. (ISBN 978-2-87386-836-9).
Notes et références
Notes
- ↑ Le cas d’un ministre refusant de signer sa révocation ne s’est produit qu’une fois dans l’histoire belge : suite à l’invasion de la Belgique par l’Allemagne nazie. Léopold III et le gouvernement Pierlot sont en désaccord sur la conduite à adopter durant le restant de la guerre. Le roi songe à former un nouveau gouvernement mais celui en place refuse de démissionner. Il demande à Raoul Hayoit de Termicourt si les nouveaux ministres peuvent signer leur acte de nomination. Hayoit de Termicourt, faute de documentation et dans une situation d’urgence et de guerre, répond erronément par la négative. Le gouvernement d’Hubert Pierlot a ainsi pu rester en place et continuer depuis Londres la résistance.
- ↑ La première désignation par le roi d’un informateur date de mars 1935[8].
- ↑ Le dernier refus de démission date du , jour où Albert II refuse la démission du gouvernement d'Yves Leterme.
- ↑ Le cas du prince Alexandre (deuxième mariage de Léopold III est quelque peu controversé.
Références
- ↑ Stengers 2008, p. 22
- ↑ Stengers 2008, p. 31
- ↑ Article 106 de la Constitution
- ↑ Article 37 de la Constitution
- ↑ Article 96 de la Constitution
- ↑ Stengers 2008, p. 42
- 1 2 Stengers 2008, p. 45
- 1 2 [PDF] (nl) Bregt Henkens, « De vorming van de eerste regering - van Zeeland », Revue belge d’histoire contemporaine, Bruxelles, t. 26, 1996, p. 224 (lire en ligne)
- ↑ Stengers 2008, p. 76
- ↑ Article 167 (paragraphe 2) de la Constitution
- ↑ Stengers 2008, p. 93
- ↑ Article 36 de la Constitution
- ↑ Article 109 de la Constitution
- ↑ Article 72 de la Constitution
- ↑ Albert II, roi malgré lui, devenu ciment de la Belgique par Jean-Sébastien Lefebvre le 4 novembre 2010 sur le site Slate.fr
- 1 2 Kirschen 1984, p. 137
- ↑ Kirschen 1984, p. 138
- ↑ Vaute 1998, p. 52
- ↑ Vaute 1998, p. 85
- ↑ [PDF] Session ordinaire du 10 avril 1991 à la Chambre des représentants (10/60 • 1531/2 • 90/91)
- ↑ Article 90 de la Constitution
- ↑ Article 91 de la Constitution
- ↑ Article 92 de la Constitution.
- ↑ Article 86 de la Constitution
- ↑ Article 87 de la Constitution
- ↑ Article 95 de la Constitution
- ↑ Première disposition transitoire de la Constitution
- ↑ Moniteur belge du 10 juillet 1991
Articles connexes
- Belgique
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Liens externes
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