Conquête musulmane du Maghreb
Date | 647 - 709 |
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Lieu | Afrique du Nord |
Issue | Victoire musulmane |
Changements territoriaux | Les territoires d'Afrique du Nord passent sous contrôle musulman |
Califat rashidun Califat omeyyade | Empire byzantin Berbères |
Abd Allâh ibn Saad ibn Sarh Moussa Ibn Noçaïr Hassan Ibn Numan | Grégoire le Patricien † Koceila † Kahena Tibère Apsimar |
Batailles
Bataille de Sufétula (647) • Bataille de Carthage (698)
Cet article traite de l’histoire de la conquête musulmane au Maghreb, de l'Ifriqiya tunisienne jusqu’au rocher de Gibraltar, qui doit son nom actuel à cet événement.
Il est encore difficile de comprendre les liens qui se sont noués entre les peuples d’Afrique du Nord et l’islam, les éléments historiques restant rares. La colonisation a ravivé les tensions entre Arabes et Berbères, que les siècles avaient apaisées. L’idée d’un phénomène de conversion et d’acculturation reste à l’état d’hypothèse. Il faut près d’un siècle, en effet, pour apaiser les tensions politiques liées à la conquête. La conversion des tribus ne s’est pas déroulée uniformément, et a connu des résistances, des apostasies ponctuelles, ou l’adoption de syncrétismes. L’arabisation s’est faite de manière plus lente encore.
Les populations berbères du Maghreb ont contribué tant au rayonnement de la civilisation arabo-musulmane, qu’à la défense de certains particularismes ; il existe ainsi une identité maghrébine dans le monde médiéval, pour l’étude de laquelle les sources manquent. Il n’y a en effet aucun témoignage direct de l’époque de la conquête. Il faut se contenter de récits postérieurs, comme ceux d’ibn al-Hakam (849) ou de Baladhûrî (823). Il est délicat de proposer une théorie de la conquête, un regard critique sur les sources étant nécessaire.
L’histoire du Maghreb ne débute pas avec la conquête : celui-ci a déjà connu une présence romaine, sur le littoral de la Tunisie, de l'Algérie et du Maroc, et cela jusqu’à 200 kilomètres de profondeur dans les terres ; le christianisme s’y est anciennement implanté, avec une Église chrétienne d’Afrique très active (saint Augustin, par exemple, d’origine berbère). Lors de la conquête arabe, le Maghreb est une dépendance de l’Empire byzantin, quasi autonome.
Étapes (647-800)
En 642, les Arabes sont présents à Barqa et à Tripoli. L’Égypte est conquise. Ceux qui, parmi les Coptes, ne supportent pas le pouvoir byzantin, accueillent les Arabes en libérateurs[1]. D'autres sources indiquent, que non seulement les Coptes n'ont pas apprécié leur venue, mais qu'en plus ils les ont combattus aux côtés des Romains[2]. Al-Fustât est fondée, qui servira de base arrière à la conquête. Omar refuse d’annexer l’Ifriqiya et s’oppose à toute expédition. Il meurt en 644, et Uthmân, dès 647, autorise les premiers raids.
En 647-648, premières conquêtes, menées par le gouverneur d'Égypte, ‘Abd Allâh Sa‘d, écrase près de Sufetula l'armée byzantine du patrice Grégoire qui est tué au cours de l'affrontement. Les vainqueurs ne disposent pas des moyens nécessaires pour assiéger les villes du nord de l'Ifriqiya et se retirent en 648.
Cependant, les troubles ayant suivi l'assassinat de ‘Uthmân et l'élection controversée du calife ‘Ali (656-661), détournent les convoitises et les énergies de cette région ; période que les Byzantins ne mettront pas à profit pour se renforcer, et au contraire, ils se mettent à dos une bonne part des chrétiens d’Afrique par des mesures fiscales maladroites. En 661, Mu'âwiyya accède au califat (661- 680) ; l’Ifriqiya fera dès lors l’objet de projets d'installation Omeyyades.
En 670, la célèbre expédition de Oqba Ibn Nafaa mène à la fondation de Kairouan ; c’est la première implantation de l’islam en Occident. Kairouan est à la fois une ville islamique, une tête de pont pour de nouvelles expéditions, et un jalon sur la route entre l’Égypte et le Maghreb. Oqba Ibn Nafaa va recevoir l'appui des premiers contingents de convertis (Mawâli), esclaves issus des tribus berbères, et qui restent liés, malgré leur affranchissement, par le lien du walâ ; des revendications feront jour, rapidement, dans cette nouvelle classe qui ne peut accéder aux postes-clés. En effet, l'idéologie égalitaire dont se réclame l’islam a pris du temps avant de se réaliser dans les structures tribales arabes. Cependant ‘Uqba est destitué, et remplacé par Abû al-Muhâjir Dînâr al-Ansâri, qui décide de mener une politique d'islamisation des Berbères, et considère que ses principaux ennemis sont les Byzantins.
En 681, les aléas politiques ramènent ‘Uqba en Ifriqiya, qui fait arrêter son prédécesseur, et mène une politique d'humiliation envers les chefs berbères capturés, y compris ceux qui ont été islamisés, comme Kusayla. La question qui est posée, est la fiabilité du nouveau statut que l’on veut — ou non — donner aux nouveaux convertis ; il semble que ceux-ci ont été généralement traités en vassaux, soumis à l'impôt.
En 682-683, ‘Uqba dirige une grande chevauchée qui mène son contingent jusqu’au rivage de l'Atlantique ; sur le chemin, les tribus berbères sont bousculées violemment. On ne sait pas si cette expédition s'apparentait à une mission de reconnaissance, ou une razzia. Cependant, elle va provoquer de nombreux soulèvements berbères. Sur le retour, la colonne de ‘Uqba est attaquée par une armée que dirige Kusayla, et mise en déroute. Lors de cette bataille, qui portera le nom de Biskra, ‘Uqba est tué (il sera sanctifié, et son tombeau deviendra le premier monument musulman au Maghreb). Le soulèvement, qui rassemble des Berbères, islamisés ou non, et probablement des restes de l’armée byzantine, parviendra à occuper Kairouan; les Arabes évacuent l’Ifriqiya.
En Orient, le califat d’‘Abd al Malik débute en 685 jusqu'en 707 ; califat important, qui marque la fin provisoire des troubles politiques en Orient, et sous lequel seront menées des réformes de l’administration et du pouvoir). Celui-ci nomme Hassan Ibn Numan gouverneur au Maghreb, lequel mènera la reconquête en 686. Kairouan est reprise, Kusayla tué. Les Arabes prennent Carthage aux Byzantins.
En 701, Dihya surnommée la Kahina par ses ennemis, est vaincue et tuée. Cette femme berbère, fille du roi Thabet des Aurès, dirigeait la révolte des Berbères, entourée d’une aura mystique. Elle deviendra une icône de la résistance berbère. Dès 702, l'assise arabe est suffisante en Ifriqiya, pour envisager de nouvelles conquêtes.
En 705, Musa Ibn Nosseyr devient le premier gouverneur officiel du wilaya d'Ifriqiya[3]. Jusqu'en 713, s'opère une phase de contrôle de l’espace, jusqu’à Tanger ; le pouvoir se consolide.
En 711 est la date de l'achèvement officiel de la conquête ; les premiers contingents berbères passent en Andalousie, dirigés par Tariq ibn Ziyad. Ils débarqueront à Gibraltar (Jabal Tariq). À la phase d'organisation militaire de la conquête, va se substituer l’administration du territoire.
Notes et références
- ↑ Frédéric Soreau, L'Egypte, Editions Jean-paul Gisserot, , 125 p. (ISBN 2877475174, lire en ligne), p. 44
- ↑ (en) Atallah Mansour, Narrow Gate Churches: The Christian Presence in the Holy Land Under Muslim and Jewish Rule, Hope Publishing House, , 327 p. (ISBN 1932717021, lire en ligne), p. 103
- ↑ Habib Boularès et Jean Duvignaud, Nous partons pour la Tunisie, éd. Presses universitaires de France, 1978, p. 110 (ISBN 9782130355960)
Voir aussi
Articles connexes
- Histoire du Maghreb
- Histoire de l'expansion de l'islam
- Conquête musulmane de la péninsule Ibérique
Liens externes
Bibliographie
- Hichem Djaït, La fondation du Maghreb islamique, éd. Amal, Sfax, 2004
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