Pression de radiation
La pression de radiation (aussi appelée pression de rayonnement) est la pression exercée sur une surface exposée à un rayonnement électromagnétique. Elle a pour origine le transfert d'impulsion du photon lors de sa réflexion sur un corps. La pression de radiation de la lumière du Soleil sur un miroir est de l'ordre de bar[1]. Cette pression est très faible mais peut être mesurée par exemple avec un radiomètre de Nichols (alors que le radiomètre de Crookes qui l'a précédé, met en évidence les forces radiatives, beaucoup plus puissantes que les forces de pression de radiation [2]).
Si la pression de radiation agit sur d'assez petites particules elle peut être du même ordre de grandeur que leur attraction gravitationnelle, elle peut donc avoir un impact sur les processus macroscopiques et astrophysiques[1]. Par exemple, la chevelure des comètes est toujours dirigée dans la direction opposée au Soleil à cause de l'action de la pression de radiation exercée par ce dernier sur les poussières et particules formant la chevelure[1]. La queue de gaz (ou de plasma) des comètes a une courbure différente, car elle est entrainée par le vent solaire.
Cet effet fut déduit des expériences presque simultanées théoriques de James Maxwell (en 1871) et de Pyotr Lebedev (en 1900)[3] puis expérimentales d'Ernest Nichols et de Gordon Hull en 1901[4].
Expression
On peut montrer à l'aide de la théorie de l'électromagnétisme, la mécanique quantique ou la thermodynamique, en ne faisant aucune supposition sur la nature du rayonnement, que la pression P exercée sur une surface exposée à un rayonnement uniforme dans toutes les directions est égale à 2/3 de l'énergie cinétique rayonnée <K> par unité de volume V.
Soit :
Pour le rayonnement d'un corps noir en équilibre avec la surface exposée la puissance totale rayonnée par unité de surface selon la loi de Stefan-Boltzmann, vaut : ; avec : ; où σ est la constante de Stefan-Boltzmann et T est la température absolue du rayonnement.
En divisant cette puissance par la vitesse de la lumière c on obtient une énergie cinétique par unité de volume :
D'où l'expression de la pression de radiation :
Le facteur 2 vient du fait que l'énergie cinétique d'un photon s'écrit et non comme pour les particules matérielles.
Interprétation et applications
Le tiers de cette énergie égale à : 2,520×10-16T4 Pa×K4.
Par exemple, à la température d'ébullition de l'eau (373,15 K), cette pression vaut environ 5 micropascals, soit vingt fois moins qu'un milliardième de la pression atmosphérique.
Des pressions si faibles sont toutefois capables d'exercer des effets significatifs soit parce qu'elles s'exercent sur des particules très petites comme des pollens, microparticules, virus ou microbes en suspension ou des électrons, soit parce qu'elles s'exercent pendant un laps de temps très long, soit parce que la luminosité est très élevée comme avec les lasers de puissance ou par une température très élevée (cœur des étoiles), ou même à la surface des étoiles les plus lumineuses contrebalançant ainsi la gravité (limite d'Eddington).
La pression de radiation joue un rôle important dans la théorie de l'émission d'électrons par le Soleil, la compréhension du fonctionnement des étoiles, l'étude des comètes (voir aussi l'effet Yarkovsky et l'effet YORP) ainsi que d'autres processus astrophysiques.
Partie de la pression stellaire totale
Dans le cœur des étoiles, la température est très élevée : les modèles actuels prédisent une température de 15 MK à l'intérieur du Soleil, et au cœur des étoiles supergéantes la température pourrait excéder 1 GK.
Comme la pression de radiation augmente avec la quatrième puissance de la température, elle devient significative, voire prépondérante, à ces températures élevées.
Par exemple, dans le Soleil, la pression de radiation est encore faible (~ 100 Mbar) par rapport à la pression du gaz (~ 250 Gbar) mais dans des étoiles plus lourdes, donc plus chaudes, la pression de radiation devient la partie dominante de la pression totale.
Utilisations technologiques
Dans les années 1970 on apprend à manipuler des particules au moyen de cette force (la pression radiative)[5], y compris pour faire léviter des particules[6].
Dans les années 1980, on apprend à capturer des atomes[7], avant de notamment développer des pièges optiques[8] et manipuler des bactéries et des virus[9]
Parmi les usages envisagés par la science-fiction et les techniques d'exploration spatiale, les photovoiles sont une méthode possible de propulsion spatiale qui utiliserait comme force motrice la pression de radiation exercée par le rayonnement solaire sur une grande voile.
Depuis le milieu des années 1980, on utilise - de plus en plus couramment - la pression de radiation d’un laser focalisé pour manipuler, déplacer, trier des objets très petits particules, protéines, cellules, par exemple pour construire des moteurs moléculaires, des nanoconstituants ou manipuler des cellules (au moyen de pinces optiques (on parle de manipulation optique ou de micromanipulation optique) .
Acoustique
En acoustique, la pression de radiation est la pression unidirectionnelle due au passage d'une onde sonore.
Notes et références
- ↑ 1.0 1.1 1.2 H. Stocker, F. Jundt, G. Guillaume. Toute la Physique, Vottem (Herstal), DUNOD, 2007, 825, 1189.
- ↑ Colas G (2006). Piégeage et manipulation d'objets biologiques par guides d'ondes optiques Thèse de Doctorat, Université Joseph-Fourier-Grenoble I
- ↑ Lebedev P.N (1901) Untersuchungen ̈uber die druckr ̈afte des lichtes. Annalen der Physik , 6 :433–458,
- ↑ . Nicols E & Hull G.F (1903) The pressure due to radiation. Physical Review , 26(91) :104
- ↑ Ashkin A (1970). Acceleration and trapping of particles by radiation pressure. Physical Review Letters, 24(4) :156–159.
- ↑ . Ashkin A & Dziedzic J.m (1971) Optical levitation by radiation pressure. Applied Physics Letters , 19(8) :283–285.
- ↑ Ashkin A, Chu S, BjorkholmJ.E & Cable A (1986) Experimental observation of optically trapped atoms. Physical Review Letters , 57(3) :314–317.
- ↑ A. Ashkin (1997), Optical trapping and manipulation of neutral particles using laser. Proceedings of the National Academy of Sciences of the USA , 94 :4853–4860.
- ↑ Ashkin A & Dziedzic JM (1987) Optical trapping and manipulation of viruses and bacteria. Science , 235 :1517–1520.
Voir aussi
Bibliographie
- Block S.M (1990)Optical tweezers : a new tool for biophysics. Noninvasive techniques in cellbiology, pages 375–402
- Casner A (2002) Déformations, manipulations et instabilités d’interfaces liquides induites par la pression de radiation d’une onde laser. PhD thesis, Universite Bordeaux III, juin 2002
- Dienerowitz, M., Mazilu, M., & Dholakia, K. (2008). Optical manipulation of nanoparticles: a review. Journal of Nanophotonics, 2(1), 021875-021875.
- Grier D.G (2003) A revolution in optical manipulation. Nature, 424 :810–816
- Guck J, Ananthakrishnan R, Mahmood H, Moon T.J, Cunningham C.C & Käs J (2001) The optical stretcher: a novel laser tool to micromanipulate cells. Biophysical Journal, 81(2), 767-784.
- Harada Y & Asakura T (1996) Radiation forces on a dielectric sphere in the rayleigh scattering regime. Optics Communication, 124 :529–541 (http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/0030401895007539 résumé])
- Ke P.C & Gu M (1999) Characterization of trapping force on metallic mie particles. Applied Optics, 38 :160–167 (http://www.opticsinfobase.org/abstract.cfm?uri=ao-38-1-160 résumé])
- Svoboda K & Block S.M (1994) Optical trapping of metallic rayleigh particles. Optics Letters, 19 :930–932 (résumé)
- Yang A.H, Moore S.D, Schmidt B.S, Klug M, Lipson M & Erickson D (2009) Optical manipulation of nanoparticles and biomolecules in sub-wavelength slot waveguides. Nature, 457(7225), 71-75.
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