Haute mer

On désigne par eaux internationales ou par haute mer, ce dernier terme étant le seul employé en droit de la mer, les zones maritimes qui ne sont sous l'autorité d'aucun État (par opposition aux « eaux sous juridiction d'un État côtier »).

La haute mer est généralement considérée comme un « bien public mondial » couvrant environ la moitié de la surface planétaire et 64 % des océans. Toute revendication de souveraineté par un État y est illégitime. En 1982 à Montego Bay (Jamaïque) un cadre a défini des règles et une autorité pour l’exploitation des sol et sous-sols marin, mais pas encore pour la colonne d'eau et la pêche.
Un Appel de Paris pour la haute mer a été lancé afin qu'elle soit considérée comme « bien commun de l’humanité » et gérée comme tel, dans l’intérêt général.
Définition
La haute mer commence au-delà de la limite extérieure de la zone économique exclusive (ZEE), au maximum à 200 milles nautiques (370 km) de la côte.
Aspects juridiques
Le principe de la liberté y prévaut : liberté de navigation, de survol, de pêche, de recherche scientifique, de poser des câbles et des pipelines, de construire des îles artificielles, dans le respect des conventions internationales en vigueur. Toutefois, si le plateau continental s'étend au-delà de 200 milles (370 km), l’État côtier dispose de droits souverains relatifs à l’exploitation et l’exploration des ressources naturelles des fonds marins et de leur sous-sol, à l’exclusion des eaux surjacentes, jusqu'au rebord externe du plateau continental, ou au plus jusqu'à 350 milles (648 km). Au-delà de cette dernière limite s'étend la zone internationale des fonds marins qui échappe à toute appropriation et doit être uniquement utilisée « à des fins exclusivement pacifiques » et exploitée « dans l’intérêt de l’humanité tout entière ».
La communauté internationale se mobilise peu à peu pour envisager des voies nouvelles au vu d'une gestion durable de la haute mer et de ses ressources[1].
Le seul ordre juridique qui s’applique en haute mer est celui des autorités de l’État dont le navire bat le pavillon.
Cependant :
- l’État côtier dispose d’un droit de poursuite en haute mer, lorsque la poursuite a commencé dans une zone relevant de la juridiction de l’État poursuivant ;
- obligation est faite, en haute mer :
- de prêter assistance et secours à quiconque en péril ;
- aux États de réprimer et de coopérer à la répression de la piraterie, du transport d'esclaves, du trafic de stupéfiants et des émissions de radio-électriques interdites[2].
- les conventions internationales se sont multipliées pour règlementer la pêche en haute mer, pour la protection d’espèces spécifiques (baleine, thon) ou même en 1995 à propos des stocks chevauchants (les ressources halieutiques qui sont à cheval sur la ZEE et sur la haute mer) et dans ce cas, vers une extension des compétences de l’État côtier.
Perspectives
La communauté internationale, et certains pays (dont la France, dans le cadre du Grenelle de la mer notamment), évoque le besoin d'outils de connaissance (exploration in situ, suivi satellital), surveillance, contrôle pour une meilleure gouvernance de la pêche, de la biodiversité et de la sécurité en mer, ainsi que pour la protection de ressources naturelles pas, peu, difficilement ou coûteusement renouvelables, au-delà des zones de juridiction nationale.
Un groupe de travail sous l'égide de l'ONU propose une meilleure protection de la biodiversité et des ressources halieutiques en haute-mer[3].
Appel de Paris pour la haute mer
En avril 2013 a été lancé[4] afin qu'elle soit considérée comme « bien commun de l’humanité » et gérée comme tel, dans l’intérêt général selon les auteurs de cet appel. Il s'agit aussi de soutenir le travail de l’Assemblée générale des Nations unies qui dans le cadre de la Convention des Nations unies sur le Droit de la Mer prépare des négociations visant à mettre en œuvre un instrument international de protection de la biodiversité en haute mer[5].
Les signataires de l'appel considèrent que seule une « gouvernance internationale partagée, transparente, démocratique » pourra sauver la haute mer de la surexploitation et de la pollution. Sa vision est utilitariste (ex : « (...)Proposons que l’Autorité Internationale des Fonds Marins soit partie prenante à la gestion des ressources de la Haute Mer, en particulier les ressources génétiques marines (en lui donnant les moyens d’exercer opérationnellement ses missions) »[5].
Les signataires souhaitent aussi le développement des aires marines protégées et estiment « que la Haute Mer n’est pas seulement l’affaire des spécialistes et professionnels, mais qu’elle est au cœur de la survie de l’humanité et concerne chacun d’entre nous. Avec gravité, confiance et détermination, nous pensons qu’elle est le lieu évident d’une coconstruction pacifique et exemplaire des États, qui doivent proposer aux générations futures une « économie bleue » innovante, basée sur le respect des écosystèmes et des droits humains. Refonder le rapport des hommes à la Haute Mer est essentiel pour contribuer au développement humain, ainsi qu’à la résilience de la planète et de son climat »[5].
Notes et références
- ↑ Gouvernance de la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales: enjeux et perspectives, J. Rochette et R. Billé, Idées pour le débat, n°04, 2008, Institut du développement durable et des relations internationales.
- ↑ Art. 98 à 109 de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.
- ↑ Actu environnement, Biodiversité : vers un cadre juridique pour la protection des eaux internationales ? JUin 2011
- ↑ Appel pour la Haute mer Le Monde, 12.04.2013
- 1 2 3 lahautemer.org, L'appel de Paris pour la Haute mer, consulté 2013-05-09
Voir aussi
Articles connexes
- Eaux territoriales
- Océan
- Mer
- Large
- Acidification des océans
- Déchet en mer
- Abysse
- Montée des océans
- Aire marine protégée
- Pêche, surpêche
- Corridors biologiques sous-marins
- Droit de la mer
- Grenelle de la mer
- Munitions immergées
- Marine de haute-mer
Bibliographie
- (en) Raphaël Billé et Julien Rochette, « Governance of marine biodiversity beyond national jurisdictions : issues and perspectives », Ocean & Coastal Management, no 51, (lire en ligne).
- Lucien Chabason, Raphaël Billé et Julien Rochette, « La haute mer oubliée », Courrier de la planète, no 86, (lire en ligne).
- « Vers une nouvelle gouvernance de la biodiversité en haute mer », Idées pour le débat, no 8, (lire en ligne).
- Julien Rochette, « Haute mer : l'état d'urgence », Mer et littoral, no 75, .
- Raphaël Billé et Julien Rochette, « Gouvernance de la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales : enjeux et perspectives », Idées pour le débat, no 4, .
- Gwenaele Proutière-Maulion et Jean-Pierre Beurier, « Quelle gouvernance pour la biodiversité marine au-delà des zones de juridiction ? », Idées pour le débat, no 7, .
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