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Embâcles naturels

Embâcles naturels

Page d'aide sur l'homonymie Pour l’article homonyme, voir Embâcle. 
Article général Pour un article plus général, voir Barrage naturel.
Embâcle naturel, lieu de mise bas de salamandres (Salamandra salamandra) en forêt domaniale de Clairmarais (France)

Un embâcle naturel est une accumulation naturelle de matériaux apportés par l'eau (exceptionnellement par un glissement de terrain) ; Il peut s'agir d'accumulation de matériaux rocheux issus de l'érosion, de branches mortes, de plantes aquatiques, de feuilles mortes, de sédiments, de bois flottés ou embâcle de glace (au moment de la débâcle).

La formation des embâcles puis leurs éventuelles ruptures jouent un rôle majeur dans la vie d'un cours d'eau notamment dans les zones de plaine alluviale (et/ou de confluence notamment pour les embâcles constitués de glace[1]). Ces embâcles contribuent à la formation de zones de sédimentation, de bancs de galets, sable ou gravier, et en réaction de nouvelles zones d'affouillement avec parfois production de méandres, de tresses, d'îlots favorables à la biodiversité et au ralentissement du flux sédimentaire.

Souvent l'accumulation de bois se forme à partir d'une courbe, d'un point d'appui (roches) ou d'un arbre tombé en travers d'une rivière, d'un ancien barrage de castor, etc. et elle sera contournée par la rivière, en favorisant notamment les espèces pionnières dans le nouveau cours et secondaires et de milieux mûrs ailleurs[1].

Les embâcles naturels sont souvent emportés par les crues après quelques mois ou années, mais ils peuvent alors souvent contribuer à reconstituer d'autres embâcles plus en aval.

Parfois, il se stabilisent pour former de structures géomorphologiques relativement pérennes, complexifiant alors le lit (méandrage).

Pour les embâcles uniquement constitués de glace, voir aussi l'article « embâcle de glace ».

Enjeux

Les embâcles de bois quand ils sont naturels, sont bénéfiques pour les écosystèmes aquatiques, mais ils souvent considérés comme gênant pour et par les riverains ou utilisateurs de cours d'eau[2]. Les embâcles quand ils sont naturels ont un grand intérêt écologique. Tant qu'ils sont d'une taille modeste, étant plus perméables que les barrages et seuils de béton, de nombreux poissons et autres organismes peuvent les franchir, toute l'année ou en saison d'inondation ou à l'occasion de crues).

Mais comme ils peuvent s'accumuler sous un pont ou un ponceau ou un goulot d'étranglement de cours d'eau et y constituer un seuil plus ou moins permanent, ils peuvent aussi faire obstacle à tout ou partie de l'écoulement d'un cours d'eau (avec risque de débordements du lit mineur en amont de l'embâcle. Ils peuvent aussi gêner la navigation, le fonctionnement de vannages ou de turbines et l'écoulement de l'eau au lieu de l'embâcle ou en aval quand l'embâcle se délitera. Dans les pays froids, la rupture d'un gros embâcle de glace peut être source d'une violente arrivée d'eau, que l'on cherche à mieux comprendre[3], à anticiper et donc à modéliser[4],[5],[6].

Des arbres entiers peuvent arriver jusqu'en mer où, s'ils ne s'échouent pas sur le littoral, ils finissent par couler et former un habitat spécifique pour de nombreuses espèces.

Fonctions écosystémiques

Les embâcles présentent l'intérêt d'être :

  • une forme perturbation écologique naturelle et locale, source d'hétérogénéisation du cours d'eau, dont par différentiation des vitesses d'écoulement et d'accumulation locale (en amont du barrage) de matière organique et de sédiments plus légers ;
  • une initiation éventuelle d'un îlot ou d'un méandre (qui vont éventuellement durablement contribuer à la diversification et à l'évolution naturelle du cours d'eau) ;
  • une source de bois-mort qui est un habitat naturel support de croissance pour le périphyton qui alimente de nombreuses espèces. Le bois mort forme aussi des caches et refuges importants pour certaines espèces, au moins à certains stades de leur développement, dont par exemple pour de nombreux invertébrés et/ou leur larves, certains alevins, certaines écrevisses (dont l'écrevisse à pattes blanches, désormais menacée de disparition en France). L'artificialisation des cours d'eau est souvent associée à la suppression des embâcles et d'autres refuges, ce qui aggrave les problèmes rencontrés par les écrevisses autochtones : Une étude française (2002) a porté sur l'importance de la disponibilité en refuges pour l'écrevisse à pattes blanches dans 4 sections d'un ruisseau, en testant les effets de l'apport de refuges dans le cadre d'un suivi régulier de la démographie de l'espèce dans ce ruisseau, en mesurant tout le long du ruisseau la qualité de l'eau, la vitesse de courant, la profondeur et la présence ou absence de refuges. L'étude a conclu que « seule la présence des abris disponibles pour les écrevisses était corrélée avec la présence d’individus tout au long du cours d’eau, tandis que la colonisation des zones expérimentales était liée à leur exposition au soleil et à la vitesse du courant. Malgré un fort taux de croissance présumé et la capacité à atteindre localement de fortes densités, la population s’est révélée fragmentée »[7]
  • source d'augmentation locale du volume et de la hauteur d'eau (effet « retenue »), et par suite une meilleure alimentation de la nappe[8] (Cf. Loi de Darcy selon laquelle plus il y de hauteur d'eau, mieux l'eau percolera dans le substrat, s'il est perméable ). Quand les nappes sont bien alimentées, les sources le sont également, au profit des salmonidés par exemple ;
  • parfois, élément de gué pour la faune sauvage, permettant à des espèces n'appréciant pas le contact avec l'eau de traverser le cours d'eau ;
  • offre en cachettes pour l’ichtyofaune et notamment pour les alevins, qui y trouveront aussi parfois une nourriture abondante ;
  • postes de gué ou de repos pour des oiseaux piscivores tels que hérons ou aigrettes, martin pêcheur, cincle plongeur ;
  • lieu de colonisation et de vie par des espèces pionnières (aulnes, saules), éventuellement menacées (telles que le peuplier noir dans le nord de la France) ;
  • lieu de nidification pour certaines espèces (canards, poules d'eau, troglodyte mignon...) quand le volume de matériau est assez important ;
  • départ de barrage pour un groupe de castors ;
  • « frein » naturel, aux inondations en aval, et aux sécheresses en amont si ces embâcles sont assez nombreux

etc.

Inconvénients

Dans les milieux anthropisés, ils peuvent constituer des réserves d'eau (hauteur d'eau) indésirables pour les riverains, ou risquer d'être emportés par une crue et contribuer à faire un bouchon sur le cours d'eau artificialisé (sous un pont trop étroit, dans un siphon, ou un barrage). Des embâcles de matériaux naturels tendent à se former aux niveau des vannages de barrages ou de prise d'eau.

Les embâcles qui se forment au niveau des piles de ponts lors des crues des rivières et des fleuves peuvent être particulièrement dangereux pour deux raisons : d'une part, s'ils sont importants, ils contribuent à augmenter le niveau de l'eau en amont, ce qui provoque une augmentation de la poussée de l'eau sur les piles, pouvant aller jusqu'à leur destruction ; d'autre part, que ce soit par destruction naturelle de l'embâcle, ou par destruction des piles, le volume d'eau libéré brutalement va créer une vague qui peut provoquer de gros dégâts en aval. Ceci est particulièrement dangereux dans les bassins versants susceptibles de recevoir de très fortes pluies, en particulier dans les bassins soumis aux épisodes cévenols. La pratique consistant à laisser en place sur les pentes de ces bassins versants les bois morts abattus devrait être adaptée tout particulièrement dans ces bassins.

Dans tous ces cas, il convient alors de surveiller constamment les embacles. Parfois, par précaution, ils sont détruits pour rétablissement des capacités d'écoulement.

Bonnes pratiques

Comme pour les laisses de mer, les collectivités et agences de l'eau recommandent maintenant de les conserver dans la mesure du possible. Dans les zones où des habitations ou infrastructures riveraines risquent de subir des inondations dues à de ces embâcles, il convient donc de les surveiller, et éventuellement en maitriser l'ampleur. « L’enlèvement naturels doit donc être réfléchi et ne doit en aucun cas devenir systématique » explique un guide à l'attention de collectivités[9]. Bien entendu, les encombrants, déchets verts, plastiques et objets dangereux ou polluants peuvent et doivent être retirés de l'embâcle[9]. On recommande parfois même là où cela ne pose pas de problème (en forêt par exemple[10]) de restaurer des embâcles rocheux et de bois[10]

Pour des raisons de lutte contre les crues, pour des raisons « touristiques » et pour sécuriser certains loisirs (ex pratique du Canoe-kayak dans certaines gorges fréquentées ou dangereuses, certains embâcles (arbres tombés notamment) sont volontairement détruits au fur et à mesure qu'ils se forment (par exemple dans les Gorges du Gardon[11], malgré leur intérêt écopaysager. L'équilibre entre la destruction, la protection et la restauration d'embâcles est parfois difficile à trouver[12],[13].

Les documents de gestion de certains sites Natura 2000 incluent un « enlèvement raisonné des embâcles »[14]

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • Revue de la FFAM Moulins de France, divers articles, voir index

Bibliographie

  • Bergeron N & Roy AG (1988) Les effets d’un embâcle sur la morphologie du lit d’une confluence de cours d’eau. Géographie physique et Quaternaire, 42(2), 191-196 ;DOI:10.7202/032725ar ; PDF, 7 pp
  • Guyon E, Hulin JP & Petit L (2001) Hydrodynamique physique – Savoirs actuels, CNRS éd., EDP Sciences
  • Hug M (sous la direction de) (1975) mécanique des fluides appliquée aux problèmes d’aménagement et d’énergétique – Eyrolles,
  • Landau LD, Lifchitz EM (1994), Mécanique des fluides – éd. Mir, 1989, 1994, traduction éd. Ellipses
  • Lépy É (2003) Mise en valeur de l'espace marin de la Baltique: Étude comparative des interactions entre les processus d'embâcle et de débâcle et les sociétés, dans l'espace littoral des Golfes de Botnie, de Finlande et de Riga (Doctoral dissertation).
  • Pour la science, juin 1981, p. 139-145 : Ressaut hydraulique
  • Rieutord M (1997) Une introduction à la dynamique des fluides – Masson

Références

  1. 1 2 Bergeron N & Roy AG (1988) http://www.erudit.org/revue/GPQ/1988/v42/n2/032725ar.pdf Les effets d’un embâcle sur la morphologie du lit d’une confluence de cours d’eau]. Géographie physique et Quaternaire, 42(2), 191-196 PDF, 7 pp.
  2. Maridet L, Piégay H, Gilard O & Thévenet A (1996). L'embâcle de bois en rivière: un bienfait écologique? un facteur de risques naturels ? La Houille Blanche, (5), 32-37 (résumé).
  3. ex : Bourdin T (2003) Étude d'embâcle/débâcle de la Grande Eau en relation avec le glissement de la Frasse (Vaud, Suisse) (No. GEOLEP-STUDENT-2003-002).
  4. Shen HT (2002) "Development of a comprehensive river ice simulation system" 16th IAHR International Symposium on Ice, International Association of Hydraulic Engineering and Research, Dunedin, New Zealand
  5. White KD (2003) Review of prediction methods for breakup ice jams. Canadian Journal of Civil Engineering, 30(1), 89-100 (résumé).
  6. Nolin S (2008) Modélisation "smoothed particle hydrodynamics" de la formation d'un embâcle fluvial et de son relâchement (Doctoral dissertation, Université Laval)
  7. Broquet T, Thibault M & Neveu A (2002) Distribution and habitat requirements of the white-clawed crayfish, Austropotamobius pallipes, in a stream from the Pays de Loire region, France: an experimental and descriptive study. Bulletin Français de la Pêche et de la Pisciculture, (367), 717-728, PDF, 12 pages.
  8. Bilby, R.E., and G.E. Likens. 1980. Importance of debris dams in the structure and function of stream ecosystems. Ecology 61:1107-1113
  9. 1 2 Commune de Theux (Wallonie), Note sur la présence des embâcles naturels destinée aux services municipaux, consultée 2007-07-27
  10. 1 2 ONF Plaquette" truite", consulté 2012-07-27
  11. SMAGE des Gardons, Schéma général de gestion des embâcles et atterrissements
  12. Sevrin E., 2006, Gérer les forêts de bord de cours d'eau…ou non, in Notre Forêt no 37, p. 7
  13. Rameau J.C., Gauberville C., Drapier N., 2000, Gestion forestière et diversité biologique, Identification et gestion intégrée des habitats et espèces d’intérêt communautaire, France, Domaine Atlantique, IDF, ENGREF, ONF, classeur : un livret, 140 fiches "habitat" et 49 fiches "espèce"
  14. Document d'objectifs Site Natura 2000 "Massifs forestiers 88 et rivières du Pays-Fort" - 2007
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