Direction centrale des Renseignements généraux
La Direction centrale des Renseignements généraux (DCRG), souvent appelée Renseignements généraux (RG), était un service de renseignement français dépendant de la Direction générale de la Police nationale (DGPN). Créés en 1907 sous cette appellation, les RG ont eu pour principal objectif de renseigner le gouvernement sur tout mouvement pouvant porter atteinte à l'État.
Par sa nature du secret et de la surveillance, les RG ont été accusés à plusieurs reprises d'être une police politique[1] et ont été au centre de plusieurs affaires.
Dans un but de rationalisation, les RG et la Direction de la surveillance du territoire (DST) fusionnent le 1er juillet 2008, pour devenir la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), et forment à ce titre le plus important service de renseignement intérieur français[2]. Une partie de ses prérogatives est par ailleurs confiée à la nouvelle Sous-direction de l'information générale (SDIG), créée au sein de la direction centrale de la sécurité publique (DCSP), la branche « courses et jeux » des RG étant, quant à elle, transférée à la direction centrale de la Police judiciaire (DCPJ).
Alors que la réforme de 2008 avait dissout les Renseignements généraux et dispersé ses effectifs dans différentes administrations, en décembre 2014, le gouvernement Valls a reformé un service des renseignements généraux appelé "Service central de renseignement territorial" (SCRT) chargé de renseigner le gouvernement sur l'état de l'opinion et les mouvements sociaux. Le rapport parlementaire précise selon plusieurs sources que "les renseignements recherchés concernent tous les domaines de la vie institutionnelle, économique et sociale susceptibles d'entraîner des mouvements revendicatifs ou protestataires"[3].
En outre, les contestations relatives aux ZAD sont l'une des motivations de cette régénération des Renseignements généraux comme l'indique l'allocution du 17 juin 2013 du ministre de l'Intérieur Manuel Valls en ces termes : "Parallèlement, d'autres menaces doivent être prises en considération, comme celles issues de certains mouvements contestataires animalistes, environnementalistes, anti-nucléaire."[4]
Histoire
Les Renseignements généraux puisent leurs racines dans le corps des commissaires spéciaux chargés sous l'Ancien Régime de surveiller l'opinion[5].
Peu après la création en 1907 des Brigades du Tigre — qui devinrent la Police judiciaire — est créée par Célestin Hennion une Brigade des Renseignements généraux. La création d'un tel service s'inscrit dans un climat politique tendu, où la Troisième République fait l'objet de virulentes critiques de divers courants d'oppositions : des royalistes, bonapartistes, des boulangistes, des anarchistes, ou encore divers courants révolutionnaires socialistes[6].
À l'arrivée du Front populaire, ce dernier veut centraliser encore davantage les services de renseignement français, et crée à ce titre en 1937 la Direction des services de renseignements généraux et de la police administrative, qui devient l'année suivante l'Inspection générale des services de renseignements généraux et de la police administrative[7]. Mais un manque de financement met à mal les ambitions de ce nouveau service de renseignement[6] chargé de traquer, à partir de l'entrée en guerre contre l'Allemagne, les membres du Parti communiste alors interdit en France.
L'instauration du régime de Vichy, durant la Seconde Guerre mondiale, voit la réorganisation de la police, et la création, à partir des services des RG, des Brigades spéciales (BS), chargées de collaborer avec les diverses polices nazies (Abwehr, Gestapo, Kripo, Sipo, SD, GFP). Les Brigades spéciales sont spécialisées dans la traque aux « ennemis intérieurs », aux dissidents, aux prisonniers évadés, aux Juifs, et plus tard, aux réfractaires au service du travail obligatoire (STO).
La fin de la Seconde Guerre mondiale voit la conservation du service de renseignement de la « vie politique, économique et sociale » du pays — avec la surveillance, entre autres, des hippodromes et des établissements de jeux, lieux par excellence où transite beaucoup d'argent[6].
Les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale sont très tendues, avec le début de la Guerre froide, les conflits coloniaux, et surtout les violences issues de la Guerre d'Algérie — mais aussi, divers mouvements sociaux : ainsi, ceux de Mai 68.
Le service des RG a fusionné avec la Direction de la surveillance du territoire (DST) le pour devenir la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI)[8]d'un côté et la Sous direction de l'Information Générale de l'autre. Environ 80 % du personnel a été affecté à la DCRI, la branche « courses et jeux » de la DCRG étant transférée à la direction centrale de la Police judiciaire (DCPJ) au sein d'un Service central des courses et jeux (SCCJ). Quant à la Préfecture de police de Paris, sa direction des Renseignements généraux (RGPP), historiquement très particulariste, est demeurée autonome par rapport à cette nouvelle DCRI et s'est vue rebaptiser Direction du Renseignement de la Préfecture de Police de Paris (DRPP).
La sous direction de l'Information générale créée en 2008 devient le Service Central du Renseignement Territorial en mai 2014, toujours rattaché à la Direction Centrale de la sécurité Publique. Ses missions sont identiques à celles des anciens RG mais elle ne traite plus les affaires de terrorisme. Un certain nombre de gendarmes sont également détachés dans ces services.
Fin 2009, une réflexion est engagée au Ministère de l'Intérieur sur la possibilité de créer une nouvelle Direction du renseignement sur le modèle des anciens RG, qui pourrait être composée à parité de policiers et de gendarmes[9].
Organisation
La DCRG, avec ses directions zonales, régionales, départementales et ses services d'arrondissement, était forte d'environ 3 450 fonctionnaires, RG-PP exclus (680 hommes), et était divisée en 2007 en quatre sous-directions :
- la sous-direction de la Recherche, comprenant notamment la SNRO, Section nationale de recherches opérationnelles (environ 120 hommes), chargée de la surveillance des groupes à risque, en particulier terroristes ;
- la sous-direction de l'Analyse, de la Prospective et des Faits de société ; elle comportait une section surveillant la presse et une section surveillant les activités des partis politiques[10].
- la sous-direction des Ressources et Méthodes ;
- la sous-direction des Courses et des Jeux (environ 120 hommes).
Il existait une huitième section, Enquêtes et Habilitations, située rue aux Ours, Paris 3e.
Les membres des RG étaient assujettis au régime général des fonctionnaires. Ils ne bénéficiaient pas des garanties offertes aux agents de la direction de la surveillance du territoire couverts par le secret défense (l'anonymat notamment), ce qui n'empêchait pas certains d'être néanmoins habilités, les dossiers étant parfois classés.
Bien que tous les fonctionnaires de la police nationale aient eu une qualification judiciaire (APJ ou OPJ), les agents travaillant aux Renseignements généraux perdaient leur habilitation tant qu'ils exerçaient dans cette direction, à l'exception de ceux appartenant à la sous-direction des jeux et casinos.
Directeurs ou responsables sommitaux
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Directeur
Début de service | Fin de service | Grade | |
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Jean France | 1907 | 1913 | Chef du service des renseignements généraux de police administrative |
Auguste Moreau | 1913 | 1917 | Contrôleur général des services de police administrative |
Antoine Pierrette | 1917 | 1927 | Contrôleur général, chargé de la direction des services de police administrative |
Charles Allec | 1927 | 1933 | Contrôleur général, chargé de la direction des services de police administrative |
Paulin Profizy | 1933 | 1937 | Contrôleur général, chargé de la direction des services de police administrative |
Jacques Chevreux | 1937 | 1938 | Directeur des renseignements généraux |
Léon Blanc | 1938 | 1941 | Inspecteur général des services de police administrative |
Léon Blanc | 1941 | 1941 | Inspecteur général, chef du service des renseignements généraux |
André Boutemy | 1941 | 1942 | Intendant de police, chargé des fonctions de chef des renseignements généraux |
André Boutemy | 1942 | 1943 | Directeur des renseignements généraux |
Paul Escandé | 1943 | 1944 | Directeur de la sécurité générale et des renseignements généraux (commissariat à l'Intérieur) |
Germain Vidal | 1944 | 1951 | Directeur des renseignements généraux |
Georges Moulins | 1951 | 1955 | Directeur des renseignements généraux |
Jean-Émile Vié | 1955 | 1961 | Directeur des renseignements généraux |
Jules Plettner | 1961 | 1963 | Directeur des renseignements généraux |
Henri Boucoiran | 1963 | 1968 | Directeur des renseignements généraux |
Jacques Lenoir | 1968 | 1969 | Directeur des renseignements généraux |
Jacques Lenoir | 1969 | 1971 | Directeur central des renseignements généraux |
Louis Morel | 1971 | 1972 | Directeur central des renseignements généraux |
Eugène Camata | 1972 | 1974 | Directeur central des renseignements généraux |
Marc Buchet | 1974 | 1977 | Directeur central des renseignements généraux |
Raymond Cham | 1977 | 1981 | Directeur central des renseignements généraux |
Paul Roux | 1981 | 1983 | Directeur central des renseignements généraux |
Pierre Chassigneux | 1983 | 1986 | Directeur central des renseignements généraux |
Philippe Massoni | 1986 | 1988 | Directeur central des renseignements généraux |
Jacques Fournet | 1988 | 1990 | Directeur central des renseignements généraux |
Jean-Jacques Pascal | 1990 | 1992 | Directeur central des renseignements généraux |
Yves Bertrand | 1992 | 1994 | Chef du service central des renseignements généraux |
Yves Bertrand | 1994 | 2004 | Directeur central des renseignements généraux |
Pascal Mailhos | 2004 | 2006 | Directeur central des renseignements généraux |
Joel Bouchité 2006 à 2008 |
Critiques et affaires
Les dossiers des poursuites contre des nationalistes corses, comme celui de l'affaire du préfet Érignac et des poursuites contre Yvan Colonna, et contre des nationalistes bretons dans l'affaire de Plévin, amenèrent régulièrement des critiques contre le travail de la Direction centrale des renseignements généraux[réf. nécessaire].
Notes et références
- ↑ (fr) « Renseignements généraux : la fin d'un service de police controversé en France », Presse canadienne, (consulté en ).
- ↑ Le décret n° 2008-609 du 27 juin 2008 (J.O. 28 juin) entérine la fusion et fixe la mission de la nouvelle direction
- ↑ « Le gouvernement recrée les Renseignements généraux pour mieux suivre les conflits sociaux », sur bfmbusiness.bfmtv.com, (consulté le 10 janvier 2015)
- ↑ « Réformes du renseignement / Interventions du Ministre », sur www.interieur.gouv.fr, (consulté le 10 janvier 2015)
- ↑ (fr) Jean-Marc Berlière et Marie Vogel, « Aux origines de la police politique républicaine », Criminocorpus (CNRS), 2008 (consulté en ).
- 1 2 3 (fr) « Historique des Renseignements Généraux », Ministère de l'intérieur, (consulté en ).
- ↑ (fr) « Renseignements généraux », sur Politique.net (consulté en ).
- ↑ (fr) <span class="ouvrage" id="Fusion des "RG" et de la DST le 1er juillet">Sophie Louet, « Fusion des "RG" et de la DST le 1er juillet », L'Express, (consulté en ).
- ↑ "Bientôt de nouveaux RG ?", Jean-Pierre Thiollet, France Soir, vendredi 25 décembre 2009
- ↑ L'Express, 10 novembre 2010, p. 44, je ne suis pas le chef des barbouzes, entrevue de Frédéric Péchenard propos recueillis par Jean-Marie Pontaut.
Bibliographie
- Lucien Aimé-Blanc et Jean-Michel Caradec'h, L'Indic et le commissaire, Éditions Plon, Paris, avril 2006 (ISBN 2-2591-9848-1)
- Frédéric Couderc, Les R.G. sous l'occupation. Quand la police française traquait les résistants, Éditions O. Orban, Paris, 1992
- Jean-Louis Loubet del Bayle, Police et politique. Une approche sociologique, Paris, L'Harmattan, 2006
- Patrick Rougelet, RG, la machine à scandales, Éditions Albert Michel
- Yves Bertrand, Je ne sais rien mais je dirai presque tout, Éditions Plon 2006
Voir aussi
Articles connexes
- Bureau des affaires réservées
Lien externe
- Société française d'histoire de la police
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