Scala naturæ
La scala naturæ, signifiant littéralement l'« échelle des êtres » mais souvent traduite par « chaîne des êtres » ou « grande chaîne de la vie », est une conception classique, datée de l'époque médiévale, de l'ordre de l'univers, dont la principale caractéristique est la stricte hiérarchie entre les niveaux.
C'est une conception de la structure du monde relayée par des savants européens comme Copernic et particulièrement en vogue à l'époque de la Renaissance.
La classification du monde selon la scala naturæ
La scala naturae est composée d'un grand nombre de liens hiérarchiques, des éléments les plus fondamentaux et simples jusqu'à la plus haute perfection, Dieu.
Classification centrale
Dans l'ordre naturel, la terre (rochers) est à la base de la chaîne ; ces éléments ne possèdent que l'attribut de l'existence. En montant d'un niveau, on garde les acquis des niveaux inférieurs, tout en ajoutant au moins un nouvel attribut positif. Les rochers, en tant qu'éléments les plus bas sur la chaîne, ne possèdent que l'existence ; au niveau supérieur, les plantes, possèdent la vie et l'existence. Les animaux possèdent non seulement le mouvement, mais aussi l'appétit. dans "L’encyclopédie du savoir relatif et absolu", Bernard Werber assimille les niveaux de conscience a des chiffres allant de 1 a 7 en reprenant la symbolique des chiffres indiens.
Dieu, et les anges sous lui, existent sous formes d'esprits, assis en haut de la chaîne, et s'opposent à la chair terrestre, faillible et mutable. En effet, l'esprit reste inchangé et permanent. La notion de permanence est cruciale pour comprendre cette conception de la réalité : on n'abandonne pas sa place dans la chaîne pour gagner un autre niveau. C'est non seulement impensable, mais généralement impossible (une roche ne devient pas une plante, comme un homme ne peut devenir un ange). Une exception peut être cependant faite en alchimie, où les alchimistes tentent de transformer des éléments de base, comme le plomb en des éléments supérieurs comme l'argent ou plus souvent l'or, l'élément le plus élevé.
Subdivisions
Les anges
Les anges par exemple sont divisés et classés, après les travaux du théologien Pseudo-Denys l'Aréopagite, en archanges, séraphins, et chérubins entre autres.
Les hommes
Dans la société féodale médiévale, le roi est au sommet de la chaîne, suivi par les seigneurs puis finalement les paysans en dessous d'eux. La position du roi au sommet de l'ordre social de l'humanité est consolidée par la doctrine du roi de Droit divin.
Dans la famille, le père est au sommet de la maisonnée, suivi par sa femme et finalement leurs enfants. Les enfants eux-mêmes peuvent être divisés, les garçons situés au-dessus des filles.
Les animaux
Les animaux peuvent aussi être subdivisés. À leur tête, les animaux sauvages, qui sont si supérieurs aux autres qu'ils ne peuvent être entraînés ni domestiqués. En dessous d'eux, les animaux domestiques, eux-mêmes divisés en animaux utiles (chiens ou chevaux) supérieurs aux créatures dociles comme les moutons. Les oiseaux sont également subdivisés, les aigles étant par exemple supérieurs aux pigeons. Les poissons viennent en dessous des oiseaux, et sont subdivisés entre poissons réels[réf. nécessaire] et autres créatures marines abhorrées, citées dans la Bible. En dessous, les insectes, avec des insectes utiles, comme les araignées[réf. nécessaire] ou les abeilles, ainsi que les jolies créatures, comme les coccinelles ou les libellules au sommet et les insectes désagréables comme les mouches ou les scarabées en dessous. À la base du secteur des animaux, on retrouve les serpents, relégués à cette position par punition pour le rôle joué dans le péché originel au Jardin d'Eden.
Les plantes
En dessous des animaux, vient la division des plantes, elles-mêmes subdivisées. Les arbres sont au sommet, avec des arbres utiles comme le chêne tout en haut. Les plantes comestibles comme les céréales et les légumes sont elles aussi subdivisées : au plus bas, les mousses et champignons méprisés, les légumes souterrains sont des plantes de mortification alimentaire ou de pénitence, les légumes poussant au ras du sol ont quelques vertus alimentaires et médicinales[1].
Le monde minéral
À la base de la chaîne on retrouve les minéraux. Au sommet de cette section, on retrouve les métaux (eux-mêmes subdivisés avec l'or à leur tête), les roches (avec le granit et le marbre au sommet), le sol (subdivisé en sols riches en nutriments et en sols pauvres), sable, graviers, poussière, et déchets. Une référence à la scala naturæ subsiste encore aujourd'hui dans la langue anglaise, qui possède l'insulte "lower than dirt" (plus bas que la terre), qui réfère à la place donnée a la terre ( le sol) à la base de la Chaîne.
Philosophie de la scala naturæ
L'homme possède une place particulière dans cette conception. Il possède une chair mortelle, comme les niveaux inférieurs, mais aussi un esprit. Dans cette dichotomie, la lutte entre la chair et l'esprit devient une lutte morale. La voie spirituelle est supérieure, plus noble, et rapproche de Dieu. Les désirs de la chair font chuter d'un étage, vers la bestialité. La chute de Lucifer, reportée dans la religion chrétienne, est particulièrement terrible, parce que cet ange, entièrement fait d'esprit, défia Dieu, l'ultime perfection.
Bibliographie
- Arthur Lovejoy: The Great Chain of Being: A Study of the History of an Idea, (1936) ISBN 0-674-36153-9
- E. M. W. Tillyard: The Elizabethan World Picture (1942)
- William F. Bynum, "The Great Chain of Being after Forty Years: An Appraisal", History of Science 13 (1975): 1-28
Références
- ↑ Florent Quellier, « Le concombre et quelques autres : périls et séduction », émission Concordance des temps sur France Culture, 16 juillet 2011
Liens externes
- Dictionary of the History of Ideas – Chain of Being
- The Great Chain of Being reflected in the work of Descartes, Spinoza & Leibniz Peter Suber, Earlham College, Indiana
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