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Champ magnétique terrestre

Champ magnétique terrestre

Le champ magnétique terrestre, aussi appelé bouclier terrestre, est un immense champ magnétique qui entoure la Terre, de manière non uniforme du fait de son interaction avec le vent solaire.

Variation modélisée du champ magnétique terrestre face à une tempête de « vent solaire »
Champ magnétique terrestre mesuré en juin 2014 par la sonde Swarm (ESA/DTU Space).

Origine

Article détaillé : Dynamo terrestre.

Le champ magnétique de la Terre est engendré par les mouvements du noyau métallique liquide des couches profondes de la Terre. Selon les études de John Tarduno de l'université de Rochester (États-Unis), la Terre possédait déjà un champ magnétique il y a 3,45 milliards d'années[1].

Description

Le champ magnétique terrestre peut être vu comme celui d'un aimant droit.

Le champ magnétique terrestre peut être comparé, en première approximation, à celui d'un aimant droit (ou d'un dipôle magnétique, ou d'une bobine plate parcourue par un courant). Le point central de cet aimant n'est pas exactement au centre de la Terre, il s'en trouve à quelques centaines de kilomètres. Cette approximation ne doit pas faire oublier que le champ a des composantes multipolaires dont l'intensité, bien que beaucoup plus faible que la composante dipolaire, n'est pas négligeable, notamment lors d'une inversion du champ magnétique terrestre qui voit l'affaiblissement de l'intensité du dipôle si bien que les composantes non dipolaires deviennent prédominantes[2].

La théorie du potentiel décrit, à partir de l'équation de Laplace, qu'à cet aimant droit se superposent en second ordre un quadripôle, au troisième ordre un octopôle, etc., jusqu'à l'infini. Cette décomposition dite en harmoniques sphériques admet des coefficients qui pondèrent l'importance à attribuer à chaque aimant. Le premier à avoir mesuré leur valeur est Gauss à partir d'un maillage d'observatoires magnétiques répartis autour de la Terre, puis d'en tirer des études statistiques.

D'autres planètes du système solaire possèdent un champ magnétique : Mercure, Saturne, Uranus, Neptune et surtout Jupiter. Le Soleil lui-même en possède un.

Bien que les aimants aient été connus depuis l'Antiquité, ce sont les Chinois qui, vers l'an 1000-1100 les utilisèrent pour s'orienter à l'aide de la boussole. La relation entre les aimants et le champ magnétique terrestre fut découverte en 1600, par William Gilbert, un physicien anglais et médecin de la reine Élisabeth Ire qui publie en 1600 de Magno Magnete Tellure (Du Grand Aimant de la Terre). Cette théorie est la première concernant des caractéristiques globales de la Terre, avant la gravité d'Isaac Newton. Il démontra comment une boussole placée à la surface d'une boule magnétisée (la « Terrella ») indique toujours le même point, comme elle le fait sur la Terre.

Notion de pôle

Le dipôle terrestre

L'ensemble des lignes de champ magnétique de la Terre situées au-dessus de l'ionosphère, soit à plus de 1 000 km, est appelé magnétosphère. L'influence du champ magnétique terrestre se fait sentir à plusieurs dizaines de milliers de kilomètres.

Le pôle Nord magnétique terrestre est en fait un pôle de magnétisme « sud ». Il s'agit d'une pure convention, due au choix d’appeler « nord » la pointe de l'aiguille de la boussole qui pointe approximativement le pôle Nord géographique[3].

L'axe géomagnétique, passant par les deux pôles magnétiques, fait un angle de 11,5° par rapport à l'axe de rotation de la Terre. Une mesure d'avril 2007 par le projet « Poly-Arctique » situa le pôle Nord magnétique (Nm) à une latitude de 83.95°N et une longitude de 121.02°O (83° 57′ 00″ N 121° 01′ 12″ O/83.95, -121.02)[4]. Soit étant situé à 673 km du pôle Nord géographique (Ng) et ayant une vitesse moyenne de déplacement de 55km/an (soit une moyenne d'environ 150m/jour ou 6m/h). À l'été 2010, il a été estimé qu'il n'était plus qu'à 550 km du pôle Nord géographique. En outre la position du pôle magnétique varie au cours de la journée, se déplaçant ainsi de plusieurs dizaines de km autour de sa position moyenne.

Le pôle Sud magnétique, quant à lui, se trouve au large de la Terre Adélie, dans la mer d'Urville, à 65° S et 138°E.

Position des pôles magnétiques
Pôle Nord magnétique[5] (2001) 81° 18′ N 110° 48′ O/81.3, -110.8 (North Magnetic Pole (2001)) (2004) 82° 18′ N 113° 24′ O/82.3, -113.4 (North Magnetic Pole (2004)) (2005) 82° 42′ N 114° 24′ O/82.7, -114.4 (North Magnetic Pole (2005)) (2010) 85° 00′ N 132° 36′ O/85, -132.6 (North Magnetic Pole (2010))
Pôle Sud magnétique[6] (1998) 64° 36′ S 138° 30′ E/-64.6, 138.5 (South Magnetic Pole (1998)) (2004) 63° 30′ S 138° 00′ E/-63.5, 138 (South Magnetic Pole (2004)) (2005)63° 06′ S 137° 30′ E/-63.1, 137.5 (South Magnetic Pole (2005)) (2010) 64° 24′ S 137° 18′ E/-64.4, 137.3 (South Magnetic Pole (2010))

Propriétés du champ magnétique

En un point donné du champ magnétique terrestre, le vecteur champ magnétique possède une composante verticale Bv (dirigée vers le centre de la Terre) et une composante horizontale B0. Aux pôles magnétiques, la composante horizontale a une valeur nulle. L'angle formé par B et B0 est appelé « inclinaison ». Il augmente lorsque l'on se rapproche des pôles en tendant vers 90°.

Le vent solaire est responsable de ces variations par les courants électriques qu'il engendre dans l'ionosphère et la magnétosphère. Les orages magnétiques peuvent perturber le champ magnétique terrestre en faisant varier l'intensité de la composante horizontale B0. De plus, les vents solaires déforment le champ magnétique terrestre. Côté jour, il est aplati et du côté nuit, il s'étire sur une dizaine de rayons terrestres[7].

La valeur de l'induction magnétique est exprimée en teslas (nom de l'unité dans le Système International d'unités), en l'honneur de Nikola Tesla. Actuellement, elle est de l'ordre de 47 μT au centre de la France.

L’archéomagnétisme, fondé sur l'étude des traces de champ magnétique fixées dans les objets archéologiques (briques, céramiques, etc.), et le paléomagnétisme, fondé plutôt sur les roches, permettent de comprendre l'évolution du géomagnétisme au fil du temps ; en datant les inversions de polarité magnétique au travers des âges, par exemple.

Mesure du champ magnétique terrestre

Méthode des Périodes

Pour deux bobines de Helmholtz identiques séparées d'une distance égale à leur rayon, le champ créé au milieu de ces deux bobines peut être considéré comme uniforme (les deux bobines sont parcourues par le même courant). En plaçant ces bobines de telle sorte que le champ qu’elles induisent soit aligné avec le champ magnétique terrestre,

le champ total résultant entre les bobines est donc :

\overrightarrow{B_1} = \overrightarrow{B_t}+\overrightarrow{B_i}.

Une aiguille aimantée (boussole) placée en R/2 s’aligne avec ce champ résultant. Écartée de sa position d’équilibre, elle oscille à une période :

 T=2\pi \left[\frac{J}{\mu (B_t + B_i)}\right]^{1/2}

avec μ : moment magnétique de l’aimant et J : moment d’inertie de l’aimant.

Si on inverse le sens du courant dans les bobines, le champ induit change de sens (conservation de la direction colinéaire au champ terrestre). L’aiguille oscille alors à la période :

 T=2\pi \left[\frac{J}{\mu (B_t - B_i)}\right]^{1/2} .

À partir de ces deux périodes on obtient :

 B_t= B_i\frac{ (T_1^2+ T_2^2)}{(T_2^2- T_1^2 )} .

Ainsi, si on considère des bobines de rayon R, composées de N spires et parcourues par un courant d’intensité I, en mesurant T1 et T2, on en déduit le champ magnétique terrestre :

 B_t= (4/5)^{3/2}\frac{NI\mu _0}{R}\frac{(T_1^2+ T_2^2)}{(T_2^2- T_1^2)} .

Méthode des Tangentes

Les bobines de Helmholtz sont cette fois placées de telle sorte que le champ qu’elles induisent soit orthogonal au champ magnétique terrestre.

L’aiguille aimantée, soumise à l’action de deux champs, s’oriente suivant leur résultante. Le champ résultant auquel est soumis la boussole est égal à la somme du champ terrestre et du champ induit et est aligné dans la direction α telle que:

 B_i= B_t \tan\left(\frac{\pi }{2}-\alpha\right).

Une mesure de l’angle α permet d’obtenir la valeur du champ magnétique :

 B_t= (4/5)^{3/2}\frac{NI\mu _0}{R}\frac{1}{\frac{\pi}{2}-\alpha }.

Applications

La boussole

L'aiguille d'une boussole parfaite (non perturbée par un champ parasite), s'oriente suivant la composante parallèle au cadran (normalement positionné horizontalement), restant tangente à la ligne de champ du lieu où elle se trouve. La boussole indique la direction du Pôle Nord magnétique (et non celle du Pôle Nord géographique) ; la différence angulaire relative étant appelée la déclinaison magnétique, dont la valeur dépend du lieu où l'on se trouve.

La boussole utilisée en navigation, appelée compas, n'indique généralement pas le Nord magnétique, mais le Nord compas, direction à laquelle il faut apporter encore une autre correction (appelée la déviation du compas), afin de retrouver la direction du Nord magnétique.

La déclinaison magnétique d'un lieu est fournie sur les cartes détaillées (1/50000 ou 1/25000) de la région. Sur les cartes marines et aéronautiques est également fournie une estimation de sa variation annuelle (par exemple diminution de 6' par an).

Le paléomagnétisme

Article détaillé : Paléomagnétisme.

On distingue l’archéomagnétisme, fondé sur l'étude des traces de champ magnétique fixées dans les objets archéologiques (briques, céramiques, etc.), du paléomagnétisme fondé sur l'analyse des variations du champ magnétique enregistrées par les roches. Lors de la solidification « rapide » d'un matériau (cuisson d'une poterie, éruption volcanique...), les dipôles magnétiques qu'il contient se retrouvent figés, donnant ainsi un instantané de la direction du champ magnétique terrestre. Les travaux de Xavier Le Pichon dans les années 1970, ont permis de mettre en évidence le phénomène de dérive des continents, à partir de l'étude de la variation du champ magnétique terrestre enregistrée au niveau des dorsales médio-Atlantique. On a ainsi pu découvrir que le champ magnétique terrestre a subi de multiples inversions de polarité au cours des millions d'années.

L'exploration minière

La prospection minière constitue un des grands domaines d'application de l'étude du géomagnétisme. Différentes roches possédant différentes aimantations, la valeur de l'intensité du champ magnétique terrestre s'en trouve modifiée. Il est ainsi possible d'obtenir une carte des structures en profondeur, selon les variations d'aimantation des roches.

Un bouclier protecteur pour la vie

Le champ magnétique terrestre joue un rôle essentiel dans le développement de la vie sur Terre, en déviant les particules mortelles du vent solaire formant ainsi les aurores boréales et australes. Les scientifiques observent toutefois une diminution du champ magnétique terrestre, l'anomalie magnétique de l'Atlantique sud en étant le signe le plus spectaculaire[8].

Lorsque le noyau se sera refroidi et solidifié (dans quelques milliards d'années) et qu'en conséquence le champ magnétique aura disparu, il est probable que les formes de vie existantes ne pourront plus subsister.[réf. nécessaire] Ces conditions sont celles qui règnent aujourd'hui sur la Lune et Mars.[réf. nécessaire]

Un des moyens de guidage d'animaux migrateurs

De nombreux animaux grands migrateurs terrestres (ex. : oiseaux) ou aquatiques (ex. : tortues marines) semblent dotés d'une perception fine du champ magnétique terrestre, même si d'autres sens interviennent lors des migrations. Par exemple les tortues caouanne sont sensibles à la latitude en fonction du champ magnétique terrestre et de son inclinaison[9]. Ainsi de très jeunes tortues de cette espèce placées, peu après leur éclosion, en bassin reproduisant des conditions de champ magnétique d’autres régions (Porto Rico et Cap-Vert, situés sur leur route migratoire habituelle à la même latitude (20 ° N), mais à des longitudes différentes) se sont rapidement orientées dans la direction qu’elles prendraient dans cet environnement (respectivement vers le NE et vers le SE)[9].

Notes et références

  1. Earth’s Magnetic Field Is 3.5 Billion Years Old Sur le site wired.com
  2. Christine Laverne, Christine Kornprobst, À la conquête des Grands fonds. Techniques d'étude de la géologie marine, Éditions Quae, 2011, p. 72
  3. en fait le pôle nord magnétique
  4. Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV), « La dérive du pôle Nord magnétique ».
  5. Geomagnetism, North Magnetic Pole. Natural Resources Canada, 2005-03-13.
  6. South Magnetic Pole. Commonwealth of Australia, Australian Antarctic Division, 2002.
  7. (en) Jonathan Sherwood, « Oldest Measurement of Earth's Magnetic Field Reveals History of Battle Between Sun and Earth for Our Atmosphere », (consulté le 8 mars 2010)
  8. Les caprices du champ magnétique Sur le site cnrs.fr[réf. insuffisante]
  9. 1 2 Nathan Putman et al. (Université de Caroline du Nord) ; Current Biology, vol 21, pp 463-466, 2011

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • Pierre-Noël Mayaud, « Guillaume Le Nautonier, un précurseur dans l'histoire du géomagnétisme », Revue d'histoire des sciences, 2004, volume 57, numéro 57-1, p. 161-173 [lire en ligne]

Filmographie

  • Magnétisme terrestre, passé, présent, futur, film documentaire réalisé par Yves Michaud (Gauthier Hulot, conseiller scientifique), Association « L'Université de tous les savoirs – la suite », Paris ; CERIMES, Vanves, 2009, 82' (DVD) (conférence du samedi 10 janvier 2009)

Liens externes

  • École et Observatoire des Sciences de la Terre
  • Musée de Sismologie et Magnétisme Terrestre: des collections d'instruments, des vidéos et des dossiers pour comprendre
  • Commission géologique du Canada - Géomagnétisme
  • Conférence expérimentale Origine du champ magnétique terrestre par l'IPG de Paris à l'espace PGG de l'ESPCI ParisTech
  • Introduction à la physique du globe, par Louis Cagniard, École nationale supérieure du pétrole et des moteurs (France)
  • INTERMAGNET: réseau global d'observatoires magnétiques, transmettant leurs données en temps quasi-réel
  • [PDF] Edmond Hoge, « Le géomagnétisme en Belgique », Académie royale de Belgique, 1957 (pages 17 ss.)
  • Portail des sciences de la Terre et de l’Univers
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