Béton
Cet article possède des paronymes ; voir : Beton et Betton. |
Le béton est un assemblage de matériaux de nature généralement minérale. Il met en présence des matières inertes, appelées granulats ou agrégats (gravillons, sables, etc.), et un liant (ciment, bitume, argile), c'est-à-dire une matière susceptible d'en agglomérer d'autres ainsi que des adjuvants qui modifient les propriétés physiques et chimiques du mélange. Mêlés à de l'eau, on obtient une pâte, à l'homogénéité variable, qui peut selon le matériau, être moulée en atelier (pierre artificielle), ou coulée sur chantier. Le béton fait alors « prise », c'est-à-dire qu'il se solidifie.
- Lorsque l'argile est employée on parle de « béton de terre[1] », probablement le plus ancien de tous les bétons.
- Lorsque le ciment est employé comme liant on obtient un « béton de ciment ». Lorsque les granulats utilisés avec le liant hydraulique se réduisent à des sables, on parle alors de mortier. On peut largement optimiser la courbe granulaire du sable, auquel cas on parlera de « béton de sable ».
- Un liant hydrocarboné (bitume) peut également être utilisé, ce qui conduit à la fabrication du « béton bitumineux ».
- etc.
Dans le langage courant, béton, sans précision, désigne le béton de ciment. Le béton associé à de l'acier permet d'obtenir le béton armé, un matériau de construction courant. Le béton associé à des fibres permet d'obtenir du béton fibré.
Le béton de ciment est, à l'heure actuelle, l'un des matériaux de construction le plus utilisé au monde (deux tiers des habitations dans le monde[2]). C'est aussi le deuxième matériau minéral le plus utilisé par l'homme après l'eau potable : 1 m3 par an et par habitant[3]). Son utilisation énergivore est source de multiples dégradations de l'environnement : la production du clinker entrant dans la composition des liants est responsable d’approximativement 5% des émissions de gaz à effet de serre (GES) anthropiques[4], principales responsables du réchauffement climatique. De plus la quête perpétuelle d’agrégats adaptés dont le sable, a conduit à la surexploitation de 75 % des plages de la planète, détruisant nombre d'écosystèmes littoraux[2].
Le béton de terre, matériau qui a mal survécu à la révolution industrielle, est économique (matériau gratuit disponible à même le sol), écologique (ne nécessitant pas de processus chimiques de transformation énergivore ou polluant et ne générant pas de déchets indésirables) et politique: N'intéressant pas l'industrie, car pas de processus de transformation complexe, ni le commerce, à cause de sa disponibilité immédiate, il n'entre pas dans le jeu de lobbies et est une option notamment pour les pays du Tiers-monde, soucieux d'indépendance, d'autonomie et d'auto-suffisance[1].
Histoire
Le mot betun au sens de mortier est attesté dans le Roman de Troie (vers 1160-1170)
L'argile
C'est le premier de tous les bétons[5].
L'argile, ou à défaut une terre argileuse, sous la couche d'humus (les anciens parlaient de terre franche sous la terre végétale) est présente dans beaucoup de sols, et constitue un mortier (Voir l'article mortier de terre) qui peut être facilement mis en œuvre par moulage dans des techniques de brique de terre crue ou de banchage.
Les premières cités découvertes dans l'ancienne Mésopotamie étaient construites en terre crue, avant même l'invention de l'écriture. Malheureusement ce matériau se dégrade plus rapidement que la pierre, et il existe donc peu de vestiges aussi marquants que les pyramides d'Égypte. Ainsi le Moyen-Orient et l'Asie centrale comptent de nombreux sites exceptionnels tels que Tchoga Zanbil (Iran), Mari (Syrie), Shibam (Yémen) ou Merv (Turkménistan).
La chaux
On voit par la suite la chaux associée à d'autres matériaux. La première utilisation du ciment remonte à l'antiquité égyptienne. En effet, un des mortiers les plus anciens, composé de chaux, d’argile, de sable et d’eau, fut utilisé dans la conception de la pyramide d’Abou Rawash, érigée aux alentours de 2600 av. J.-C., sous la IVe dynastie, mais également pour d’autres ouvrages.
La Rome antique et l'Opus caementicium
Vers le Ier siècle ap. J.-C., la Rome antique reprend cette technique en l’améliorant avec l’incorporation de sable volcanique de Pouzzoles ou de tuiles broyées. La pouzzolane est associée à la chaux et maçonnée à des matériaux tout venant, les caementa. Elle forme une sorte de béton extrêmement résistant puisque beaucoup de bâtiments construits dans ce matériau présentent des vestiges encore debout.
Cette forme de béton est employée dans l'Opus caementicium. Ce conglomérat est maçonné entre deux parois de petit appareil. Il permet de réaliser les volumes considérables de maçonnerie : des aqueducs, ponts, basiliques, etc. Ce système constructif est performant, économique, rapide, et ne nécessite aucune qualification de la main-d'œuvre, une bonne partie des matériaux étant employés sans préparation préalable[6].
Comme le dit Vitruve dans son De architectura (Livre II, Chapitre 6), le mortier peut résister à l'eau et même faire prise en milieu très humide. Cette vertu est due à la présence d'une grande quantité de silicate d'alumine. En ajoutant à la chaux aérienne de la pouzzolane ou des tuileaux concassés, on la transforme artificiellement en chaux hydraulique. Ce n'est qu'en 1818 que Louis Vicat expliquera les principes de cette réaction, dans sa théorie de l'hydraulicité[7].
En souvenir de l'usage qu'on fit de la pouzzolane, les cendres volantes silico-alumineuses issues de la combustion des charbons schisteux brûlés en centrale thermique, employées dans la confection des ciments contemporains, sont appelées également « pouzzolane »[8], de même que tous les matériaux et roches aux vertus pouzzolaniques.
La révolution industrielle et la chaux hydraulique
Du temps de Bernard Forest de Bélidor (XVIIIe siècle) on faisait dans l'eau beaucoup de fondations avec des pierres qu'on jetait à l'endroit où on voulait établir des fondations; on plaçait avec ces pierres du mortier susceptible de durcir dans l'eau (Qu'on obtient toujours par un mélange de chaux aérienne, de tuileaux ou de pouzzolane, et de sable). On donnait le nom de béton à ce mortier et cette manière de fonder s'appelait fondation à pierres perdues. Cette méthode avait le grand inconvénient d'exposer à mettre trop de mortier à certains endroits et pas assez à d'autres puisque lorsqu'on fondait à une grande profondeur sous l'eau la mauvaise visibilité empêchait de bien distribuer le mortier. « Pour éviter cet inconvénient on décide de concasser les pierres de la grosseur d'un œuf, de les mélanger sur terre avec le mortier qui a la propriété de durcir dans l'eau et de descendre ce mélange dans les endroits où l'on veut établir les fondation sous l'eau[pas clair][9]». Par la suite Vicat donna le nom de mortier hydraulique à celui qui a la propriété de durcir dans l'eau (Vicat le nomme aussi béton, mais il entrevoit qu'il conviendrait de donner le nom de béton uniquement au mortier hydraulique dans lequel on a introduit des cailloux ou de la pierraille). On a par la suite donné le nom de béton uniquement au mélange de ce mortier avec des pierres concassées. « Ainsi le béton n'est autre chose qu'une maçonnerie faite avec de petits matériaux ; et en faisant sur terre le mélange du mortier hydraulique avec les pierres concassées on a le grand avantage d'obtenir dans l'eau un massif bien homogène. On forme ainsi une maçonnerie très dure si le mortier hydraulique que l'on a fait est de bonne qualité. On voit donc que la bonté du béton dépend principalement de celle du mortier hydraulique[9]».
La révolution industrielle et le ciment portland
L'opinion généralement admise dans la seconde moitié du XVIIIe siècle est que c'est l'argile qui donne à la chaux la propriété singulière de durcir dans l'eau. L’anglais John Smeaton l'expérimente dans la construction du Phare d'Eddystone. Jusqu'au début du XIXe siècle la manière de faire le mortier qui a presque toujours été abandonnée aux ouvriers est l'objet de nouvelles expérimentations, éclairées par les progrès récents de la chimie, qui a été promue en science exacte. En 1796, James Parker découvre sur l'Île de Sheppey, en Grande-Bretagne, un calcaire suffisamment argileux pour donner après une cuisson à 900°C, un ciment naturel à prise rapide qui est commercialisé sous la marque Ciment romain. Le ciment prompt est de même nature. Côté français, en 1818, Louis Vicat, ingénieur de l’École Nationale des Ponts et Chaussées, expérimente les chaux hydrauliques et la possibilité de les fabriquer de manière artificielle. Sous son impulsion, en France, l'usage des chaux hydrauliques et ciments naturels se généralise et, à partir des années 1850, les ciments artificiels surcuits au nom de ciment portland. Toutefois, le nom de Portland vient du brevet déposé en 1824 par le briquetier Joseph Aspdin, « ciment de Portland », pour sa chaux hydraulique à prise rapide.
C’est dans les années 1830 que l’on voit apparaître les premiers développements de ce matériau, avec notamment la construction d’une maison de trois étages en béton à Montauban, par l'entrepreneur François-Martin Lebrun, puis, à partir de 1852, le béton-pisé ou béton-aggloméré de l’industriel François Coignet. À la même époque, Joseph Lambot puis Joseph Monier développent les ciments armés, amenés à devenir bétons armés sous l'impulsion de François Hennebique ou encore de l'architecte et entrepreneur Auguste Perret au début du XXe siècle.
En 1929, c’est Eugène Freyssinet, ingénieur français, qui va révolutionner le monde de la construction en inventant le béton précontraint.
À la fin des années 1980, on voit apparaître les bétons hautes performances et par la suite, de nouvelles grandes innovations vont voir le jour avec notamment les bétons autoplaçants (BAP) et les bétons fibrés à ultra hautes performances (BFUP).
Le béton de ciment est, à l'heure actuelle, le matériau de construction le plus utilisé au monde.
Les bétons
Béton de terre
Les matériaux de base d'un béton de terre sont : l'argile (la plus pure est le kaolin), sable, gravier, eau. Grâce à sa cohésion interne, l'argile joue le rôle de liant, le gravier et le sable sont le squelette interne, l'eau est le lubrifiant. Le béton de terre n'a cependant pas de résistance mécanique suffisante pour autoriser des applications structurales.
L'argile, qui est susceptible de présenter des variations de volume en cas de modification de la teneur en eau, peut être stabilisée par adjonction de ciment Portland, chaux, d'armatures végétales (paille sèche coupée, chanvre, sisal, fibres de feuilles de palmier, copeaux de bois, écorces, etc.), par adjonction d'asphalte, d'huile de coco, etc., pour assurer l'imperméabilisation, par traitement chimique (chaux, urine de bestiaux, etc.), géopolymérisation, etc.[1]
Le béton de terre est mis en œuvre dans les techniques de torchis (sur pan de bois et clayonnage ou dans la technique du pisé), de bauge, de brique de terre crue (ou adobe) ou dans les briques moulées mécaniquement[1], etc.
Béton de chaux
Béton de ciment
Le Béton de ciment couramment appelé béton, est un mélange de ciment, de granulats, d'eau et d'adjuvants.
Béton bitumineux
Le béton bitumineux (aussi appelé enrobé bitumineux) est composé de différentes fractions de gravillons, de sable, de filler et de bitume employé comme liant. Il constitue généralement la couche supérieure des chaussées (couche de roulement). L'enrobé est fabriqué dans des usines appelées « centrales à enrobés », fixes ou mobiles, utilisant un procédé de fabrication continu ou par gâchées. Il est mis en œuvre à chaud (150 °C environ) à l'aide de machines appelées « finisseurs » qui permettent de le répandre en couches d'épaisseur désirée. L'effet de « prise » apparaît dès le refroidissement (< 90 °C), aussi est-il nécessaire de compacter le béton bitumineux avant refroidissement en le soumettant au passage répété des « rouleaux compacteurs ». Contrairement au béton de ciment, il est utilisable presque immédiatement après sa mise en œuvre.
Le bitume étant un dérivé pétrolier, le béton bitumineux est sensible aux hydrocarbures perdus par les automobiles. Dans les lieux exposés (stations services) on remplace le bitume par du goudron. Le tarmacadam des aérodromes est l'appellation commerciale d'un tel béton de goudron (rien à voir avec le macadam, dépourvu de liant).
Béton armé
Le béton armé est un matériau composite, composé d'une structure en acier recouverte de béton.
Notes et références
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Béton de ciment » (voir la liste des auteurs).
- 1 2 3 4 René Vittone, Bâtir : manuel de la construction, PPUR Presses polytechniques, 10 juin 2010 (ISBN 978-2880748357), consulter en ligne.
- 1 2 Nos plages à court de sable sur future.arte.tv
- ↑ Amaury Cudeville, « Recycler le béton », Pour la Science, octobre 2011, p. 17-18.
- ↑ Émissions du ciment quelles perspectives sur le site www.construction-carbone.fr
- ↑ Le bois, le feuillage et les peaux d'animaux furent les premiers constituants de l'architecture naissante des pays tempérés. Pour les régions du globe où la végétation est rare, ainsi pour la plupart des rivages méditerranéens, ce fut l'argile qui fut le matériau le plus utilisé. Il est intéressant de retrouver ensuite l'argile et le bois associés, dans une architecture plus mûre, constituant les structures dites à maison à pans de boisJean-Pierre Adam. La Construction romaine. Matériaux et techniques. Sixième édition. Grands manuels picards. 2011
- ↑ Stefano Camporeale, Hélène Dessales, Antonio Pizzo. Arqueología de la construcción. CSIC, 2008 Consulter en ligne
- ↑ Louis Joseph Vicat. Traité pratique et théorique de la composition des mortiers, ciments et gangues a pouzzolanes et de leur emploi dans toutes sortes de travaux. Consulter en ligne
- ↑ Fond de formation professionnel de la construction. Bruxelles. 1992
- 1 2 Clément Louis Treussart. Mémoire sur les mortiers hydrauliques et sur les mortiers ordinaires. Chez Carillan-Goeury, 1829 Consulter en ligne
Annexes
Bibliographie
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Articles connexes
- Béton de ciment
Liens externes
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