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Équarrissage

Équarrissage

L'équarrissage est l'activité d'intérêt général et sanitaire, consistant à récupérer et à traiter :

  • les charognes d'animaux morts dans les élevages, dits ATM (Animaux Trouvés Morts en élevage) ;
  • des éléments de cadavres ou d'animaux (« pièce anatomique ») issus de soins vétérinaires ou d'accidents de la route (collision d'animaux avec véhicules) ou échoués.
  • déchets de l'industrie des viandes (abattoirs, ateliers de découpe, boucheries)...
  • déchets animaux de grandes et moyennes surfaces (GMS) : rayons boucheries, traiteurs, poissonnerie, produits laitiers.
  • certains déchets de l'industrie alimentaire, dont graisses animales et boues de stations d'épuration, matières à risque micro-biologique.

Enjeux

L'équarrissage joue un rôle important en matière de gestion des risques sanitaires. Pour cela, l’équarrisseur doit faire preuve d'une rapidité d'intervention et prendre les précautions nécessaires à la sécurité sanitaire et environnementale, adaptées à différents contextes. Les engins de transport des animaux morts doivent être étanches et les équarrisseurs doivent maîtriser les risques liés au nettoyage de leurs installations, aux rejets aqueux et atmosphériques, à la gestion des biocides qu'ils utilisent. Il leur est aussi demandé de limiter les gênes occasionnées par les odeurs de cadavres.

Depuis quelques décennies, la notion de traçabilité tend à prendre de l'importance, autant pour des questions, de responsabilité juridique ou pénale que pour permettre des études épidémiologiques ou écoépidémiologiques, sur la base de statistiques fiables, qui par exemple en France ont récemment permis de mettre en évidence une augmentation de taux de mortalité des bovins à la ferme (vaches allaitantes notamment) depuis le milieu des années 1990, via l'Observatoire de la mortalité des animaux de rente, sous l'égide de l'ANSES[1],[2].

Dans les pays et régions densément peuplées ou là où les activités d'élevages sont industrialisées, l'équarrissage prive les organismes nécrophages se nourrissant de grands animaux de presque toutes leurs ressources alimentaires. Des dérogations sont parfois accordées, par exemple aux bergers de montagne afin qu'ils "offrent" les cadavres d'animaux trouvés morts aux vautours (nécrophages) qui jouaient autrefois un rôle sanitaire important (service écosystémique en jouant un rôle d'« équarrisseurs naturels » [3],[4],[5], ils fournissent (comme le sanglier et les insectes nécrophages) un service écosystémique particulièrement important, dans une niche écologique essentielle à la bonne santé de tous les autres animaux, ainsi qu'à celle de l'homme, mais qui sont presque partout dans le monde en voie de régression. En 2011, l'Union européenne a assoupli [6] le précédent règlement de 2009[7] et ses procédures pour permettre l'« équarrissage naturel » (élimination de cadavres d'animaux d'élevage par des nécrophages sauvages, vautours le plus souvent) qui avait été interdit pour limiter certains risques de diffusion de microbes ou prions de l'agriculture vers la faune sauvage. En 2011, les autorités européennes réautorisent le ravitaillement des « placettes de nourrissage » de certains oiseaux nécrophages à partir de cadavres et de matériels à risque spécifiés (EST-ESB) pour les espèces d’oiseaux nécrophages menacées d’extinction ou protégées, et pour d’autres espèces vivant dans leur habitat naturel, afin d’encourager la biodiversité. Certaines espèces carnivores peuvent accéder à ce type de « soutien alimentaire » et à certaines conditions[8], il est possible de ne pas systématiquement acheminer les cadavres vers les placettes d’alimentation prévues.

Les rapaces nécrophages ou partiellement nécrophages bénéficiant de ce règlement sont[9] :

  • Le Gypaète barbu (Gypaetus barbatus) ;
  • le Vautour moine (Aegypius monachus) ;
  • le Vautour percnoptère (Neophron percnopterus) ;
  • le Vautour fauve (Gyps fulvus) ;
  • le Milan noir (Milvus migrans) ;
  • le Milan royal (Milvus milvus) ;
  • l’Aigle royal (Aquila chrysaetos) ;
  • le Pygargue à queue blanche (Haliaeetus albicilla)

Dans l'Union européenne

Une Directive de 1990[10] demande aux équarrisseurs de différencier les matières dites « à haut risque » (à sécuriser par l'application à des particules d'un diamètre maximal de 5 centimètres d'une température de 133° sous une pression de 20 bars pendant vingt minutes (obligation de moyens), et les matières dites « à bas risque » pour lesquelles n'est posée qu'une simple obligation de résultat sur le plan bactériologique.

En France

Histoire

En France, l'équarrissage a peu à peu été organisé par l’État pour enlever et détruire des animaux morts ou reconnus impropres à la consommation, ou des parties d'animaux impropres à la consommation humaine ; dans un esprit de santé publique. Il assure aussi l'enlèvement et la destruction des « saisies sanitaires d'abattoirs »[11].

Au XXe siècle, l'équarrisseur a obligation d'accepter les animaux qu'on lui fournit (dans un périmètre défini par arrêté préfectoral), mais il a, en contrepartie, un droit de collecte des sous-produits des abattoirs de la zone, ce qui le rémunère du service qu'il rend à la collectivité.
Pour éviter les « contaminations croisées », le droit européen a dans les années 1990 imposé, quelle que soit la destination du produit final, un traitement différencié des matières selon le risque sanitaire qu'elles représentent (distinction entre haut risque et bas risque[10]). Ainsi, à partir de 1991, « les animaux morts sur l'exploitation, abattus dans le cadre de lutte contre les maladies, les saisies d'abattoirs, ainsi que les denrées animales avariées et les animaux importés ne répondant pas aux exigences sanitaires européennes, regroupés dans la catégorie « haut risque », font l'objet d'un traitement particulier dans des établissements dédiés et agréés (...) les farines à haut risque sécurisées étaient destinées, comme les farines à bas risque, à être utilisées par les industries de l'alimentation animale »[11].
Dans le cadre de la crise de la vache folle, en 1996 la législation[12] impose le retrait de la chaîne alimentaire humaine des cadavres, des saisies d'abattoirs et des matériaux à risques spécifiés (MRS), tels que système nerveux central et certains abats des ruminants, potentiellement contaminants au regard de l'ESB, et le secteur de l'équarrissage est réorganisé[13].

La collecte et le traitement des matières dites « à haut risque » sont désormais assurés par des entreprises participant au service public de l'équarrissage. Elles assurent ces prestations en répondant à des marchés publics et sont rémunérés par une taxe basée sur les achats de viande. Les matières traitées par ce service public doivent maintenant être détruites. Mais, comme il n'existe pas de moyens peu coûteux d'incinérer directement de grandes quantités de déchets crus, ces matières sont transformées en farines et graisses avant d'être incinérées, par exemple en Cimenterie.
Les sous-produits d'abattage et de découpe provenant d'animaux sains sont, quant à eux, valorisés dans une filière distincte par des équarrisseurs devenus « industriels des coproduits animaux »[11]. Seules les farines et les graisses produites dans ce cadre pouvaient être utilisées pour l'alimentation des animaux monogastriques[11].

Selon les industriels auditionnés par le Sénat, avant la réglementation, ils plongeaient les farines dans un bain de graisse à une température moyenne équivalente à 133 °C, mais à pression ambiante seulement[11]. Vers la fin des années 1990, « sur les 3,3 millions de tonnes de déchets animaux générés chaque année par les abattoirs, environ 2,5 millions de tonnes étaient des produits dits à bas risque destinés à être valorisés en farines animales et les 800 000 tonnes restantes étaient traitées par le service public de l'équarrissage. Le volume traité par ce dernier s'est fortement accru à mesure de l'extension de la liste des matériaux à risques spécifiés. Il convient d'y ajouter environ 415 000 tonnes d'animaux morts à la ferme »[11]. Sur environ un million de tonnes de farines et graisses annuellement produites à cette époque :

  • 175 000 tonnes étaient des farines et de graisses "à haut risque", issues du service public de l'équarrissage[11] ;
  • 875 000 tonnes étaient des farines et graisses "à bas risque", dont 850 000 sont destinées à l'alimentation du bétail et des animaux domestiques[11].

Législation


  • Depuis, 1975[14], les équarrisseurs, notamment représentés par le Syndicat des industries françaises des coproduits animaux (Sifco) doivent accepter et traiter tous les cadavres animaux de plus de 40 kg trouvés dans un certain périmètre (y compris celui de cachalots, baleines ou autres mammifères échoués et morts) ;
    En contrepartie ils sont autorisés à collecter les sous-produits des abattoirs situés dans cette zone, et à les valoriser afin d'en tirer une rémunération ;
  • Depuis 1991, un arrêté du 30 décembre 1991 appliquant une directive européenne impose aux équarrisseurs de distinguer :
    • des matières « à haut risque », auxquelles on applique une température de 133° sous une pression de 2 bars pendant 20 minutes,
    • des matières « à bas risque » pour lesquelles seul le résultat du point de vue bactériologique compte[15] ;
  • En 1996, le droit [16] réorganise la collecte et à l'élimination des déchets d'abattoirs et l'équarrissage.
  • Ce n'est qu'en 1998 (8 ans après son vote) que la directive européenne de 1990 est enfin transposée dans le droit français[17], imposant un traitement thermique minimal de 133° pendant 20 minutes, sous la pression de trois bars. Pour la première fois, une obligation de moyen était imposée à la production de farines à partir de matières à bas risque.
  • Concernant les animaux domestiques ou sauvages ; À l'exception des cadavres d'animaux de compagnie dont les propriétaires optent pour une inhumation dans un cimetière autorisé ou une incinération dans un centre spécialisé, les autres cadavres d'animaux ne provenant pas d'établissements spécialisés, sont éliminés par l'équarrissage, conformément aux articles 264 et suivant du code rural[18].

En 2009, alors que depuis le milieu des années 1990 - pour des raisons mal comprises -le nombre de morts spontanées de bovins tend à augmenter significativement dans les élevages, et que les éleveurs ne payaient pas (selon les services de répression des fraudes[19]) les taxes afférentes, les députés ont prévu, puis confirmé en 2009 une privatisation du service public de l'équarrissage à partir de juillet 2009. C'est la fin du service obligatoire d'enlèvement des « animaux trouvés morts » (ATM) dans les élevages. Les éleveurs devront contribuer financièrement à ce service, via (propositions 2008) une taxe à l'abattage transformée en contribution volontaire obligatoire (CVO), «à la boucle» ou à l'UGB. Celle-ci serait prélevée par les EDE, en même temps que la facturation pour l'identification des animaux [19] En 2009, la dette des éleveurs à l'égard du système d'équarrissage était évaluée par le ministère de l'Agriculture à 10 millions d'euros en 2008 et 11 millions en 2009, somme que le ministre de l'agriculture Michel Barnier a proposé[20]» de prendre à la charge de l'État pour « ramener à zéro la dette des agriculteurs, afin de leur permettre de commencer à travailler dans le cadre du nouveau système d’équarrissage sur des bases saines »,

Pour soulager les éleveurs de cette dette, un nouveau texte leur permet de choisir entre « s'équiper d'outils à la ferme pour le traitement des cadavres » ou être en mesure de présenter « les documents attestant qu'ils ont conclu un contrat ou cotisent à une structure ayant conclu un contrat leur garantissant, pendant une période d'au moins un an, l'enlèvement et le traitement, dans les conditions prévues par le présent chapitre, des animaux morts dans leur exploitation »[21].

Notes et références

  1. Le Syndicat Agricole (2010) ; Lancement d’une enquête nationale sur la mortalité des bovins ; publié 2010-12-20, consulté 2015-05-25
  2. J.-B. Perrin (2012) Modélisation de la mortalité bovine dans un objectif de surveillance épidémiologique ; thèse soutenue à l'Université Lyon I, 330 pp. (résumé)
  3. Chassagne M (1997) Les Vautours équarrisseurs naturels des Grands Causses. Thèse de Doctorat Vétérinaire, Lyon, 280 p.
  4. Joncour G (1999) Les vautours équarrisseurs en France, Bull. Acad. Vét. de France ; 72 :143-151
  5. Joncour G (1999) Les vautours, auxiliaires naturels de l’équarrissage en France. Mondial Vet. Lyon 1999.
  6. Eur-Lex (2011) Règlement UE n°142/2011 de la Commission du 25 février 2011 portant application du règlement (CE) n°1069/2009 du Parlement européen et du Conseil établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et portant application de la directive 97/78/CE du Conseil en ce qui concerne certains échantillons et articles exemptés des contrôles vétérinaires effectués aux frontières en vertu de cette directive, PDF, 254 pages
  7. Règlement (CE) n° 1069/2009
  8. en l’absence de collecte préalable des animaux morts, des animaux sauvages visés à l’annexe VI, chapitre II, section 2, point 1 a), sous réserve des conditions fixées à l’annexe VI, chapitre II, section 3)
  9. Baudouin de Menten Rapaces nécrophages : assouplissement de l'équarrissage naturel 2011-03-02
  10. 1 2 Directive CEE n° 90/667 du 27 novembre 1990 relative à l'élimination et à la transformation des déchets animaux
  11. 1 2 3 4 5 6 7 8 Sénat français, Rapport de commission d'enquête n° 321 (2000-2001) de MM. Gérard Dériot et Jean Bizet, fait au nom de la commission d'enquête, déposé le 11 mai 2001 ; Voir §a) Les farines animales : un produit de l'industrie de l'équarrissage
  12. arrêté du 28 juin 1996
  13. Loi du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l'élimination des déchets d'abattoirs, qui réorganise le secteur de l'équarrissage
  14. La loi du 31 décembre 1975
  15. (fr) Gérard DERIOT et Jean BIZET., « Rapport de la commission d’enquête sur les conditions d’utilisation des farines animales dans l’alimentation des animaux d’élevage et les conséquences qui en résultent pour la santé des consommateurs », Sénat, (consulté le 2 avril 2009)
  16. loi du 26 décembre 1996
  17. arrêté du 6 février 1998imposant, conformément à la décision de la Commission n° 96/449 du 18 juillet 1996
  18. DREAL Nord/Pas-de-Calais, PREDIS du Nord-Pas-de-Calais (p 109/140)
  19. 1 2 Article Equarrissage Dossier sur la bonne voie, La France agricole, jeudi 06 novembre 2008
  20. dans le cadre de la conférence du 12 novembre 2009 sur les revenus de l’agriculture et des éleveurs
  21. Equarrissage Le gouvernement va prendre «à sa charge» la dette des éleveurs (Barnier), article publié par La France agricole, vendredi 07 novembre 2008

Annexes

Articles connexes

  • PREDIS
  • Cadavre
  • Santé publique
  • Sécurité sanitaire
  • Sûreté biologique
  • Portail international de la sécurité sanitaire et de la santé animale et végétale
  • Groupement de défense sanitaire
  • Institut de veille sanitaire
  • Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail
  • Lactoremplaceurs (lait artificiel pour veaux, agneaux, chevreaux, porcelets et poulains)
  • Portail de l’agriculture et l’agronomie
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