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Sigillographie

Sigillographie

La sigillographie est une science auxiliaire de l'histoire dont l'objet est l'étude des sceaux (en latin sigillum) et de leur emploi.

Celui qui appose son sceau est appelé sigillant.

Histoire de la sigillographie

La sigillographie, autrefois appelée sphragistique, est une science ancienne, notamment développée en France par les premiers diplomatistes, puis aux Archives royales par Natalis de Wailly, Louis Douët d'Arcq et Léon de Laborde. Elle est devenue nécessaire aux collectionneurs et aux musées dès le XIXe siècle, et notamment de 1830 à 1880, alors que de grandes collections d’empreintes étaient fondées et étudiées. Elle a bénéficié du développement de techniques de moulage de plus en plus performantes.

Après 1830, alors que la collection d'environ 300 matrices de Pierre Revoil entrait au Louvre, le marchand anglais John Doubleday fut autorisé à faire des moulages de certains sceaux des Archives royales, à condition de fournir à ces dernières un exemplaire de chaque moulage. Au même moment, le médailleur Alexis-Joseph Depaulis (1792-1867) réunissait des dizaines d'empreintes de sceaux de provenances variées pour les offrir à l’École des Beaux-Arts.

Les Archives royales réunissent en quelques décennies, à partir des années 1840, une collection de moulages qui reste la plus importante dans le monde, d'abord à partir d'exemplaires français et anglais. Les sceaux deviennent ainsi des références[1] permettant de dater des événements historiques et d'étudier l’iconographie religieuse, l’histoire du costume ou des styles décoratif, l'héraldique, l’épigraphie et la paléographie avec la difficulté que de nombreux sceaux ont été séparés de leur document originel, pour alimenter le marché naissant des collectionneurs. Un catalogue[2], comprenant trois volumes relatifs aux « Collections de sceaux », facilite l’accès à ces dernières, mais n'est pas illustré. Les sceaux sont classés selon huit types : de majesté, équestre, armorial, personnel aux femmes, ecclésiastique, légendaire, topographique, et arbitraire (ou dit « de fantaisie »). Ces premiers inventaires ne satisfaisant ni les critères ni les besoins de la recherche, Laborde pense à éditer un Atlas des sceaux, cette fois illustré de photographies, compilant des fiches normalisées, mais ce projet ne verra pas le jour. Un inventaire des sceaux de province est lancé par Laborde. Il ne sera pas terminé, mais il a néanmoins permis la publication de l'inventaire des sceaux de la Flandre (en 1873), de l’Artois et de la Picardie (en 1877), de la Normandie (en 1881). Auguste Coulon le reprend pour la Bourgogne (terminé en 1912). Selon Clément Blanc-Riehl, l'étude sur moulage et la séparation de nombreux sceaux de leur document a cependant – en «décontextualisant» ces objets – fait perdre à la sigillographie une partie de son intérêt historique[3].

Définition et terminologie

La sigillographie recense et étudie les sceaux de cire et bulles de métal.

Signet en argent

Le sceau est une empreinte imprimée en relief sur une matière malléable, surtout la cire, par la pression d'un objet en pierre ou en métal. L'outil qui permet d'apposer le sceau est appelé « matrice de sceau » ; il est souvent réalisé en bronze ou en cuivre. Le sceau est utilisé comme marque personnelle d'autorité. Il rend crédible l'écrit. On en distingue différents types

  • Le sceau proprement dit ;
  • La bulle, aux mêmes usages que le sceau, mais qui est en métal ;
  • Le contre-sceau, empreinte de petites dimensions réalisée à l'avers du sceau ;
  • Le signet, empreinte de petites dimensions avec une seule face ;
  • Le cachet, utilisé à l'époque moderne pour fermer une lettre.

Usage

Les sceaux servent à :

  • authentifier les documents - comme les signatures et timbres contemporains ;
  • clore des lettres - comme les scellés contemporains;
  • certifier des lettres - comme encore aujourd'hui les cachets de plis.

La valeur juridique médiévale du sceau est le fondement de la théorie juridique contemporaine de la signature.

Comme seing, ils mentionnent une origine et donnent une garantie. Pour ce faire ils donnent à voir des signes (appelés types) associés à un texte (appelé légende), deux termes issus de la numismatique.

Les sceaux et les bulles d'authentification des actes fournissent l'essentiel des matériaux dont les pourvoyeurs sont les dépôts d'archives et les bibliothèques. La sigillographie est de ce fait même liée à la diplomatique et l'héraldique particulièrement concernée par le sceau comme moyen d'identification, les trois quart du million d'armoiries médiévales étant connues uniquement par des sceaux monochromes.

En France, le titre Garde des Sceaux fut créé par Philippe Auguste au XIIIe siècle et est encore porté de nos jours par le ministre de la Justice.

Technique

Fabrication du sceau de cire

Le sceau de cire médiéval est obtenu à partir d'une galette ou boule brunâtre de cire naturelle d'abeille, agrémentée dès le XIIe siècle de colorants pour donner des cires marron — ou jaunes —, vertes ou rouges puis, par l'impression d'une matrice de métal — bronze le plus souvent —, gravée en creux et en taille directe par un artisan proche de l'orfèvre.

Formes de sceau

Sceau ogival du chapitre de la cathédrale de Moulins

Les formes les plus courantes sont :

  • rondes[4]
  • ogivales, dites alors « en navettes », plus appropriés pour les effigies en pied d'ecclésiastiques ou de femmes[5].

Apposition du sceau

Les sceaux peuvent être soit plaqués à même le parchemin de l'acte[6] ou, dès le XIIe siècle, appendus [7]. Les sceaux appendus l'étaient au moyen de :

  • courroies de cuir,
  • simples languettes de parchemin rapportées, passant par une incision (doubles queues), dont une forme particulière est l'attache parisienne,
  • découpées dans la masse du parchemin supportant l'acte (simples queues),
  • fils de matériaux divers (lacs de soies, cordelette de chanvre).

Les sceaux appendus au bas du document présentent deux faces, l'avers qui recueille l'empreinte du sceau, et le revers qui reçoit celui d'un autre sceau, sceau dit biface s'il a même dimension, ou contre-sceau s'il a une dimension inférieure[8],[9].

Les effigies et légendes

Moulage du contre-sceau du grand sceau de Louis XIV, roi de France. Archives nationales SC-D116bis

La légende nominative est souvent en latin[10] et plus rarement en langue vernaculaire[11]. Les effigies sont, elles, typées en fonction du rang social :

  • sceau de majesté, où le roi trône avec les signes de sa souveraineté[12],
  • sceau équestre, de guerre où un seigneur figure à cheval, portant ses armes[13],
  • sceau ecclésiastique, assis ou en pied, montrant le sigillant revêtu des ornements de sa fonction[14],
  • sceau féminin, en pied pour une dame de haut rang parée de ses atours[5],
  • sceau hagiographique, des institutions d'Église[15],
  • sceau monumental, des villes, représentant des monuments[16],
  • sceau héraldique, ou armorié, qui reste le plus répandu dans la société, utilise le codage monochrome des couleurs héraldiques - non utilisé dans le jeu pour des raisons techniques[17].

Significations

Signification de la couleur et de l'attache

bulle d'or de l'empereur Charles IV en majesté, 1356

La couleur de la cire et de l'attache était parfois porteuse de sens dans certaines chancelleries. Dans la chancellerie royale française :

  • les sceaux de cire verte, pendants sur lacs de soie rouge et verte, caractérisent les actes à valeur perpétuelle ;
  • les sceaux de cire jaune sur simple queue, sont propres aux mandements et aux actes administratifs ;
  • les sceaux de cire rouge scellent les lettres closes relevant de la sphère privée.

Dans le domaine privé existe aussi un code couleur :

  • les sceaux de cire verte scellent les lettres de déclaration d'amour audacieuse;
  • les sceaux de cire noire ou grise caractérisent les actes ayant trait au décès ou aux funérailles;
  • les sceaux de cire bleue scellent les lettres d'amour.

Les bulles de métal

La bulle de métal est toujours appendue au document et toujours biface. Elle est produite en imprimant une boule de métal au moyen d'une sorte de tenaille. Les métaux sont de nature malléables donc de trois sortes :

  • bulle d'or, pour les chancelleries impériales (empereur byzantin ou empereur romain germanique) ;
  • argyrobulle, en argent, pour les chancelleries royales,
  • molybdobulle, en plomb, pour les actes solennels des papes.

Les espèces du sceau

Seuls les grands sigillants peuvent avoir concurremment plusieurs sceaux, aux usages différents - comme le roi de France possédant un grand sceau, un sceau du secret, un signet, ... La taille du sceau pouvait varier selon son espèce de moins de deux à plus de dix centimètres de diamètre.

Devenir d'un sceau

Le sceau d'une personne physique est par principe unique et doit être détruit à sa mort. Mais souvent, un changement de statut amène les sigillants à se doter d'un nouveau sceau, dont la figure et/ou la légende sont modifiés. Les découvertes archéologiques, ainsi que le fait que de nombreuses matrices de sceaux (outil servant à produire le sceau) soient conservées dans des collections publiques et privées, prouvent que seuls les sceaux-matrices des hautes autorités, des souverains et des princes étaient cassés.

Anecdote

La sigillographie fait une apparition inattendue dans l'album de Tintin Le Sceptre d'Ottokar, à travers le personnage du professeur Halambique.

Bibliographie

  • Josef Grisar et Fernando de Lasala: Aspetti della sigillografia, Roma, 1997.
  • Germain Demay, Le costume au Moyen Âge, d'après les sceaux, éd. D. Dumoulin, Paris, 1880 (En ligne à la BNF)
  • Otto Posse: Kaisersphragistik, Kapitel II (= Die Siegel der deutschen Könige und Kaiser, Band 5) Dresden 1913 auf Wikisource, Inhalt Bd. 5
  • Michel Pastoureau, Les sceaux, Turnhout, Brepols, "Typologie des sources du Moyen Âge Occidental", 36, 1981.

Articles connexes

Liens externes

  • La Sigillothèque, avec un corpus breton de plus de 3000 entrées
  • Société française d'héraldique et de sigillographie
  • Reproductions photographiques des sceaux dans la collection de Lichtbildarchiv älterer Originalurkunden récherchable par le verteilte Bildarchiv prometheus
  • Corpus des sceaux, cachets et représentations héraldiques conservées aux Archives départementales des Alpes-Maritimes
  • « Vocabulaire international de la sigillographie », sur archivi.beniculturali.it publié par le Conseil international des archives

Notes et références

  1. Note de L. Douët d’Arcq à F.-A. de Chabrier (AN, AB XVIII/1, dossier 2
  2. Catalogue publié par Louis Douët d’Arcq en 1863, et réédité en 1867 et 1868.
  3. Article de Clément Blanc-Riehl, chargé d’études documentaires au service des sceaux des Archives nationales, Bulletin de liaison des sociétés savantes n° 12, mars 2007, p. 6 à 7
  4. Moulage du sceau de Jean de Vergy, chevalier, sire de Fouvent et sénéchal de Bourgogne (1276)
  5. 1 2 Moulage du sceau d'Isabelle de Bourgogne, veuve de Rodolphe Ier de Habsbourg, roi des Romains et empereur d'Allemagne (1303)
  6. Sceau plaqué de Louis VI le Gros(1118)
  7. Sceau appendu de Philippe, comte de Boulogne et de Clermont(1226)
  8. Sceau d'Etienne III de Chalon, comte d'Auxonne (1197)
  9. Contre-sceau d'Etienne III de Chalon, comte d'Auxonne (1197)
  10. Sceau d'Eudes de Bourgogne(1187). Légende en latin : SIGILLUM ODONIS FILII DUCIS BURGUNDIE, traduction : sceau d'Eudes, fils du duc de Bourgogne
  11. Sceau de Jean de Vergy, chevalier, sire de Fouvent et sénéchal de Bourgogne (1276). Légende en français :S. JEHAN DE VERGE SENECHAU DE BOURGOINNE
  12. Moulage d'un fragment du sceau de Charles Ier d'Anjou, roi de Jérusalem et de Sicile (1282)
  13. Moulage du sceau d'Eudes de Bourgogne(1187)
  14. Moulage d'un fragment du sceau de Guy II de Genève, évêque de Langres (1267)
  15. Sceau de l'abbaye de Saint-Martin de Pontoise (1177)
  16. Sceau de la ville de Cappy, (1228)
  17. Moulage du contre-sceau d'Hugues II de Bouville, seigneur de Milly-en-Gâtinais, chambrier du roi, chevalier (1299)
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