Alcooliques anonymes
Le mouvement Alcooliques anonymes (anglais : Alcoholics Anonymous, AA) est une organisation mondiale d'entraide dont l'unique but est d'aider des personnes pensant avoir un problème avec l'alcool ou se reconnaissant alcooliques et qui désirent s'arrêter de boire pour devenir abstinentes. Peu importe qu'elles soient des alcooliques chroniques ou cycliques. En France, en Suisse, en Belgique et au Québec, les Alcooliques anonymes ont une influence déterminante parmi les organisations néphalistes. La démarche proposée aux membres de la fraternité est un programme de vie en 12 étapes avec une notion de Dieu tel que chacun le conçoit. A noter que absolument rien n'est obligatoire en AA tout est suggéré, les membres ont la liberté de prendre ce qui les intéresse et de laisser le reste.[réf. nécessaire]
Outre les Alcooliques anonymes, les organisations d'aide aux personnes en difficulté avec l'alcool les plus connues dans les pays francophones sont la Croix-Bleue, le Mouvement Vie Libre, Alcool Assistance (France et DROM-COM), Alcool Ecoute Joie et Santé.
Historique
La création des AA a été précédée d'une tentative de prise en charge psychothérapeutique d'un patient alcoolique américain Rowland Hazard III (en) qui s'était rendu chez Carl Gustav Jung qui l'avait traité pendant un an. Une rechute s'ensuivit et Jung refusa de renouveler le traitement mais conseilla à son malade de « vivre une expérience spirituelle ou religieuse seule capable de le remotiver ». Rowland H. adhéra alors aux Groupes d'Oxford et parvint à se rétablir. Il consacra sa vie à aider d'autres alcooliques dont un certain Ebby Thacher (en) qui vécut la même expérience et avec un autre ami, lui aussi rétabli, Bill W. (en). Ensemble, ils créèrent les AA[1]. En mai 1935, Bill W. (William Griffith Wilson), principal fondateur du mouvement, rencontre le Dr Bob (Robert Holbrook Smith : Bob Smith (doctor) (en)). Le 10 juin 1935, le Dr Bob prit son dernier verre d'alcool. C'est cette date qui a été retenue officiellement pour marquer le début du mouvement Alcooliques anonymes. Le nom du groupe provient du Gros Livre (titre original : Alcoholics Anonymous, surnommé Big Book).
Dans les années 1960, Bill W., toujours abstinent mais souffrant de dépression, de tension nerveuse et d'insomnie, cherche une aide médicale et est soulagé de ces maux par le docteur Abram Hoffer (en), un proche collaborateur d'Humphry Osmond et un fondateur de la médecine orthomoléculaire. Enthousiasmé par les résultats obtenus avec 3 000 mg de vitamine B3, Bill W. reproduit l'expérience avec 30 amis membres des AA et obtient des résultats encourageants. Ces résultats lui confirment que les membres des AA devraient bénéficier d'un tel traitement, ainsi que ceux qui ne sont pas aptes à se joindre aux groupes, étant incapables d'envisager d'adhérer aux 12 étapes. Il partagera ses préoccupations avec les médecins des AA[2] mais, suite à trois communications, il fut écarté d'AA International. Cet aspect de l'histoire des AA et de son fondateur est peu connue des adhérents du mouvement mais est documentée par les chercheurs en nutrition clinique. C'est à Bill W. que cette vitamine doit son nom[3].
Joseph Kessel, par son ouvrage Avec les alcooliques anonymes[4], un reportage sur les AA aux États-Unis, a contribué à les faire connaître en France et en Europe. Ce livre rapporte un voyage parmi des hommes en perdition qui s'emploient à aider leurs anciens compagnons d'infortune. Aux côtés de Joseph Kessel, le peintre Jacques Angot travailla à la diffusion en France du concept des Alcooliques anonymes en collaboration étroite avec les associations new-yorkaises.
En Belgique, le premier groupe se réunit en 1953.
Fonctionnement
L'anonymat est la base des traditions des AA ainsi tous ses membres sont égaux. Aucun ne peut être médiatisé ou stigmatisé plus qu'un autre. Tout ce qui est dit en confiance ne doit pas sortir de la salle de réunion. Il n'y a ni thérapeute ni encadrement d'aucune sorte. La méthode repose sur un programme de rétablissement en 12 étapes, l'échange d'expériences fortes et espoirs et le partage d'émotions : « Qui mieux qu'un malade alcoolique rétabli peut comprendre un autre malade alcoolique qui souffre encore ? »
En France, comme dans la plupart des pays (ou parties de pays), il existe un conseil d'administration, avec renouvellement des mandats, qui constitue la représentation du mouvement. Ce conseil est chargé du maintien des services aux alcooliques et à leurs groupes. Chaque groupe est autonome sauf pour ce qui touche les autres groupes ou le mouvement AA dans son ensemble. Les groupes contrôlent ces conseils d'administration par l'intermédiaire de délégués régionaux élus, réunis lors de « conférences nationales » périodiques.
Des délégués des divers conseils d'administration partagent leurs expériences de service dans des réunions mondiales tenues tous les deux ans.
Afin de préserver leur indépendance, les AA n'acceptent pas de subventions. Ils s'autofinancent par la modeste contribution volontaire de chacun de ses membres. L'argent donné sert à payer le loyer du local, régler les frais d'intendance ou de secrétariat, mais aussi à financer les actions du conseil d'administration de AA France, tant au niveau national qu'international. Dans le cas où des mairies ou des structures médico-sociales prêtent gratuitement leurs locaux pour la tenue de réunions, les AA offrent une somme d'argent généralement destinée à une œuvre sociale afin de garder leur indépendance. De même, les AA refusent d'être reconnus d'utilité publique.
Les AA n'ont pas vocation et ne prétendent pas se substituer à la médecine qui figure parmi leurs « alliés naturels ». À ce titre, ils participent à des réunions d'information dans les centres d'alcoologie des établissements hospitaliers au profit des malades mais aussi des soignants.
La seule condition requise pour devenir membre des AA est le désir d'arrêter de boire. Le malade alcoolique peut assister aux réunions et dans les villes ou régions où existent plusieurs groupes, il est ainsi possible d'assister à plusieurs réunions par semaine. Il n'y a ni inscription, ni cotisation : chacun est libre d'assister au nombre de réunions qu'il souhaite, de se présenter ou non, de parler ou non. « En AA rien n'est imposé mais seulement suggéré. »
Il arrive que les réunions des AA soient ouvertes aux non-alcooliques.
« Prière de la sérénité »
Cette maxime était considérée par l'écrivain Kurt Vonnegut comme l'une des plus fortes jamais émises dans l'histoire de l'humanité. Elle a en tout cas un aspect très stoïcien.
Bill W., cofondateur des AA, a dit de la prière de la sérénité : « Nous n’avions jamais vu tant de AA dans si peu de mots. » Dans le livre Le mouvement des AA devient adulte, Bill raconte qu’au début de 1942, la première secrétaire nationale des AA, Ruth Hock, lui a montré, à lui et à d’autres dans leur petit bureau encombré de New York, un avis de décès dans le Herald Tribune de New York qui se terminait ainsi :
« Mon Dieu, donnez moi la sérénité d’accepter
les choses que je ne peux changer,
le courage de changer les choses que je peux,
et la sagesse d’en connaître la différence. »
Quelqu’un a eu la bonne idée d’imprimer ce quatrain sur des cartes format portefeuilles pour l’inclure dans la correspondance du bureau, et c’est ainsi que la prière de la sérénité a fait son chemin pour devenir partie intégrante de la vie AA.
Depuis, elle a été traduite dans les nombreuses langues parlées dans le monde où AA existe. Dans tous les groupes et au début de chaque réunion, elle est récitée à haute voix, par tous les participants qui se prennent par la main en signe de fraternité.
Malgré des années de travail par des chercheurs sérieux, et beaucoup d’hypothèses par des chercheurs amateurs, l’origine exacte de la prière de la sérénité demeure un mystère. Toutefois, une chose semble incontestée : c’est la revendication de paternité du Dr Rheinhold Niebuhr, qui a dit dans une interview qu’il l’avait écrite comme conclusion à un sermon qu’il avait prononcé, cette phrase étant empruntée à Marc Aurèle à l'origine en ces termes : « Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé ; et le courage de changer ce qui peut l’être ; mais aussi la sagesse de distinguer l’un de l’autre. » Aussi le Dr Niebuhr a-t-il ajouté : « Bien sûr, elle peut être apparue sporadiquement au cours des ans, même des siècles, mais je ne le crois pas. Je crois sincèrement que je l’ai écrite moi-même. » Avec sa permission, la prière a été imprimée sur des cartes pendant la Seconde Guerre mondiale et distribuée aux troupes. Elle avait aussi été déjà reprise par le National Council of Churches et par les AA[5].
Les AA, sans être un mouvement religieux, font souvent référence à une « puissance supérieure telle que chacun la conçoit ». Cependant, la référence à Dieu est très souvent présente dans leur littérature, à commencer par cette fameuse prière de la sérénité, faisant appel à une notion de spiritualité, pas nécessairement religieuse.
Les réunions
En France, les réunions AA qui se tiennent dans un peu plus de 600 groupes proposent à ses quelque 10 000 membres de suivre un programme de rétablissement en douze étapes, et ce dans le respect des douze traditions qui organisent le fonctionnent harmonieux du mouvement.
Il y a essentiellement deux types de réunions, animées par un « modérateur » qui invite chacune des personnes présentes à prendre la parole, à tour de rôle :
- les réunions fermées sont réservées aux membres des AA ou à toute personne qui pensent avoir un problème d'alcool. Le désir d'arrêter de boire est la seule condition requise pour être membre des AA ;
- les réunions ouvertes (en principe, une par mois dans chaque groupe), au cours desquelles les participants racontent comment ils ont bu, comment ils ont connu AA et comment le programme les a aidés. Chacun peut y amener des parents ou des amis. Toutes les personnes intéressées par AA sont les bienvenues à ces réunions, particulièrement celles des professions médicales, scolaires ou socio-éducatives.
Une réunion dure en principe cinq quarts d'heure plus un sixième dit « thérapie du café », réservé à une discussion informelle. Ce dernier temps donne aux membres l'occasion de discuter entre eux des problèmes liés à leur ancienne habitude de consommation d'alcool et des efforts qu'ils ont faits pour parvenir à une abstinence durable. C'est au cours de ce moment que se tissent des liens privilégiés qui amènent au « parrainage ». Elles permettent aussi d'explorer en détail les divers éléments du programme de rétablissement qui comporte douze étapes.
Abstinence et sobriété
Les AA proposent un programme d'abstinence totale en douze étapes. Les membres s'abstiennent de prendre un verre, un jour à la fois. (S'ils ne reprennent pas un premier verre, il n'y en aura ni un deuxième, ni d'autres…) C'est la méthode des « 24 heures ». Le malade décide de rester abstinent pour 24 heures. Si c'est trop difficile de rester 24 heures abstinent, il peut fractionner sa journée par périodes : matinée, déjeuner, après-midi, dîner, soirée, nuit… Et il répète l'opération chaque jour… L'abstinence consiste à ne pas consommer une goutte d'alcool. Avec le temps, l'envie de boire de l'alcool diminue progressivement jusqu'à disparaître.
La sobriété est la conséquence heureuse de l'abstinence. C'est une forme de sagesse qui grâce au programme de rétablissement permet à l'alcoolique abstinent de mener une existence aussi heureuse et utile que possible dans tous les domaines de sa vie.
Les douze étapes des Alcooliques anonymes
Voici les douze étapes faisant partie du programme de rétablissement suggéré par les AA, chacune pouvant être utilisée de façon personnelle :
- Nous avons admis que nous étions impuissants devant l’alcool - que nous avions perdu la maîtrise de nos vies.
- Nous en sommes venus à croire qu’une Puissance supérieure à nous-mêmes pouvait nous rendre la raison.
- Nous avons décidé de confier notre volonté et nos vies aux soins de Dieu tel que nous Le concevions.
- Nous avons procédé sans crainte à un inventaire moral approfondi de nous-mêmes.
- Nous avons avoué à Dieu, à nous-mêmes et à un autre être humain la nature exacte de nos torts.
- Nous étions tout à fait prêts à ce que Dieu éliminât tous ces défauts de caractère.
- Nous Lui avons humblement demandé de faire disparaître nos déficiences.
- Nous avons dressé une liste de toutes les personnes que nous avions lésées et nous avons consenti à leur faire amende honorable.
- Nous avons réparé nos torts directement envers ces personnes dans la mesure du possible, sauf lorsque, ce faisant, nous risquions de leur nuire ou de nuire à d’autres.
- Nous avons poursuivi notre inventaire personnel et promptement admis nos torts dès que nous nous en sommes aperçus.
- Nous avons cherché par la prière et la méditation à améliorer notre contact conscient avec Dieu, tel que nous Le concevions, Lui demandant seulement de connaître Sa volonté à notre égard et de nous donner la force de l’exécuter.
- Ayant connu un réveil spirituel comme résultat de ces étapes, nous avons alors essayé de transmettre ce message à d’autres alcooliques et de mettre en pratique ces principes dans tous les domaines de notre vie.
Les douze traditions des Alcooliques anonymes
Voici les douze traditions régissant le fonctionnement des différentes structures (et donc des groupes) et activités des « services » AA :
- Notre bien-être commun devrait venir en premier lieu ; le rétablissement personnel dépend de l'unité des AA.
- Dans la poursuite de notre objectif commun, il n'existe qu'une seule autorité ultime : un Dieu d'amour tel qu'il peut se manifester dans notre conscience de groupe. Nos chefs ne sont que des serviteurs de confiance, ils ne gouvernent pas.
- Le désir d'arrêter de boire est la seule condition pour être membre des AA.
- Chaque groupe devrait être autonome sauf sur les points qui touchent d'autres groupes ou l'ensemble du Mouvement.
- Chaque groupe n'a qu'un objectif primordial, transmettre son message à l'alcoolique qui souffre encore.
- Un groupe ne devrait jamais endosser ou financer d'autres organismes, qu'ils soient apparentés ou étrangers aux AA, ni leur prêter le nom des Alcooliques anonymes, de peur que les soucis d'argent, de propriété ou de prestige ne nous distraient de notre objectif premier.
- Tous les groupes devraient subvenir entièrement à leurs besoins et refuser les contributions de l'extérieur.
- Le Mouvement des Alcooliques anonymes devrait toujours demeurer non professionnel, mais nos centres de service peuvent engager des employés qualifiés.
- Comme Mouvement, les Alcooliques anonymes ne devraient jamais avoir de structure formelle, mais nous pouvons constituer des conseils ou des comités de service directement responsables envers ceux qu'ils servent.
- Le Mouvement des Alcooliques anonymes n'exprime aucune opinion sur des sujets étrangers ; le nom des AA ne devrait donc jamais être mêlé à des controverses publiques.
- La politique de nos relations publiques est basée sur l'attrait plutôt que sur la réclame ; nous devons toujours garder l'anonymat personnel dans la presse écrite et parlée de même qu'au cinéma.
- L'anonymat est la base spirituelle de toutes nos traditions et nous rappelle sans cesse de placer les principes au-dessus des personnalités.
Éléments de compréhension
- Jean-Paul Descombey, psychiatre et alcoologue, s'aidant de la théorie psychanalytique, décèle chez ses patients alcooliques une sorte de manque à être constitutif, un déficit narcissique, amenant le sujet à chercher un objet pulsionnel parfait à travers l'alcool. Il pointe le goût des alcooliques pour le groupe : regroupements au café, autour de la bouteille ; à l'hôpital, les alcooliques tendraient à se regrouper. Il suppose alors que les associations néphalistes telles que les Alcooliques anonymes joueraient un rôle bénéfique de support identificatoire, remplaçant l'objet « bouteille » par l'objet « groupe ».
- George E Vaillant, s'appuyant sur les données recueillies sur deux groupes de jeunes hommes suivis depuis 1940 fait état des résultats suivants : le mécanisme d'action des AA consiste selon lui en quatre facteurs : le support extérieur, la substitution de la dépendance, de nouvelles relations sociales basées sur le soin mutuel et une spiritualité amplifiée. Selon lui, les AA apparaissent égaux ou supérieurs aux traitements conventionnels de l'alcoolisme, sans que l'on puisse repérer d'effet secondaire[6].
- Plusieurs chercheurs confirment l'utilité des AA dans un traitement alcoologique : les groupes participant à la fois au traitement et aux programmes des AA ont un taux de rémission sans rechute plus important[7],[8].
- Une étude de Zemore et Kaskutas (2004) montre que plus l'abstinence acquise est de longue durée, plus les sujets consacrent de temps à servir la communauté et s'impliquent dans la spiritualité des AA (à base de théisme et de transcendance de soi). Ainsi, dès qu'il est devenu abstinent, chaque membre d'un groupe peut y prendre du service au sein de son comité, à la mesure de ses possibilités et après avoir été élu : accueil, intendance, documentation, trésorerie, secrétariat, information publique, représentant auprès des services généraux… Cet engagement est indispensable pour un fonctionnement harmonieux, efficace et durable du groupe. Il aide le serviteur à maintenir son abstinence et à améliorer sa sobriété émotionnelle en lui redonnant confiance.
Diffusion
Au XXIe siècle, les AA sont présents dans 162 pays et plus de 100 000 groupes rassemblent environ 2 millions de membres. En 2011 on dénombre en France 591 groupes fréquentés par environ 7 000 membres selon un sondage. Anonymat oblige, le mouvement ne tient pas de fichier sur ses membres.
Outre le fonctionnement par la tenue de réunions organisées par des groupes[9], eux-mêmes gérés par des comités dont les membres sont élus, des sites ou des forums participent à la solidarité et à la transmission du message des AA. Les groupes en ligne[10] sont pour la plupart membres du Online Intergroup Alcoholics Anonymous ou OIAA[11].
Pour aider les familles et les proches des alcooliques ainsi que leurs enfants qui sont désemparés face à la maladie d'un mari ou d'une épouse, d'un frère ou d'une sœur, d'un père ou d'une mère ou tout simplement d'un ami, il existe un mouvement qui s'appelle Al-Anon/Alateen. Il fonctionne selon des 12 traditions AA et s'inspire des 12 étapes AA pour comprendre le malade alcoolique afin de l'aider de son mieux. Ce mouvement permet aussi à ses membres d'améliorer l'atmosphère familiale, de reprendre confiance en eux et de retrouver l'espoir d'une vie meilleure.
Efficacité
Les investigations consacrées au modèle spécifique proposé par les AA n'ont pas permis, faute d'études fiables, de mettre en évidence sa supériorité dans le rétablissement à long terme de la dépendance à l'alcool comparé à d'autres approches[12],[13] bien que la difficulté à obtenir des données fiables est largement reconnue, en raison notamment de la difficulté à appliquer des contrôles expérimentaux comme le contrôle des effets non-spécifiques[14]. Les Alcooliques anonymes eux-mêmes, à partir des données recueillies par des sondages dans les groupes, estiment qu'environ 26 % des nouveaux membres participent toujours au programme après un an, soit un taux de réussite comparable, ou même supérieur, à ceux trouvés dans des études consacrées à d'autres traitements thérapeutiques de l'addiction[15].
Reconnaissance médicale
Aux États-Unis, le mouvement des Alcooliques Anonymes est reconnu par la communauté scientifique et judiciaire. La participation aux groupes est valorisée par les employeurs et les familles. Dans chaque ville des groupes sont créés et participent aux rétablissements des personnes dépendantes à l'alcool.
En France le mouvement des Alcooliques Anonymes a fait l'objet de méfiance (il aborde la notion de spiritualité, il ne fait pas intervenir de personnel du corps médical pour animer les groupes d'entraide). Marie Jauffret-Roustide chercheuse au CNRS a étudié le fonctionnement des groupes d'entraide, en a décrypté les rouages et a conclu qu'il ne s'agit pas de mouvements sectaires, mais au contraire de lieu de rétablissement et d'entraide (référence de son étude : Les drogues - Approche sociologique, économique et politique par Marie Jauffret-Roustide /2004).
Le mouvement des Alcooliques anonymes a inspiré la mise en place du modèle Minnesota. Celui-ci est un modèle thérapeutique, créé aux États-Unis vers 1950, qui vise à prendre en charge les personnes dépendantes dans leur globalité. En 2012, aux États-Unis et au Canada, la majorité des centres, pour le rétablissement des personnes dépendantes aux drogues et à l'alcool, utilisent cette approche qui a fait ses preuves et vise à prendre en charge les personnes dépendantes dans leur globalité. Ce modèle issu d’un rapprochement entre les modes de prise en charge traditionnels de la dépendance et le mouvement des Alcooliques anonymes repose sur la même théorie, à savoir que la dépendance est une maladie physique, mentale et spirituelle. La majorité des centres de traitement aux États-Unis et au Canada sont fondés sur ce modèle en douze étapes des AA. La collaboration avec les groupes des Alcooliques anonymes pour le rétablissement des personnes dépendantes à l'alcool y est très étroite.
Le 17 décembre 2002, l'association des Alcooliques anonymes en France représentée par sa présidente, le docteur Isabelle Sokolow, praticien hospitalier, s'est vue décerner la médaille de vermeil 2002 de l'Académie nationale de médecine[16] par le professeur Jacques-Louis Binet, sous la présidence du professeur Maurice Tubiana[17].
Inspirations artistiques
Mike Portnoy (ex-batteur du groupe de métal progressif Dream Theater) qui est alcoolo-dépendant, a écrit une série de cinq chansons reprenant les 12 étapes du programme des Alcooliques anonymes. Ces chansons sont réparties sur les différents albums du groupe depuis Six Degrees of Inner Turbulence.
L'écrivain Lawrence Block a créé le personnage de « Matt Scudder », essayant d'arrêter l'alcool avec les AA.
Le groupe de metal progressif A Perfect Circle a nommé son deuxième album studio Thirteen Steps, en référence au programme en 12 étapes des AA, en y adjoignant une 13e[18].
Cinéma
Le film de Philippe Godeau, Le Dernier pour la route (2009), d'après le livre autobiographique d'Hervé Chabalier, raconte qu'Hervé (François Cluzet), patron d'une agence de presse décide d'en finir avec l'alcool. Avec l'aide des AA et du Modèle Minnesota en « 12 étapes », il parvient à devenir abstinent et à vivre une existence nouvelle.
Notes et références
- ↑ (en) Bill W., « Carl Jung Letters », A.A. Grapevine, vol. 19, no 8, (ISSN 0362-2584).
- ↑ (en) Bill W. A communication to A.A.'s physicians from Bill W. december, 1965. The Vitamin B-3 therapy: a promising treatment for schizophrenia -- and its high relevance to the field of alcoholism. (1965).
- ↑ An Interview with Abram Hoffer, par Andrew W. Saul
- ↑ Joseph Kessel, Avec les alcooliques anonymes, Gallimard, coll. « L'air du temps », Paris, 1960 ; rééd 1985 (ISBN 2-07-070414-9) et 1996 (ISBN 2-07-074785-9).
- ↑ « La Prière de la Sérénité : ‘Tant de AA dans si peu de mots’ », Box 4-5-9, vol. 49, no 6, , p. 3–4 (lire en ligne).
- ↑ (en) George E. Vaillant, « Alcoholics Anonymous : Cult or cure? », The Australian and New Zealand Journal of Psychiatry, vol. 39, no 6, , p. 431-436 (ISSN 0004-8674 et 1440-1614, PMID 15943643).
- ↑ (en) Rudolf H. Moos et Bernice S. Moos, « Paths of entry into alcoholics anonymous : Consequences for participation and remission », Alcoholism: Clinical and Experimental Research, vol. 29, no 10, , p. 1858–1868. (ISSN 0145-6008 et 1530-0277, PMID 16269916).
- ↑ (de) M. Bottlender et M. Soyka, « Prädiktion des Behandlungserfolges 24 Monate nach ambulanter Alkoholentwöhnungstherapie : Die Bedeutung von Selbsthilfegruppen », Fortschritte der Neurologie-Psychiatrie, vol. 73, no 3, , p. 150–155 (ISSN 0720-4299 et 1439-3522, PMID 15747224).
- ↑ Un peu plus de 600 en France
- ↑ tels que aa-francophonie, aa-francité ou Entraide Internet AA
- ↑ « OIAA » (Archive • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), consulté le 2013-03-29
- ↑ (en) Ferri M, Amato L, Davoli M, Alcoholics Anonymous and other 12-step programmes for alcohol dependence http://www.cochrane.org/reviews/en/ab005032.html
- ↑ (en) Emrick, C. (1989) « Alcoholics Anonymous: Membership characteristics and effectiveness as treatment » in: Galanter, M., ed. (1989) Recent developments in alcoholism, Vol. 7: Treatment research, New York, NY, États-Unis, Plenum Press, p. 37-53.
- ↑ (en) P Bebbington « The efficacy of Alcoholics Anonymous: the elusiveness of hard data » British Journal of Psychiatry 1976;128(1):572-580. .
- ↑ (en) Don McIntire, « How Well Does A.A. Work? An Analysis of Published A.A. Surveys (1968–1996) and Related Analyses/Comments », Alcoholism Treatment Quarterly, vol. 18, no 4, , p. 1–18 (DOI 10.1300/J020v18n04_01)
- ↑ « L'Académie récompense les Alcooliques Anonymes », Le Quotidien du Médecin, (lire en ligne)
- ↑ http://www.alcooliques-anonymes.fr/aafrance/AA_page.php?np=AA_44_qr
- ↑ http://www.allmusic.com/album/thirteenth-step-mw0000692011
Voir aussi
Bibliographie
- Joseph Kessel, Avec les alcooliques anonymes, Gallimard, 1960, 2013 (ISBN 9782070453559)
- Jean-Paul Descombey, Précis d'alcoologie clinique, Paris, Dunod, 1994 (ISBN 2100022954 et 2100081497)
- Joie de vivre - 50 ans Alcooliques Anonymes en Belgique, Bruxelles, AA, 2003
- Marie Jauffret-Roustide, Les drogues - Approche sociologique, économique et politique, 2004
- Joe Klass, Douze étapes vers le bonheur, Éditions Béliveau, 1993
- Hervé Chabalier, Le dernier pour la route, Robert Laffont, 2004
- Hervé Chabalier, Alcoolisme : le parler vrai, le parler simple, Robert Laffont, 2005
- Anne V., Jusqu'à plus soif, Robert Laffont, 1999, 2013
Liens externes
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- Site belge
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